Difficile de classer ce premier opus solo de l'artiste
touche-à-tout Borja Flames, les
compositions qu'il nous présente dans Nacer
Blanco ont ce petit je-ne-sais-quoi
de captivant voire de déroutant. Les sonorités qu'il façonne semblent parfois s'extraire
d'un rite chamanique improbable
comme dans El Arte De La Fuga et Vuelta Otra Vez où percussions et voix bouclées
surgiraient d'un folklore ancestral d'Amérique du sud.
Moitié du duo June
& Jim qu'il forme avec sa compagne Marion
Cousin, présente dans les entêtants No
Hay Pais et Lazos De Familia construits
de loops et basés sur la répétition de phrases lancés en canon, Borja est fortement influencé par l'œuvre de l'anticonformiste et génial
Moondog, maître du contrepoint et la
fugue entre autres figures de style, qui fréquenta aussi bien Charlie Parker que Steve Reich ou Leonard
Bernstein. Il est admiratif de sa manière d'allier complexité rythmique et
puissance mélodique mais surtout touché par son goût pour le mélange des
saveurs (accents caribéens, sophistication du jazz et avant-garde minimaliste).
Dans cet alliage subtile de chanson pop, de polyphonie
et de musique électronique, Borja se plait à semer le trouble affichant
une posture rock tout en restant connecté
à la puissance mystique des rythmes
premiers. Il nous brouille les idées à grand renfort d'échos et de télescopages,
comme dans Ojo Avizor où sa ligne de synthé psychédélique et sa rythmique primitive syncopée nous
ballade entre les ambiances de The Doors,
Gotan Project et Philip Glass.
Lucius, formation
menée par un duo féminin indie-pop basé
à Brooklyn, nous présente son dernier opus, le sublime Good Grief, qui succède à leur premier Wildewoman,très bien
accueilli par la critique lors de sa sortie en 2013.
Les chanteuses Jess
Wolfe et Holly Laesing ont
composé ce second disque sur la route, durant ces deux dernières années d'une
tournée harassante mais épanouissante. Elles y explorent à travers 11 titres,
toujours interprétés en parfaite harmonie,les
sentiments de solitude, de tristesse, d'épuisement, d'excitation, de complicité
et de joie ressentis durant cette période intense.
Good Grief est produit par Shawn Everett (Weezer, Alabama Shakes) avec Bob Ezrin (Alice Cooper, Kiss ou Pink Floyd) et mixé par Tom Elmhirst (Adele, Beck). On
retrouve autour des deux leaders les multi-instrumentistes Andrew Burri, Peter Lalish
et Dan Molad.
Le premier single partagé par le groupe fin 2015 était Born Again Teen, il s'agit d'un extraitpop rocksurvitaminé et
pétillant à l'efficacité redoutable, parcouru par des voix légèrement
aiguisées et des guitares saturées, le tout monté sur l'assise d'une batterie assommante
aux grains vintage. Something About You, Almighty
Gosh sont du même acabit punchy.
L'ensemble de Good
Grief n'est pas construit autour de cette même veine rythmique orientée dancefloor, en effet le second single Madness est construit sur un mode bien
plus sage et ample, une ballade pop
aguichante et gracieuse aux atouts mélodiques catchy.
Dans Dusty Trails,
Jess et Holly nous offrent une sublime chanson folk aux saveurs acoustiques country;dans l'atmosphérique My Heart Got Caught On Your Sleeve, l'absence
de batterie nous fait prendre de l'altitude ne laissant qu'un piano et des
cordes accompagner les chanteuses qui œuvrent à l'unisson.
Almost Makes Me Wish
For Rain revêt des accents R&B,
Truce arbore les reflets chauds d'une
soul sensuelle,tandis que Gone Insane
nous rappelle les sonorités puissantes de Gossip.
Lucius nous envoie
sa nouvelle bombe qui ne manquera pas de ravir les amateurs de sons electro pop.
Né au Liban et d'origine arménienne, le multi-instrumentiste
gréco-turc Abaji s'exile en France en
1976 fuyant une guerre civile qui déchirera son pays jusqu'au début des années 90.
Passionné par les médecines chinoises, la musique sera finalement la voie qu'il
empruntera, explorant les sonorités d'instruments traditionnels de sa région
natale et s'abreuvant au gré de ses voyages d'influences variées allant de la
musique indienne ou sud-africaine au blues en passant bien sûr par la musique
orientale notamment gnawa.
Il publie aujourd'hui son 6° opus intitulé Route&Roots, un titre qui résume à
merveille l'esthétique du projet dans lequel l'artiste convie les joueurs de doudouk
Vardan Grigoryan et de kakak kemane Mahmut Demir. Respectivement d'Arménie
et de Turquie, ces deux musiciens participent à ce retour aux sources voulu par
Abaji qui, au chant, au oud, à la
flûte, au bouzouki et autres cordes ou percussions, rend les frontières perméables
et réconcilie deux peuples aux relations tendues.
En 2009, son retour au Liban lui avait inspiré Origine Orients dans lequel il
s'exprimait dans les 5 langues de sa famille (français, turc, arménien, grec et
arabe). Enregistrés aussi en polyglottie et toujours en une seule prise, les 17 morceaux de Route&Roots nous proposent à
nouveau une immersion intimiste dans l'univers
acoustique teinté de folk, de blues et de worldd'un globetrotteur invétéré, qui remonte cette fois-ci le temps à la
découverte des racines parentales.
Sans artifice, le disque a été réalisé grâce à son studio
mobil, composé du minimum pour accéder à un
maximum d'authenticité dans la captation des sons et le traitement des
ambiances et des espaces.
Ses chants fédérateurs et universels sont emplis de
nostalgie, une saudade orientale poétique
et touchante orchestrée par "un
métèque poreux à tous les souffles du monde".
Le grand public a entendu parler du duo electro-conceptuel de San Francisco Matmos grâce à sa
collaboration avec Björk sur les disques
Vespertine en 2001 et Medulla en 2004. M.C. (Martin) Sschmidt et Drew
Daniel nous présentent aujourd'hui leur 10° opus intitulé Ultimate Care II. La forme de cet album
est peu conventionnelle, puisqu'il est
construit entièrement avec les sons générés par une machine à laver Whirlpool
Ultimate Care II. Une seule piste
s'écoule durant 38 minutes restituant dans un certain ordre assemblé les
bruits des différentes pièces de l'objet malmené, trituré ou frappé comme une
percussion. Les artistes ont capté ces emprunts au réel, les ont échantillonnés, séquencés et modifiés
pour obtenir un vocabulaire sonore, mélodique et rythmique qui se rapproche des
expérimentations musicales concrèteset industrielles comme des genres électroniques du type drone, glitch ou house. On peut
aussi y percevoir les influences du free-jazz,
du krautrock ou du new-age… Malgré cette approche expérimentale, Ultimate Care II peut s'écouter sans
être rebuté dès la première mesure, c'est peut-être là que réside tout
l'intérêt de l'exercice !
Le compositeur et multi-instrumentiste américain Keith Kenniff alias Goldmund nous présente son nouveau
projet baptisé Sometimes. Ce disque tendre et touchant se compose de
17 plages ambient plutôt courtes, au
cours desquelles le producteur élabore de subtiles
nappes musicales postclassiques où des mélodies dépouillées et interprétées
sur un piano réverbéré s'évaporent dans
des brouillards électroniques aux sonorités organiques. Moins acoustique
qu'une pièce de Ludovico Einaudi, Sometimes déploie cette même force
évocatrice d'images. L'auditeur, happé par ces textures immatérielles, erre
dans un espace aux contours flous et habité de mélancolie. Malgré que la
lumière y soit faible voire quasi absente, il est guidé par quelques notes délicates suspendues comme
en apesanteur et quelques emprunts
sonores familiers (la pluie, un courant d'eau qui ruisselle, une brise dans
les feuillages ou encore quelques échos indiscernables…). Le seul ingrédient qui
pourrait s'apparenter à un élément rythmique est le bruit a demi étouffé que
font les doigts de Keith en
martelant les touches de son instrument, ces petits riens presque inaudibles
font la qualité indéniable de ce disque
d'hiveraux allures de bande-son
invitant à la rêverie et au repos.
A noter l'intervention du maître japonais Ryuichi Sakamoto sur le titre A World I Give dont les premières notes nous rappellent étrangement l'illustre Love Theme de Spartacus, devenu depuis la sortie du film de Stanley Kubrick en 1960 le standard de jazz par excellence.
C'est en juin dernier, grâce à l'entremise du label anglais Tru Thoughts que nous découvrions Space Captain, le collectif basé à
Brooklyn nous livrait alors son excellent single Easier/Remedy. Poursuivant son incursion dans les sonorités hip-hop, R&B et electro,
la formation menée par le producteur Alex
Pyle et la chanteuse Maralisa
Simmons-Cook publie 5 nouveaux titres dans un EP baptisé In Memory.
Si l'ouverture Screams
baigne l'auditeur une nappe de réverbes laissant à peine échapper le chant
d'une sirène, Landing/Up In The Hills
nous immerge quant à lui dans une production instrumentale lorgnant sur un abstract hip-hop tourmenté par des glitchs, qui se mue en une ode cosmic soul éthérée habitée par la
délicieuse voix de Maralisa. Cosmos poursuit notre aventure spatiale
avec ses sonorités jazzy jusqu'à ce
que naisse une rythmique hip-hop construite
selon les préceptes édictés par le grand J.
Dilla. Still est à considérer comme
l'introduction du titre phare de l'EP à savoir Two, Maralisa y déploie
les atouts d'une voix sensuelle et
profondément soul tandis qu'Alex
élabore une instrumentation dominée par les accords d'une guitare lancinante, le tempo est lent, l'atmosphère y
est vaporeuse et des plus enivrantes jusqu'à ce qu'elle se brouille et se
sature d'ondes électriques… On s'attendrait presque à voir surgir Fly Lo au détour de ces expérimentations soniques torturées.
Ed Motta –
Perpetual Gateways (Membran Entertainment Group)
Le crooner et soulman brésilien Ed Motta nous revient avec un sublime Perpetual Gateways, son 15° album qu'il publie grâce à l'entremise
du label allemand Membran (Joss Stone, Peter Schilling, Jimmy Somerville, Johnny Winter…).
Depuis son premier opus paru à la fin des années 80, le chanteur a su imposer
sa signature soul/funk sur un marché
brésilien inondé par la MPB (musique populaire brésilienne). Presque 30 ans
plus tard, le multi instrumentiste
nous régale toujours de ses sonorités
jazzy gorgées de lumière carioca et ce n'est pas ce dernier disque qui
changera la donne.
En effet on y retrouve sa voix de velours aux rondeurs des plus sensuelles, son groove assassin et classieux sans doute
hérité de son oncle Tim Maia ('Barry
White de la soul brésilienne'), ainsi que ses arrangements sophistiqués aussi
bien influencés par les Earth Wind &
Fire (Captain's Refusal) et Stevie Wonder (Good Intentions) que par les piliers du be-bop (The Owner), de la
bossa nova, du tropicalisme ou du rock anglais.
Perpetual Gateways
se divise en deux mouvements, dans le premier l'auteur/compositeur y expose son
amour pour les textures rythmiques
chaudes et chaloupées du funk, de la soul et du R&B, il y développe 5
titres à la magie contagieuse et entraînante (dans la lignée de ses idoles Steely Dan et Donald Fagen) même lorsqu'il s'agit de ballades romantiques telles
que Reader's Choice. Les lignes de
basse électrique de Cecil Mc Bee Jr.
(fils de Cecil Mc Bee qui officia à la contre basse auprès d'Alice Coltrane,
Art Pepper ou encore Yusef Lateef) y sont pour beaucoup!
Dans un second temps, Forgotten
Nickname marque un changement de registre avec ses reflets acoustiques habités de ces notes bleues si précieuses et
délicates, on notera d'ailleurs la délicieuse intervention du flutiste américain
Hubert Laws (George Benson, Chet
Baker, Chick Corea, Quincy Jones…).
A Town In Flame ravira
les amateurs de jazz vocal effervescent aux
orchestrations euphoriques chargées de cuivres (Curtis Taylor à la trompette, Charles
Owens et Ricky Woodard au sax) et de claviers (Patrice Rushen et Greg
Phillinganes) qu'un certain Gregory
Porter démocratise depuis quelques années (pour l'anecdote, c'est le même Hubert Laws qui donna sa chance à l'ancien
joueur de football américain, alors petit protégé de l'actuel producteur d'Ed Kamau Kenyatta, dans son hommage à Nat
King Cole en 1998).
Le tempo est soutenu par l'énergique batteur Marvin 'Smitty' Smith (Jon Hendricks,
Achie Shepp, Sting…) et l'étonnant contrebassiste californien Tony Dumas, tous deux nous offrent l'assise des épiques I Remember Julie et Overblown Overweight, véritables temps forts de l'album avec leur swing ravageur et terriblement généreux.
Ed Motta nous
offre à nouveau un rayon de soleil, une onde
soul/jazz aux vibrations positiveset
auxpulsations enivrantes.
Aucune fausse note parmi les 10 titres qu'il a écrits et composés, épaulé par
un mentor, le pianiste, saxophoniste, enseignant et arrangeur de Détroit Kamau Kenyatta. La sortie européenne de
Perpetual Gateways est prévue pour
courant Février…
Chrissy, ex-adepte
des rythmiques électroniques nerveuses made in Chicago (sous son alias Chrissy Murderbot) semble s'être mis au vert et nous présente chez Classic Music Compagny sa dernière
production 'Join Me', largement
empreinte de sonorités soulful et disco.
Composé du titre éponyme, cadencé disco-house,
où il invite le chanteur soul Miles
Bonny, de son Re-Edit 80's
orchestré par Rahaan et du tonique Get It aux reflets funky-house, l'EP ne sortira qu'en version digitale le 08 Février
prochain. Il marque une étape supplémentaire dans la réorientation musicale du
Dj/producteur américain, revirement amorcé par son autre alias Chris E Pants dans des titres comme Doggy Style.
Raphaël Imbert & Co – Music Is My Home –
Act I (Jazz Village/Harmonia Mundi)
Le saxophoniste autodidacte Raphaël Imbert, jazzman invétéré et infatigable, nous présente son
dernier projet intitulé Music Is My Home
– Act 1. Chargé de mission pour effectuer une recherche sur les racines
musicales du sud profond des Etats-Unis, il y effectue plusieurs séjours entre
2011 et 2013 durant lesquels il fera la connaissance de quelques figures
locales emblématiques de la scène blues et New Orleans. A travers 13 titres
vibrants, l'ethnomusicologue nous emmène dans les états pionniers de ces
musiques métisses qui accoucheront du jazz au début du XX° s. On y croise ainsi
les voix de légendes vivantes du blues
rocailleux comme Alabama Slim (The Mighty Flood) ou électrique comme Big Ron Hunter alias le "bluesman
le plus heureux du monde"(Going For
Myself, Make That Guitar Talk),
mais aussi des artistes plus jeunes à l'instar des délicieuses chanteuses
francophones Leyla McCalla, artiste créole aussi bien à l'aise au
violoncelle qu'au banjo(Weeping Willow Blues, La Coulée Rodair, Help Me Lord) et Sarah
Quitana (Po Boy). Toutes deux
partagent leur origine cajun. Issues
d'un autre sud, celui de la France, on ne boude pas non plus le plaisir de compter
parmi le staff la batteuse Anne Paceo
et la chanteuse marseillaise Marion
Rampal (Sweet River Bues).
Toutes et tous se joignent à la Compagnie Nine Spirit (déjà bien au fait des sonorités du delta) que Raphaël
a créé en 1999 à Marseille avec notamment le guitariste Thomas Weirich, le multi-instrumentiste Simon Sieger (trombone, claviers et accordion) et le bassiste Pierre Fenichel (spécialiste du ukulélé
basse).
La chanteuse kurde Ozlem
Bulut, originaire d'un petit village dans l'Est de la Turquie, nous
présente son nouvel opus intitulé Ask.
Si les rythmes et les mélodies
traditionnelles d'Anatolie habitent ce second disque, le jazz, le chant lyrique et la pop s'y
frottent allègrement. La voix puissante
et cristalline de la cantatrice (qui fît ses armes au Vienna State Opera et
au Vienna Volksoper en Autriche ainsi qu'à l'Opéra Bastille de Paris) impose un
style qui allie subtilement, et avec une
grande liberté, les saveurs orientales aux richesses harmoniques de la musique
aux notes bleues. Elle est entourée depuis 2008 de son Ozlem Bulut Band, mené par le claviériste et compositeur autrichien
Marco Annau, l'ensemble propose une effusion
de sonorités éthnojazz joyeuses et
pétillantes illustrant des textes et une posture engagés et résolument modernes
pour un pays dans lequel demeure encore des courants archaïques et rétrogrades.
Le duo indie-pop berlinois Me And My Drummer nous offre enfin une suite à leur premier effort The Hawk, The Beak, The Prey paru en 2012. Love Is A Fridge en reprend les grandes lignes et se pare de reflets plus colorés voire expérimentaux, variant davantage les ambiances et accentuant son versant dansant. Situant leurs influences du côté de Serge Gainsbourg, Can, PJ Harvey ou Broadcast, Charlotte Brandi et Matze Pröllochs accouchent d'un disque murement réfléchi et sans compromis. Ils y distillent une electro-pop inspirée, soignée et polymorphe qui oscille entre ballades aux accents synth-rock cosmiques parcourues de textures nébuleuses et titres plus up-tempo, semés d'influences 80's plutôt catchy.
Man Without a Clue Feat. Maleka - Bless Her Soul (Defected Records)
Pour ses débuts chez Defected, le jeune Dj/producteur hollandais Man Without a Clue frappe un grand coup avec son excellent single Bless Her Soul. Celui qui a collaboré avec 3 des artisans majeurs de la house new-yorkaise, à savoir les légendes Todd Terry, Kenny Dope et Roger Sanchez, nous offre un classique du genre à la ligne de basse obsédante et racée, habité en prime du flow soulful et sensuel de la divine Maleka.
Qui a pu oublier son terrible When I Play This Record paru en 2014 sur DFTD et qui s'était hissé parmi les plus gros succès underground joués à Ibiza l'été de cette même année?
Juste un petit tour du côté des dernières actualités musicales abordées dans mon blog Les Chroniques de Hiko... Riva Starr, Worthy, Surnatural Orchestra, Sainkho Namtchylak, Baaba Maal, Les gordon, MK Grands.
Parcouru d'ambiances
trip-hop cinématiques auxreflets
rock psyché, le dernier opus du flutiste Jocelyn Mienniel hypnotise l'auditeur, lui faisant arpenter un
paysage urbain poussiéreux semé de larsens et de distorsions. Les textures de Tilt sont pesantes, sombres et saturées,
Joce les tisse avec le concours du batteur
et maître des FXs Sébastien Brun, du
guitariste aux sonorités lancinantes Guillaume
Magne et du claviériste Vincent
Lafont. Les nappes de Fender Rhodes,
lacérées par les accords tranchants
de la guitare électrique, forment la toile de fond en lambeaux d'un disque
abrasif, rythmé par des coups martelés quasi mécaniquement sur une batterie tapageuse. L'album se compose
d'une ouverture, de 3 suites à 3 mouvements et d'un épilogue. S'y enchaînent
des pièces électrisantes dessinant les contours d'un rock progressif se dévoilant au ralenti. Le charmeur de serpent
explore les possibilités insondées et insoupçonnées de sa flute traversière,
modulant son souffle ou écorchant ses notes avec quelques effets spéciaux.
Tim Deluxe - The Radicle - Jas (single) (Strictly Rhythm)
Le musicien, producteur et Dj anglais Timothy Adrew Liken alias Tim Deluxe nous régalait fin Octobre 2015 avec la parution de son excellent album The Radicle publié par la célèbre écurie new-yorkaise Strictly Rhythm.
Ce troisième opus s'inscrit dans le retour en force d'un style qui avait plus ou moins disparu des écrans radar depuis la grande époque des St Germain, Mr Scruff et autres Jazzanova. En effet il illustre la rencontre sur le dancefloor du jazz et de la musique électronique et plus particulièrement de la house music. Tim Deluxe, qui avait cartonné dans les charts durant l'été 2002 avec son tube latino It Just Won't Do, n'a cessé de mixer aux 4 coins du globe au point d'arriver à un point de non-retour en 2008 où il s'est brutalement retiré du monde de la nuit et de la musique.
C'est en prenant des leçons de piano et en s'abreuvant de jazz que les goûts du jeu et de la composition lui sont revenus. Sa rencontre avec le contrebassiste Ben Hazleton lui permit de s'introduire par la petite porte sur la scène jazz londonienne et de là il forma son équipe de musiciens (parmi lesquels on note Jim Mullen à la guitare, le tandem Rod Youngs/Enzo Zirilli à la batterie et John Donaldson au piano) qui allait intervenir en studio sur ses nouvelles moutures.
Toujours connecté à la musique électronique, il s'est retrouvé derrière les claviers de Roots Manuva lors de quelques dates, une expérience formatrice qui l'aidera dans sa "reconversion". En effet, le producteur electro repenti exprime à travers The Radicle son anti-EDM et sa méfiance envers des tracks faits du même bois, qui ont trop souvent tendance à se ressembler. Parti pour faire un disque de jazz pur avec uniquement de "vrais instruments", il a finalement cherché à concilier le métier du Dj et la sensibilité du musicien, l'esprit du jazz et l'efficacité de la house.
Influencé par des grands maîtres du swing et du be-bop (Duke Ellington, Miles Davis, Alice Coltrane...), du blues (Big Mama Thornton, Fenton Robinson...) et de musique minimaliste (Terry Riley, John Cage...), Tim nous balançait en guise d'amuse bouche en Aout 2015 son premier single très orienté club Tryin' Find Awaypuis quelques mois plus tard l'excellent Feelings, qui a depuis tourné des centaines de fois sur les platines des plus grands djs (notamment chez Defected), avec son côté très french touch (façon Rose Rouge de l'album Tourist de notre Ludovic Navarre national) il a rapidement conquis les pistes de danse captivées par sa ligne de basse hypnotique et les cuivres entraînants de Jay Phelps (trompette) et Pete Wareham (saxophone).
Jas est donc le dernier extrait en date de The Radicle et outre les codes electrojazz déjà mis en avant dans ses précédents singles, il exprime l'engagement social et politique que l'artiste a voulu imprimer dans l'album. Pour ce, il sample une allocution vibrante de Barbara Ann Teer, comédienne et écrivaine qui a lutté pour l'accès des populations afro-américaines à la culture: "This is a mass culture we live in. It makes you look like something you really aren't. I want to be me, i want to be human." Ses mots résonnent en quasi a cappella pendant près de 50 secondes avant qu'une ritournelle au piano nous accompagne jusqu'au déferlement d'un groove deep-house étourdissant ! Jas est remixé par Eli Escobar (Eli Escobar Remix et Eli's Bonus Beat) et Timothy lui-même (Rhodes Remix et 'Speed' Remix).
Pierrick Pédron - AnD the (Jazz Village/Harmonia Mundi)
Le saxophoniste alto Pierrick Pédron a fait ses classes musicales à Paris aux côtés de figures emblématiques de la nouvelle scène jazz hexagonale telles que Magic Malik et les frères Belmondo. Fan inconditionnel de Charlie Parker et virtuose polyvalent, le soliste breton se fait aussi remarquer sur scène ou en studio auprès d'artistes plus pop aux incursions funk et R&B, comme Juan Rozoff ou Sinclair. Cette ouverture d'esprit le conduira en 2009 après avoir enregistré plusieurs albums catalogués jazz entre Paris et New York (avec notamment Baptiste Trotignon, Mulgrew Miller ou encore Pierre de Bethmann...) à sortir Omry, un succès publique et critique de jazz-rock réunissant toutes les sonorités qui constituent son identité musicale protéiforme.
S'il a déjà illustré les influences fondamentales que furent pour lui Pink Floyd, The Clash, Sex Pistols, David Bowie (RIP) ou Cure (Kubic's Cure qu'il a publié en 2014), le volubile Pierrick ne s'est pourtant jamais trop éloigné des maîtres du be-bop (on se souvient de son Kubic's Monk, hommage au pianiste) et du hard-bop, relevant à chaque fois le défis de dresser des passerelles entre les étiquettes et les époques.
Dans son dernier disque And The enregistré entre Bruxelles et Panam, Pierrick a choisi d'orienter ses recherches sonores vers un son plus funky, un acid jazzau groove rétro et brulant parcouru ici d'une mélodie éthio-jazz (Ethiop) ou d'une rythmique afrobeat (Monk Ponk Train)et là d'une ambiance psychédélique (Val 2) ou pop (Val 1). L'énergie du rock perce au travers de titres explosifs comme Tootoota alors que quelques accentsélectro s'invitent dans PP Song Tree ou Clock Road.
Epaulé par son fidèle ami le claviériste Vincent Artaud, le saxophoniste a convié les guitaristes Jan Weissenfeld et Chris de Pauw, le trompettiste britannique Damon Brown, le batteur Bernd Oezsevim et les bassistes Julien Herné et Tomi Simatupang, le percussionniste Didac Ruiz, la claviériste Marja Burchard et le xylophoniste Jérôme Fanioul... Soit une team de haut vol pour un album débridé et décalé !
Le Surnatural
Orchestra est une fanfare (et qui
dit fanfare dit esprit festif !) réunissant près d'une vingtaine de musiciens,
une grosse machine à géométrie variable qui tourne depuis déjà 15 ans dans la
sphère jazz, cultivant depuis lors
un enthousiasme pour lafusion des codes musicaux, l'expérimentation et l'improvisation
bien sûr. Aucun leader ne dirige véritablement le collectif, qui veut composer
compose et soumet sa copie à l'ensemble, qui la joue, l'éprouve et l'adopte. Dans
ce dernier opus de 7 titres baptisé Ronde
par son directeur artistique Ferry
Heijne (De Kift), les thèmes abordés explorent
comme toujours les limites du jazz à travers différentes atmosphères comme
celle, évidente, de la pop (ffff), mais aussi celle des folklores (Zmerisch), de la musique de
film (Le Magicien) et de la musique classique (Reload et la valse Gallia)
ou contemporaine (Megantereon). Pauvre Paris nous offre même un final rock'n'roll ardent et théâtral!
Une édition double-vinyle collector est tirée à 300
exemplaires et la version cd est livré sur un tourillon de bois pressé entre
des disques de feutre, celui faisant office de couvercle est imprimé d'une
sérigraphie de Camille Sauvage qui
signe d'ailleurs tous les visuels du groupe ainsi que le scenario et le
graphisme de son site internet.
Le Surnatural
Orchestra a ainsi voulu renouer avec le statut d'objet que revêt une œuvre
sonore enregistrée sur un support, prenant ainsi à contre pied la tendance actuelle
de dématérialisation de la musique.
Ci-dessous une vidéo nous donnant une petite idée de ce qu'est le Surnatural Orchestra...
Sainkho
Namtchylak - Like A Bird Or Spirit, Not A Face (Ponderosa/Harmonia Mundi)
La chanteuse russe Sainkho
Namtchylak est originaire de la République de Touva, une contrée située au
nord de la Mongolie en Sibérie méridionale. Elle publie son nouveau projet
intitulé Like A Bird Or Spirit, Not A
Face enregistré avec les musiciens nord-africains et maliens de la célèbre formation
Tinariwen. On retrouve ainsi l'incontournable
Ian Brennan à la production d'un disque mêlant les sensibilités de deux folklores
nomades, le Khöömei (chant
diphonique issu de la tradition chamanique des steppes) et le blues touareg du Ténéré. Sainkho a toujours cherché à explorer
et à confronter les cultures, elle n'a eu de cesse au cours de ses voyages et
de ses collaborations d'expérimenter les
techniques vocales des chants lamanistes de Sibérie avec la folk, le jazz, la
musique classique, ethnique et contemporaine.
Tuva Blues - Extrait de l'album Stepmother City (2002)
L'excellent Dj/producteur Riva Starr publie sur Defected
Records son dernier EP intitulé The
Superdope. L'histoire qui relie le label londonien à l'artiste napolitain
ne date pas d'hier, cette collaboration fructueuse nous offre cette fois-ci 3 véritables
bombes visant les dancefloors férus de house
music aux accents soulfull et au
groove enivrant. Vénéré par ses paires autant que par son auditoire, Riva nous présente donc l'entêtant Body Movin', armé d'une bassline hypnotique et d'un clavier funky, l'entraînant Raw Feel et ses loops de synthé 90's puis le sombre The Superdope, urgent et captivant.
Basé à San Francisco le jeune Dj/producteur Worthy nous offre son nouvel EP Lower & Slower, marquant ses débuts
dans l'exigeante écurie Defected Records
via son tout récent label DFTD. Il
se compose du titre éponyme et de l'excellent This Time. Carl Cox, Richie Hawtin, Diplo ou Svan Vath ne se
trompent pas en considérant les productions de Worthy comme le futur de la tech
house.
L'EP est rythmé par des lignes de basse massives et funky au reflet old school. Lower
& Slower est un tube underground en puissance à l'efficacité
redoutable. Son beat est des plus classiques, dépouillé mais essentiel, un
sample de voix balance en cadence un "To
The Beat" entêtant et un synthé dubstep ponctue habilement ce track deep
et sensuel.
This Time est un plus
élaboré, avec ses breaks aux claviers vaporeux sa construction est nettement plus
punchy et dynamique. Worthy semble quitter un temps les
ambiances breakbeat et techno qui ont enflammées le publique des festivals
Ultra, Love Parade ou Burning Man pour se rapprocher d'un son plus classique et
classieux. A suivre…!
Baaba Maal - The Traveller (Marathon
Artists/Pias)
Le chanteur sénégalais Baaba
Maal publie son 11ième opus baptisé The Traveller. Avec Youssou N'Dour et Ismaël Lô, il élève depuis
plusieurs années la culture musicale de son Pays vers les plus hauts sommets
des charts internationaux.
Porté par ses racines
africaines et influencé par la pop occidentale,
le musicien nous invite à partager sa vision positive du monde actuel dans une
épopée riche en sonorités acoustiques et numériques où instruments
traditionnels (kora, tama, …) côtoient boîtes à rythme, guitares et synthés
dans un dédale de mélodies enivrantes
et de nappes électroniques vaporeuses.
Le tempo varie, tapageur dans l'ouverture Fulani
Rock et tranchant dans l'hymne War
(où le poète Lemm Sissay scande son
texte engagé et militant), il s'assagit dans le chatoyant One Day ou la délicieuse ballade Kalaajo.
La contradiction entre tradition et modernité n'existant pas
chez Baaba, la star sexagénaire
devenu Emissaire pour la Jeunesse auprès
des Nations Unis, a choisi pour la réalisation de son album de faire appel
à l'expertise du jeune Dj/beatmaker Johan
Karlberg Hugo, moitié de Radioclit qui
forme avec le chanteur du Malawi Esau
Mwamwaya, le combo électro/afro/pop The
Very Best.
Juste un petit tour du côté des dernières actualités musicales abordées dans mon blog Les Chroniques de Hiko... David Linx/Paolo Fresu/Diederick Wissels, Sofiane Saidi, Kandia Kouyaté, Franck Vigroux, Enrico Pieranunzi,Bareto, Philippe Petrucciani & Nathalie Blanc, The James Hunter Six, Michael Fulberbaum, Bareto, Moonchild
Juste un petit tour du côté des dernières actualités musicales abordées dans mon blog Les Chroniques de Hiko... Adrian Younge, Jamie XX, Henri Texier, Franck Vigroux, Mood II Swing, Alain Chamfort, Myrddin, Damian Lazarus, Julian Julien, L'Etrangleuse, Nicolas Paugam...