Get The
Blessing – Astronautilus (Naim Jazz/Modulor)
Dédié au saxophoniste précurseur du free jazz Ornette Coleman, disparu en juin
dernier à New York, Astronautilus
est le 5° opus de la section rythmique de Portishead,
Get The Blessing. Composé depuis ses
débuts en 2000 du saxophoniste Jake
Mucmurpchie, du trompettiste Pete
Judge, du batteur Clive Deamer
et du bassiste Jim Barr, le quartet post-jazz de Bristol nous offre
9 titres sombres aux ambiances punk tendues et électriques. Les sonorités cuivrées désarticulées, distordues
et renforcées d’FX noisy sont soutenues
par des lignes de basse massives et des
beats tranchants et crasseux. Si l’improvisation y occupe une place
importante, Astronautilus combine
habilement les rythmiques marquées aux atmosphères cinématiques et embrumées,
habitées de mélodies lancinantes parfois accrocheuses et d’autres fois dissonantes
et complexes. Get The Blessing
évolue aux frontières du jazz, se
frottant à l’ambient, au post-rock, à l’electro et à la musique de
film.
Antiquarks – KÔ le libre album (Mustradem/InOuie
Distribution)
La compagnie Antiquarks
est à l’initiative depuis sa création il y a une dizaine d’années d’une quinzaine
d’œuvres originales et de plus de 300 performances artistiques, concerts,
spectacles, conférences ou workshop, délivrés en France et à travers le monde.
Le collectif humaniste, tentaculaire et à géométrie variable, nous présente son
dernier projet intitulé KÔ (« corps »
en créole), une œuvre musicale, graphique et poétique se dressant avec vigueur,
humour et folie contre une industrie du disque standardisée et omnipotente.
Offert comme un « humanifeste du
corps ordinaire » sous la forme d’un livret de près de quarante pages, d’un
disque de 8 titres et d’un show anticonformiste et débridé, KÔ convie son public devenu auditeur,
spectateur et lecteur dans un univers singulier où se « rassemblent une
pluralité de mondes musicaux ». La chanteuse tuscarora militante Pura Fé (Western Dark Side) côtoie ainsi la cantatrice de l’orchestre
national de Lyon Sophie Lou (Papageno Papagena), le percussionniste Ismael Mesbahi (Aman) et le danseur/chanteur burkinabé Bouréima Kiénou (Rockya Couba)
dans une musique « interterrestre »
comme le dit l’un des piliers d’Antiquarks,
l’artiste-sociologue chanteur, percussionniste et compositeur, Richard Monségu. Entre les rythmes d’Afrique de l’ouest, le punk/rock (Pigs Bridge), la musique
orientale, le world jazz (Shake It) ou les ambiances créoles (Dyab), KÔ se joue des codes, prend le risque d’être une œuvre foisonnante
et plurielle, sans à priori mais gorgée de convictions.
G!rafe & Bruno Girard - L’Ami que j’Aimais Bien
(Discobole Records)
Quel est donc cet animal étrange, qui, animé par une énergie post-rock, joue une musique
sombre marquée par les mots d’un poète maudit nommé Alain Peters ? G!rafe
est une formation menée par le chanteur Bruno
Girard (membre de Bratsch,
groupe historique français aux influences jazz, tziganes, russes et arméniennes)
et composée du bassiste Théo Girard,
du batteur Eric Groleau, du
guitariste Stéphane Hoareau et du clarinettiste
Nicolas Naudet. Son projet intitulé L’Ami que j’Aimais Bien est un hommage à
l’auteur et musicien réunionnais Alain
Peters, qui fusionnait dans les années 70 psychédélisme, rock et maloya.
Bruno a choisi de dire en français 6
poèmes de l’artiste disparu précocement en 1995, ils expriment tantôt l’espoir puis
le désespoir, tantôt la déception amoureuse et la solitude puis l’injustice
sociale… Bref autant de divagations souvent mélancoliques et parfois amères que
son chant grave et imposant, qui s’apparenterait
presque au slam de Grand Corps Malade, extirpe avec calme
et vigueur d’un amas rocheux en fusion.
Le trombone a toujours été un instrument fascinant, de par
son allure et sa mécanique, mais rarement mis en premier plan. On garde cependant
en mémoire quelques noms illustres comme le jazzman J J Jonhson, l’immortel Fred
Wesley des JB’s, plus récemment le suédois Nils Landgren ou le tout jeune Trombone
Shorty, natif de la Nouvelle Orléans.
Fidel Fourneyron,
originaire d’Albi dans le sud ouest de la France, nous présente son premier
opus solo intitulé High Fidelity.
Bien loin des sentiers battus par ses aînés, le tromboniste virtuose invite son
auditoire à partager l’intimité qui le lie à son instrument, duquel il parvient
à extirper des sonorités inédites et surprenantes. Passionné par les grands
orchestres de swing et amateur de rumba cubaine, c’est véritablement dans les
milieux du jazz moderne, de la musique improvisée et contemporaine qu’il
se fait remarquer. High Fidelity n’a
d’ailleurs rien à voir avec un disque de jazz au sens classique, c’est une
suite de 9 titres pour trombone seul, où bruits, souffles, grincements,
grognements, cris, murmures, monologues et répétitions entêtantes se succèdent,
se chevauchent et se causent, laissant parfois échapper quelques phrasés familiers.
Gentleman’s Dub Club - The Big Smoke (Easy Star
Records)
Le combo anglais baptisé Gentleman’s Dub Club nous présente chez Easy Star Records son dernier obus sonique composé de 11 titres et intitulé
The Big Smoke. Ses 9 musiciens
réputés pour l’énergie qu’ils dégagent en concert se sont rencontrés en 2006 à
Leeds, après sept années d'une tournée mondiale parait leur premier essai FOURtyFOUR suivi de deux EPs très bien
accueillis par la scène bass music
britannique. Avec ce second opus la formation nous convie une nouvelle fois
dans son trip dub, imbibé d’influences reggae et ska. Les
ambiances planantes et cuivrées gavées de reverbes et d’echos sont bien sûr au
rendez-vous, ainsi que le chanteur Natty
sur un One Night Only très roots et le jeune saxophoniste Josh Arcoleo dans un Nocturnal à la rythmique 2 Tone tranchante.
Rien de mieux pour commencer sa journée que d’écouter le
nouveau projet aux sonorités world/est-africaines
du multi-instrumentiste de Los Angeles Dexter
Story, véritable chantre de la
culture jazz et hip-hop underground américaine. Ayant autant croisé le fer
avec Wynton Marsalis et Kamasi Washington qu’avec Madlib et Les Nubians, le
producteur aux multiples casquettes s’est aussi frotté au marketing de
l’industrie musicale en travaillant notamment pour Def Jam et Bad Boys Records.
Après Seasons
paru en Février 2013 chez Kindred
Spirits, un premier album soul aux accents jazzy, funky et R&B, le
musicien cinquantenaire (qui emprunte son nom d’artiste à l’illustre
saxophoniste Dexter Gordon) nous
présente son second opus baptisé Wondem,
dans lequel il ré-explore depuis son home studio californien les rythmes
africains qui l’ont indélébilement marqué lorsqu’il était le batteur puis
l’arrangeur du trompettiste Todd Simon et
de son Ensemble Ethio-Cali. En effet,
les ambiances « éthiopiques » inspirées du maître Mulatu Astatké transparaissent à
travers des titres comme Lalibela, Sidet Eskermeche (où est convié le
chanteur Yared Teshale) ainsi que Saba, tout trois étant habités par les
entrelacs psychédéliques déployés par les guitares et les cuivres éthio-jazz.
Mais Wondem, qui
se traduit par « frère » en amharique, ne se résume pas qu’à une
incursion dans l’Addis Abeba des années 70, le joyeux A New Day par exemple nous immerge dans la pop moderne du sud de l’Ethiopie tandis que Be My Habesha nous invite au Nord du Mali, où les alchimistes de
Tinariwen ont imaginé la musique assouf,
un habile mélange de musique touareg, de
rock et de blues.
Changamuka ensuite,
et la voix soul racée de Godfrey at
Large alias Dustin Warren nous plonge
dans une Afrique éprise du son sophistiqué de la Motown, alors de Miguel Atwood–Ferguson et Mark de Clive Lowe arrangent et
interprètent la mélodie arabisante
et presque kitch de Mowa, un hommage
au chanteur/joueur de oud soudanais Mohammed Wardi. Le Soudan est toujours à
l’honneur dans le coloré Without An
Adress sublimement interprété par la chanteuse retro pop originaire de Khartoum Alsarah.
Merkato Star et
ses rythmes tournoyants et intenses nous hypnotisent à la manière d’une transe
soufie, alors que l’orchestration de la pièce instrumentale Xamar renoue avec la vision
est-africaine du jazz-funk des 70’s,
atmosphère déjà présente dans Changamuka
mais qui semble être ici passée au crible d’un Fela Kuti apaisé.
Dans Eastern Prayer,
les vocalises suaves et vaporeuses de Nia
Andrews sont accompagnées d’une instrumentation délicate où chœurs aériens
où steel drums de trinidad, congas afro-cubaines et kalimbas ouest-africaines
s’unissent pour accueillir une guitare au touché afro-caribéen.
Pour clore Wondem,
Dexter Story nous offre le
romantique et spirituel Yene Konjo
dans lequel sa voix profonde, douce et veloutée est mise en valeur par les
claviers de l’expert Mark de Clive-Lowe
dont la présence inonde l’ensemble de l’album.
Encore un succès en perspective pour le label anglais Soundway Records de Miles Cleret qui publiait, il y a peu, l’excellent
projet Ibibio Sound Machine.
Francesco
Bearzatti & Tinissima 4tet - This Machine Kills Fascists (CAM Jazz/Harmonia
Mundi)
Dans la continuité de ses biographies musicales dédiées en
2008 à la militante révolutionnaire Tina Modotti (actrice, mannequin et photographe
italienne du début du XX° siècle), en 2010 à l’icône afro-américaine Malcolm X
puis en 2013 au pianiste génial Thelonious Monk (dans un projet fusionnant la
musique de Monk aux standards du rock), le saxophoniste jazz Francesco Bearzatti nous présente
aujourd’hui This Machine Kills Fascists,
un hommage au chanteur guitariste américain Woody Guthrie, musicien de country et activiste intellectuel dont
la pensée influença la folk des protest songs dans les 60’s.
Accompagné de l’excellent trompettiste Giovanni Falzone, du bassiste Danilo
Gallo et du batteur Zeno De Rossi,
Franceso forme le Tinissima 4tet et invite sur un titre
dédié aux anarchistes Sacco And Vanzetti
(tous deux condamnés en 1927 à la chaise électrique par la justice américaine) la
chanteuse Petra Magoni qui vocalise
telle une chanteuse d’opéra une mélodie à glacer le sang. L’artiste originaire
de Pordenone dans la région du Frioul-Vénétie Julienne a composé 10 des 11
morceaux de l’album, This Land Is Your
Land étant un classique de Woody Guthrie
écrit en 1940.
Le Tinissima 4tet
déploie un jazz au swing tantôt langoureux
et mélancolique (Okemah - ville
natale de Guthrie dans l’Oklahoma, When U Left), tantôt effréné et déluré (Hobo Rag, Witch Hunt) se heurtant ici et là aux sonorités cuivrées de la Nouvelle Orléans (This Land Is Your Land) ainsi qu’à celles de la country mexicaine (Long Train Running).
Kenny
Wheeler & John Taylor – On The Way To Two (CAM Jazz/Harmonia Mundi)
Tous deux disparus il y a peu, le pianiste anglais John Taylor et le trompettiste canadien
Kenny Wheeler se retrouvent dans un
enregistrement inédit de 2005, capté au Bauer Studios en Allemagne. Le label Italien
CAM jazz a eu la bonne idée de
publier leur renversant On The Way To
Two où la complicité des deux partenaires de longue date se dévoile avec
une élégance et une sensibilité rare. C’est d’outre tombe que le pianiste nous adressait
en septembre dernier, soit 2 mois après sa disparition sur scène lors du
festival Saveurs Jazz près d’Angers, son disque posthume 2081, malgré la son trépas soudain, il a eu l’occasion de rendre un
dernier hommage à son ami Kenny (décédé
en septembre 2014) dans une note touchante figurant en préface du livret de leur
album. Les deux géants du jazz moderne
européen, qui formaient le célèbre Azimuth
avec la chanteuse Norma Winston, y élaborent
une musique acoustique sophistiquée, alliant une force mélodique captivante à
une virtuosité soupesée. Composé de 9 compositions originales et d’une reprise
de Billy Strayhorn A Flower Is A Lovesome
Thing, On The Way To Two est une
aire de jeux dans laquelle naît une conversation animée, où les instruments sont
poussés dans leurs retranchements sans jamais se brusquer ou se contredire. Des
thèmes complexes (Canter #2, Fedora ou Close To Mars) alternent avec de courts passages improvisés (Sketch No.1, Sketch No.2, Sketch No.3),
imposant sans lyrisme démonstratif ni épreuve de force, une musicalité fluide
et naturelle.
Sharon Jones & The Dap-Kings - It’s a
Holiday Soul Party (Daptone records/Differ-Ant)
La grande prêtresse Sharon
Jones, pilier de l’écurie Daptone Records, nous offre en avance son brûlant cadeau de noël, It’s a Holiday Soul Party. Entourée de
son mythique crew The Dap-Kings et de ses choristes Saun & Starr, la
chanteuse élevée dans la tradition du gospel
nous invite à retrouver ces sonorités retro-soul explosives et funky qui sont désormais la marque de fabrique du
label de Brooklyn mené d'une main de maître par son boss, Gabriel Roth. Composé de 11 titres, ce Christmas album alterne, avec une énergie débordante et contagieuse,
compositions originales (8 Days (Of
Hanukkah), Funky Little Drummer Boy) et reprises de chants traditionnels (Silent Night, White Christmas).
Ludovico Einaudi – Elements (Ponderosa/Harmonia Mundi)
Le désormais illustre compositeur italien Ludovico Einaudi nous revient avec son
13° album studio baptisé Elements, où
il déploie son lyrisme romantique à l’italienne que le grand public découvrait en
2011 dans le film d’Eric Toledano Les Intouchables. En effet le pianiste turinois séduit grâce à de subtiles orchestrations de cordes enrichies d’un
soupçon de percussions et de matières électroniques, il élabore d’enivrantes
mélodies avec à l’esprit le souci d’émouvoir son auditoire en réconciliant de
fait les univers aussi distincts que ceux de Bach, Satie, Reich, Eno, Pink
Floyd, Radiohead ou des Beattles.
Cet opus s’appuie sur une étude des 4 éléments de la nature (eau, terre, vent, feu), de la géométrie euclidienne (droite, plan,
longueur, aire) et de l’œuvre du peintre théoricien Vassily Kandinsky (qui réalisa la première peinture abstraite où
formes et couleurs se libéraient de la figuration et de la représentation du réel).
Ludovico s’attèle au projet depuis 2012,
année durant laquelle il se produisit à Rome avec une pièce dédiée à son mentor
Luciano Berio intitulée The Elements. Cherchant toujours à
renouveler sa palette (sans pour autant vouloir prendre des risques et faire le
grand écart), il s’est attelé à réexaminer des notions qu’il n’avait plus
abordé depuis ses études, mais loin de nous adresser une musique indigeste et
complexe, l’alchimiste accouche d’un disque
à la beauté saisissante et immédiate, où les moments suspendus et
mélancoliques succèdent aux passages plus tendus et rythmés. A la manière d’une
BO de film bien pensée, Elements nous
tient en haleine durant plus de 60 minutes nous narrant une épopée aux contours
flous et variables que chacun interprète selon son humeur, son ressenti et son
expérience de la vie.
Entouré de musiciens d’exception parmi lesquels figurent l’excellent
violoncelliste Redi Hasa, l’ensemble
de cordes bataves du Amsterdam
Sinfonietta et le percussionniste brésilien Mauro Refosco, l’artiste nous immerge à travers ses 12 titres dans
son monde singulier, à la fois foisonnant et épuré, sobre et baroque, enjoué et
mélancolique, acoustique et électronique, mais assurément trop convenu ! Dommage.
Roland
Tchakounté – Nguémé & Smiling Blues (Tupelo Records/Harmonia Mundi)
Le bluesman camerounais Roland
Tchakouté nous présente son 6° opus intitulé Nguémé & Smiling Blues, poursuivant ainsi, dans sa langue
maternelle le bamikélé, son cheminement à travers les méandres de la musique du diable qui lui fut révélée
jadis par les enregistrements du maître en la matière, John Lee Hooker. Sa voix éraillée exprime, comme ses aînés
américains, les épreuves (qui se traduit par nguémé en pidgin camerounais) que doivent traverser ceux qui
souffrent et ses compositions sont marquées du sceau de ce blues électrique de Chicago, dont les sonorités puissantes et
vigoureuses ont été immortalisées par les légendes Muddy Waters ou Buddy Guy.
Roland a
rassemblé autour de lui une pléiade de pointures, on remarque notamment le
guitariste Mick Ravassat qui détonnait
déjà dans son précédent Blues Menessen
et le claviériste Damien Cornelis, membre
du désormais mythique combo soul/funk Malted
Milk.
Les 13 titres de l’album explorent dans la lignée de Taj Mahal, une large palette de
sentiments allant de la tristesse (Melena,
Misery) à la joie de vivre (Nju Bwoh Man, Tchuite Blues Noum Seou) en passant par la célébration de l’Afrique
des héros Nelson Mandela ou Kwame Nkrumah (Chubata
Africa). Nguémé & Smiling Blues
rapproche les peuples du blues, raccommodant les deux rives d’un océan aux
contours incertains.
La voix fragile et délicate du chanteur-guitariste et
philosophe bahianais Tigana Santana nous
dévoile avec poésie et profondeur sa vision d’un Brésil encré dans ses racines
africaines. Son troisième opus intitulé Tempo
& Magma est un diptyque (Interior
et Anterior) composé de 14 titres touchants et inspirés où
convergent avec subtilité les folklores du Sénégal et de sa terre natale
Salvador de Bahia. Malgré sa jeunesse, l’artiste s’exprime avec la sagesse folk un brin mystique des vieux
routards, on le compare d’ailleurs au regretté Terry Callier avec son timbre grave, doux et suspendu. Imprégné par
le Candomblé, religion vouant un
culte aux orixas et se basant sur la croyance en l’existence d’une âme propre à
la Nature, Tigana déploie une
musique spirituelle, éthérée et essentielle où les rythmes fondateurs de l’Afrique
interprétés par des musiciens sénégalais, maliens et guinéens sont enrichis avec
élégance de ses arpèges de guitare entêtants et de son chant ensorceleur.
Véritable chantre de la culture afro-brésilienne à l’image de l’immense
percussionniste Nana Vasconcelos, notre
griot a choisi dans ce projet d’incarner le Brésil à travers deux personnalités
importantes, la chanteuse de Sao Polo Céu
(que l’on peut entendre dans Nza (The
Universe Created Itself) et There
IsA Balm Gilead /Luzingu) et la prêtresse
du Candomblé Mae Stella Oxossi, dont
l’aura et la pensée habitent Tempo &
Magma tout entier.
Quantic presents The Western Transient - Nordeste (single) (Tru Thoughts Records)
L'excellent Will Holland alias Quantic, fer de lance du désormais mythique label de Brighton Tru Thoughts nous offre une nouvelle pépite extraite de son dernier A New Constellation, un album de jazz instrumentalmâtiné de soul et de funk, qu'il a enregistré à Los Angeles avec son projet The Western Transient. Faisant suite au premier single Creation (East LA), Nordeste nous plonge dans les sonorités issues des traditions musicales brésiliennes de l'état de Pernambouc, où percussions et cuivres sont rejoints par des guitares et des synthés au grain vintage, nous servant un latin jazz du plus bel effet.
Le titre est accompagné de son remix afro-deep-house orchestré par le producteur mexicain David Montoya et d'une version alternative de Lattitude, aux accents jazz classiques et envoutants, spécialement interprétée pour une célèbre station radio de LA.
Le trompettiste hyper-productif Ibrahim Maalouf, qui nous offrait il y a peu ses deux derniers Kalthoum et Red & BlackLight nous invite à présent à redécouvrir une des divas orientales des plus emblématiques de ces dernières années, l'anglo-égyptienne Natacha Atlas. Bien loin des clichés orientalistes que la chanteuse a nourri pendant des années, le duo nous propose avec son sublime Myriad Road un album de jazz délicieusement teinté de reflets orientaux délicats et authentiques. Plus de la moitié de l'opus est interprétée en anglais, mais l'ensemble des 10 titres est pourtant habité de ces ondulations lascives et enivrantes propres au chant maqam, les envolées vocales de Natacha sont parfois reprises par la trompette micro-tonale d'Ibrahim dans un concert de swing élégant, métisse et entêtant.
On reconnait bien sûr l'écriture du musicien libanais, sa patte si sensuelle et inspirée est ici mise au service de la voix étonnante et puissante de l'ancienne égérie d'une scène electro/pop orientale qui ne lui permît finalement jamais de s'épanouir artistiquement. Le trompettiste a réuni pour l'occasion un quintet jazz pensé autour du batteur niçois André Ceccarelli et a convié des guests d'exception telles que le violoncelliste Vincent Ségal (Bumcello) et le tromboniste Robinson Khoury (Uptake).
Myriad Road est donc une renaissance, l'affirmation que Natacha Atlas est une artiste libre désormais extirpée du carcan dans lequel elle s'était enfermée depuis le début des années 90 avec l'ethno techno du fameux Transglobal Underground oule trip-hop du producteur Nitin Sawhney, pionnier de la scène underground asiatique.
Django Reinhardt, Stéphane Grappelli - L'Intégrale du Quintette à cordes du Hot Club de France (Label Ouest/L'Autre Distribution)
Dans une France de l'entre guerre, le guitariste Django Reinhardt et le violoniste Stéphane Grappelli fondent le Quintette du Hot Jazz de France, une formation composée de trois guitares, un violon et une contrebasse mêlant le jazz à la musique manouche. Remportant un succès populaire immédiat, le groupe se produit dans toute l'Europe croisant alors la fine fleur du jazz américain, comme le saxophoniste Coleman Hawkins ou le trompettiste Benny Carter.
L'Intégrale du Quintette à cordes du Hot Club de France rassemble pour la première fois l'ensemble de l'œuvre-phare des deux pionniers européens dans un coffret de 8 volumes répartis en 3 périodes: Les Débuts entre 1934 et 1935, L'Âge D'Or entre 1936 et 1939 et enfin L'Après-Guerre entre 1946 et 1948.
Parmi les 155 enregistrements entièrement remasterisés, on retient forcément les interprétations magistrales de Minor Swing (1937), Nuages (1946) ou Coquette (1946) qui malgré les années n'ont rien perdu de leur superbe.
A noter que l'initiative a été chaleureusement accueillie par les dignes héritiers de ces deux mastodontes du jazz manouche, Biréli Lagrène, Thomas Dutronc ou Didier Lockwood figurent déjà parmi les fans du projet.