Abd Al Malik est l'artiste de tous les paradoxes.
Accumulant depuis plusieurs années un palmarès de récompenses assez
impressionnant, le poète est "lyricalement un stremon" aussi
bien capable de citer dans la même phrase Balavoine, Opération Dragon,
AmyWinehouse et Albert Camus que d'écrire et réaliser son
propre film, ou bien d'admirer Brel, Darc, Téléphone et Radiohead
tout en rêvant en secret de bosser en studio avec Quincy Jones et
l'équipe de Thriller du King Of Pop Michael Jackson.
Originaire de Strasbourg, le rappeur éclectique fan de Malcolm
X, Gil Scott Heron et The Last Poets dépoussière et rafraîchit l'image d'un hip-hop français souvent
sclérosé et décérébré, en y injectant avec son slam fracassant des textes
sophistiqués, parfois engagés et toujours raffinés.
Le premier effort solo nommé Le Face à Face des Coeurs,
sort en mars 2004, il est alors considéré comme un élan d'amour face la
haine...
Gibraltar, second opus, paru en 2006 assoit
véritablement l'artiste dans le paysage musical hexagonale, son rap
riche et son "flow de dingue" le projettent même en tête
des charts notamment grâce au titre éponyme. Il marque aussi la rencontre d'Abd
Al Malik avec le compositeur et pianiste de Jacques Brel, Gérard
Jouannest, et de son épouse Juliette Greco, icône de la chanson
française (qui croisa la route de Gainsbourg, Miles Davis ou Brassens)
devenue complice de l'héritier des pionniers du rap US "old
school" Big Daddy Kane et Rakim.
Après l'écriture et la réalisation de son premier long
métrage autobiographique intitulé Qu'Allah Bénisse la France (diffusé
en salle en 2014), au cours duquel il fait la connaissance du producteur/DJ
français Laurent Garnier,il publie son cinquième
album baptisé Scarifications... 5 ans qu'il se faisait attendre,
depuis Château Rouge en 2010 enregistré avec Chilly Gonzales...
Et forcément il devait être à la hauteur!
La complicité liant le pâpe de la techno françaiseau rappeur est
d'emblée frappante, avec Bilal (frère et partenaire de studio
du slameur philosophe), ils forment un combo incisif et redoutable. Les
ambiances de Scarifications sont parfois sombres et pesantes voire
inquiétantes, l'artiste y fait son introspection et nous raconte son adolescence
de dealer et de voleur à la tir, marquée au fer rouge par la violence de
son quartier de Neuhof et la mort de ses amis victimes
d'overdose. Ce disque très personnel est la confidence urgente, rageuse et
fascinante d'un homme conscient de ses failles; mais renforcé par ses
erreurs il se dresse fièrement dans "ce monde qui est une
tombe". Le slam d'Abd Al Malik y laisse sa peau au profit d'un rap
underground pressant et tranchant.
Les pulsations digitales de Garnier plongent l'auditeur dans
l'obscurité, ses nappes de synthés et de drone glaçants et ses
rythmiquesdubstep l'enveloppent mais ne l'étreignent pas.
Ces instrus fracturées sont aux antipodes des productions électro
pop mainstream positives et superficielles, les beats y sont lourds et
assommants autant que les mots qui écorchent et atteignent leur
cible en pleine tête. Les quartiers chauds de Strasbourg battent aux rythmes de la techno de Détroit, un accord osé qui fonctionne mais qui intrigue!
Paroles et Musiques : Abd Al Malik – Bilal – Laurent Garnier
PAROLES :
C’est soit le deal soit c’est l’usine Grandir dans un monde ou l’altérité est assassine Diplômé de la rue une autre vie estudiantine La même couleur mais pas le destin de Lamartine Si on s’arrête un instant que nous enseigne-t-on On s’en sort si on le veut vraiment J’ai poussé ma réflexion le soleil était absent Je me suis fait pluie en attendant Mais tout prend l’eau trop de mecs nous bassinnent C’est comme dans Matrix le règne des machines Du rap ne subsiste que le bacchique La mort de Pavlos Fyssas est-elle un hic Mais rien n’est illogique de la crise naissent tous les fascismes Classique l’Histoire ne se répète pas mais rime Abîme toujours les mêmes drôles de mise en abîme Effets miroirs toutes les vies comestibles Ghettos Ter Ter et guerres intestines Je suis né dans le pays de la guillotine Muslim et Noir de peau qu’est-ce qui me détermine Qu’est-ce qui se joue dans ma poitrine Mon cœur cesse de battre parfois c’est la routine Est-ce donc ça qui discrimine Je n’entérine aucune nouvelle doctrine Ne suis-je pas un enfant de la république Hun Hun de la République Lyricalement j’suis un stremon J’suis un stremon…
Michael
Felberbaum – Lego (Fresh Sound New Talent/Socadisc)
Le guitariste italo-américain Michael Felberbaum nous présente son cinquième opusjazz baptisé Lego. Entouré du pianiste Pierre
de Bethmann, du bassiste Simon
Tailleu et du batteur Karl Jannuska,
il nous invite à pénétrer son puzzle sonore
sophistiqué qui, pièces après pièces, dévoile une identité musicale complexe
au lyrisme économe mais hypnotique voire
psychédélique. S'il fallait décrire son jeu, il faudrait alors le
confronter à celui des deux maîtres de la guitare jazz moderne, Jim Hall d'un côté et John Scofield de l'autre. Deux techniques
aux sonorités opposées, l'une est sensuelle, délicate et fluide, l'autre plus
rugueuse et bluesy. Malgré cette dualité et une élaboration savante de ses 9 compositions faites de motifs rythmiques et
mélodiques qui s'entrelacent et se superposent, Michael a su insuffler des nuances rassurantes et captivantes de groove (Variations), de bossa nova
(Now), de blues et de rock (Mint) voire
même quelques reflets andalous, dans
sa ballade poignante Nostalgia.
Magnifique célébration d'un pianiste surdoué que ce tendre Remember Petrucciani. Philippe, guitariste et compositeur
tombé tout jeune dans la marmite du jazz
avec ses frangins Michel et Louis (contrebassiste), revisite le
répertoire de son frère disparu à New York voilà plus de 15 ans, accompagné de
la chanteuse Nathalie Blanc, une
habituée de la famille. Cette dernière a écrit des paroles pour 12 titres
initialement instrumentaux, qu'elle interprète avec élégance et maîtrise sur les arrangements
soignés et soyeux du guitariste au swing
subtile des plus classieux. L'album nous invite à redécouvrir des thèmes
emblématiques du pianiste de génie parés d'une voix envoutante, de textes
personnels et d'orchestrations intimistes. Renforcés par une excellente section
de cuivres (Bosso, Cantini et Castellani), les fidèles acolytes Dominique Di Piazza à la basse (remplacé à la contrebasse par Michel Zenino) et Manhu Roche à la batterie sont eux aussi embarqués dans l'aventure menée
humblement par un Philippe Petrucciani
fin mélodiste et rythmicien aguerri.
Juste un petit tour du côté des dernières actualités musicales abordées dans mon blog Les Chroniques de Hiko... Olivier Bogé, Claptone, Thierry Maillard, Anne Carleton, Fred Pallem & Le Sare du Tympan, Madlib, Oxmo Puccino, Jonathan Orland & Nicola Cruz.
Il y a des disques qui mettent l’eau à la bouche avant même
de les avoir joué, The Kingdom of Arwen,
dernier opus du pianiste Thierry
Maillard, en fait partie avec son casting bluffant parmi lequel se dégagent
quelques invités prestigieux aux couleurs musicales singulières : le
guitariste Nguyên Lê, le
percussionniste Minino Garay ou le
joueur de doudouk Didier Malherbe.
Mais loin d’être arrivés au bout de nos surprises, lorsque Hiéroglyphes s’ouvre avec la cacophonie
du Prague Concert Philharmonic qui
s’échauffe, on entrevoit alors le projet chers au compositeur de rassembler dans
12 pièces épiques au lyrisme grandiloquent, un trio jazz et un orchestre
symphonique. Certes le concept n’est pas nouveau, mais la particularité de
ce dernier est d’y avoir adjoint une section
d’instruments ethniques. Entouré de Dominique
Di Piazza à la basse et de Yoann
Schmidt à la batterie, l’arrangeur n’en n’est pas à son coup d’essai
puisque l’an dernier il publiait The
Alchemist, enregistré avec un Orchestre de Chambre et des musiciens appartenant
à la sphère world music.
En toute logique l’étape suivante devait êtreson Kingdom
of Arwen et qui d’autre que Jan
Kucera aurait été plus à même de diriger l’orchestre ?
Ainsi jazz, musique
classique et musique du monde s’entremêlent avec maestria dans une épopée
fascinante dont les références sont aussi bien puisées chez Tolkien ou Franck Zappa (Zappa) que
dans l’Antiquité grecque (The Legend of Sparta’s King) égyptienne (Sphynx Part.1 et Part.2) ou le folklore
scandinave (Le Monde des Elfes).
Flûte chinoise, arménienne (doudouk) et irlandaise (whistle
par Neil Gerstenberg), luth grec
(baglama par Taylan Arikan)
percussions, violoncelle (par Olivia Gay)
et guitare électrique… Un ensemble qu’il faut accorder avec la rigueur d’un
orchestre symphonique et la créativité d’une formation de jazz. Il s’avère que
malgré tout ce petit monde à s’occuper, il manquait à Thierry un instrument plus organique, la voix céleste de Marta Klouckova s’imposa alors à lui dans
Sphinx Part.1, qui nous emmène en
Orient ou en terre Celte, difficile d’y accoler une étiquette.
Fred Pallem & Le Sacre du Tympan – François de Roubaix
(Train Fantôme/L'Autre Distribution)
Déjà salué mainte fois et notamment dans l’excellente
compilation Cinemix Vol.1 paru en
2003 et qui rassemblait une série de reworks de célèbres titres extraits de BOF
françaises des années 70 , le répertoire du compositeur de musique de film François de Roubaix ne cesse de
faire des émules, on se souvient entre autres du remix des cultissimes Dernier Domicile Connu ou La Mer est Grande que nous offraient respectivement
Gonzales et Carl Craig, c’est aujourd’hui au tour du bassiste Fred Pallem de rendre hommage à l’emblématique
compositeur disparu tragiquement en 1975 à l’âge de 36 ans.
Entouré de sa fameuse formation Le Sacre du Tympan, qu’il crée en 1998 sur les bancs du
Conservatoire Supérieur de Musique de Paris, sa démarche artistique est de fusionner les musiques dites "populaires"
(pop, rock) et celles considérées comme "savantes" (jazz, musique contemporaine).
Dans son premier projet intitulé Le
Sacre du tympan sorti en 2003, Fred
Pallem croisait les influences des jazzmen Charles Mingus et Duke Ellington
à celles du chansonnier Georges Brassens, du groupe rock anglais The Shadows,
du compositeur américain Charles Ives et de l'italien Nino Rota. Ce mélange de sonorités et de références et
cette volonté de convoquer des images
allaient façonner l'identité musicale décapante du big band décalé et énergique,
qui s'attaque aujourd'hui à un monument parmi les compositeurs du 7° art.
L'aspect cinématographique ayant toujours été une dominante chez Fred, son précédent Soundtrax en est la preuve, relire l'œuvre
d'un pionnier de l'électro et du home studio comme François de Roubaix est pour lui une aubaine et l'occasion de déballer
ses vieux synthés vintages et autres instruments plugged.
Pour fêter l'anniversaire de sa disparition en mer voilà 40
ans, le Sacre du Tympan s'attèle, avec
un penchant électronique, à revisiter ses thèmes les plus parlants comme celui
du chef d'œuvre de Serge KorberL'Homme Orchestre ou des génériques de
l'émission d'Elizabeth Tessier Astralement
Vôtre et de la série policière Commissaire
Moulin.
Si Un Tank Pour
l'Aventure est traité comme un standard de jazz,L'Altelier l'estcomme un tube psyché rock
et Je Saurais Te Retenir une ballade aux reflets folk sublimée par
les voix d'Alexandre Chatelard et Alice Lewis (habituée du Sacre).
Dans le très beau Boulevard
du Rhum, titre d'un film de 1971 joué par Lino Ventura et BB, Fred a convié une autre chanteuse, elle
aussi singulière dans le paysage de la nouvelle chanson française, Barbara Carlotti, qui interprétait en
2012 Mon Dieu, Mon Amour avec un
autre invité de marque, le fantaisiste et génial Philippe Katerine qui intervient ici dans Chapi Chapo, un air semblant lui être prédestiné, qui était le
générique de la série d'animation culte de la deuxième chaîne de l'ORTF. Juliette Paquereau (elle aussi
régulière du Sacre), de Diving With Andy
groupe pop anglophone, apparaît quant à elle dans le très aquatique Ariadne Thread.
Bref, un casting pointu particulièrement bien fourni comme
d'habitude, on se souvient du plateau de guests dans La Grande Ouverture avec Sébastien Tellier, Piers Facini, Matthieu
Chedid ou Sansévérino. Mais que serait le Sacre
sans son ossature, composée du batteur Vincent
Taeger, du saxophoniste Remi Sciuto,
des claviéristes Vincent Taurelle et
Arnaud Roulin ?
Le Sacre du Tympan
parvient une fois de plus à souligner les mélodies intemporelles, fortement
marquées par l'esprit clairvoyant et innovant de compositeurs hors normes, ainsi
François de Roubaix revient d'outre-tombe
grâce à l'inventivité et aux arrangements d'un musicien décomplexé.
Le multi-instrumentiste français Olivier Bogé nous offre son troisième opus baptisé Expanded Places. Pianiste converti au
saxophone depuis la fin de son adolescence, il affiche un certain nombre de collaborations
prestigieuses avec des acteurs majeurs de la scène jazz contemporaine dont la
dernière en date avec l’arménien Tigran
Hamasyan dans The World Begins Today.
Nous livrant un jazz
cinématique très aérien et aéré, le musicien trentenaire a pris soin de
composer 9 titres aux reflets
impressionnistes qui malgré leurs ambiances respectives se complètent et s’harmonisent.
Accompagné de Nicolas Moreaux à la contrebasse
et de Karl Jannuska à la batterie, il
forme un trio équilibré et vigoureux aussi bien à l’aise dans des variations rythmées au lyrisme puissant
(Beyond The Valley Of Fears) que dans
des flâneries au tempo lent et aux
mélodies plus intimistes parfois baignées d’une douce mélancolie (What People Say). La formation est enrichie
des participations discrètes mais essentielles de Guillaume
Bégni au cor et de Manon Ponsot
au violoncelle.
Olivier y a
enregistré toutes les parties de saxophone, mais aussi de piano, de fender
rhodes et de guitare (remarquable dans le radieux The Fairy & The Beard Man), il se mue même parfois en choriste
comme dans l’ouverture Red Petals
Disorder, morceau qui annonce d’emblée la teneur de l’album, mêlant au jazz les sonorités envoutantes et
métalliques de la folk et les combinaisons orchestrales et majestueuses de la
musique classique (je pense à certains travaux de Keith Jarrett ou de Brad
Mehldau).
A l’image des noms qu’il a donnés à ses pistes, l’artiste
nous invite à un voyage hors du temps,
le long d’une route où défilent de vastes panoramas à la beauté touchante et
hypnotique. Expanded Places s’immisce
alors dans nos esprits à la manière de la bande originale d’un film imaginaire,
dont sa mise en scène serait déterminée par l’auditeur.
Déjà repéré depuis un certain temps grâce à ses excellentes productions,
il s’est récemment fait remarquer grâce à ses remixes bodybuildés (je pense notamment à sa version punchy du
succès Liquid Spirit du jazzman Grégory Porter ou bien de sa
réappropriation d’Omen des frangins Disclosure) destinés aux dancefloors
exigeants, férus de beats down tempo bien
produits. Désormais partie
intégrante du paysage électronique mainstream, l’allemand Claptone s’essaye au long format avec
son premier opus paru chez Différent Recordings
et distribué par Pias, Charmer. Composé de 13 titres où sont invitées
quelques unes des pointures du rock indépendant Nathan Nicholson (UK), Peter
Bjorn & John (Suède)et Clap Your Hands Say Yeah (USA), de
l’électro Jay Jay Johanson (Suède)et Jaw (FR) ou de la pop Young
Galaxy (Canada), le Dj producteur nous offre même une collaboration de haut
vol avec le dandy pop finlandais Jimi
Tenor sur un titre efficace, sensuel et funky intitulé Party Girl.
L’animal Claptone
se laisse difficilement apprivoiser, en effet il se dissimule derrière un
inquiétant masque en forme de bec de
vautour (que portaient les médecins bec durant les épidémies de peste
bubonique en France et qui inspira ensuite un personnage de la comedia dell’arte), emblématique du
carnaval de Venise. Ainsi grimé il se permet toutes les audaces devant ses
platines, distillant un son deep-house
orienté chill/pop, où la voix et le chant y occupent une place importante.
Certains regretteront peut être ses premières productions plus
underground comme Night On Fire qu’il
sortait en 2012 sur Exploited et Cream la même année sur Defected, cependant d’autres
apprécieront ses atmosphères estivales qui se rapprochent des sonorités de Feder, Milky Chance, The Avener
ou Robin Schulz, qui ont animées les
chaudes soirées de nos plages azuréennes l’été dernier.
Le titre phare de Charmer
est sans conteste No Eyes, qui n’est
d’ailleurs pas d’hier puisque la version maxi sortait en 2012, un hit en
puissance que l’on entendra résonner cet hiver en before, Jaw y déploie sa voix soul légèrement granuleuse injectant à
l’ouvrage un groove imparable.
Claptone a conçu
des mélodies catchy qui font mouche
dès la première écoute, bien que trop consensuel à mon goût, il nous délivre un
effort plutôt réussi.
Le jeune producteur franco-équatorien Nicola Cruz nous présente son premier opus Prender El Alma, sur ZZK
Records (label qui nous offrait il y a peu l’excellent projet La Yegros). Mêlant les sonorités
acoustiques des percussions
traditionnelles, des chants tribaux,
des flûtes indiennes et autres guitares andines à ses textures électroniques nappées de synthés
délicats et rythmées par un groove
organique down tempo des plus prenants, il rapproche de façon singulière la
richesse des influences indigènes
précolombiennes aux possibilités infinies de la production musicale numérique contemporaine assistée de ses séquenceurs,
boites à rythmes MPC et autres logiciels Ableton…
Né à Limoges mais installé à Quito, capitale de l’Equateur située
sur les flancs du volcan Guagua Pichincha, le petit protégé du prodige
américano-chilien Nicolas Jaara
voulu revenir à l’essence même de ses origines et rendre un hommage vibrant et
intimiste à la Nature et à ses ancêtres.
Percussionniste de
formation, il est depuis ses débuts marqué par « l’aspect mystique qu’offrent les percussions du monde
entier », il intègre alors la dimension du rituel à ses constructions
sonores. Orientant rapidement sa pratique vers l’électro, il étiquette son trip wolrd bass d’Andes Step ou d’Andes
Infused Electronica, un mouvement à
mi-chemin entre tradition et modernité qui fera sans doute des émules parmi
la scène électronique sud américaine florissante (Dj Raff du Chili, Siete
Catorce de Mexico…)
Avec ses échantillons
de sons analogiques prélevés avec soin, découpés puis mis en boucle, Nicola parvient à restituer sa vision
d’une culture mal connue et rarement sublimée par l’electronica. Nourri de cumbia
et autres folklores locaux voisins, il s’inspire des démarches artistiques du
méxicain Murcof (qui collaborait il y a quelques années avec Erik Truffaz sur le projet Rendez-vous), des anglais Matthew Herbert et Quantic (Will Holland a
d’ailleurs longtemps séjourné et travaillé en Colombie) ou de l’américain Philipp Glass (…) pour nous proposer un
voyage plus anthropologique que touristique. La voix des chanteuses Huaira (compagne du producteur) et Tanya Sanchez participe à nous immerger
dans cette exploration « des
mythologies ancestrales vues par le prisme du monde moderne »,
immersion amplifiée par les rythmiques répétitives hypnotiques et les efforts
particuliers à bâtir des structures instrumentales
sonnant « comme si un groupe était
en train de les jouer ».
Anne Carleton – So High (Quart de Lune/Rue Stendhal)
A la croisée de sonorités issues du jazz et de la musique classique, la chanteuse
et plasticienne Anne Carleton nous
livre un opus envoûtant et singulier intitulé So High.
Entre poésie, slam,
chanson et textures électroniques,
elle distille avec grâce et tendresse 12 plages délicates gorgées de fragilité,
de douceur et de beauté. Parmi ses subtiles compositions ainsi que celles de Jean-Philippe Viret (Le Temps, Confusion) et de Carine
Bonefoy (Why Are You Gone), on
remarque de sublimes reprises de succès pop,
comme l’éblouissant Norwegian Wood de
The Beatles et l’aérien Wild Is The Wind, immortalisé par Nina Simone.
Entourée de Laurent Guanzini
au piano, de Benoït Dunoyer de Segonzac
à la contrebasse, d’Eric Moulineuf
au design sonore et d’un quatuor à
cordes vibrant, Anne convie
quelques invités de cœur dont Ninon Valder
au bandonéon, ses deux filles Prune et
Ambre au chant, puis l’illustre philosophe Edgar Morin, qui mêle sa voix aux ambiances musicales cinématiques de l’album.
Elle déploie d’une voix
cristalline une onde radieuse éclairant des titres puissants et profonds, s’interrogeant
et interrogeant différentes personnes sur des thèmes universels tels que l’espoir,
la liberté, l’amour, l’enfance ou l’existence…
Jonathan Orland – Small Talk (PJU/Absilone/Socadisc)
Mêlant son esprit d’aventure inspiré par le jazz moderne aux sonorités d’Europe de l’Est et klezmer, le jeune saxophoniste alto Jonathan Orland publie son second opus
intitulé Small Talk. Entouré du
contrebassiste Yoni Zelnik, du
batteur Donald Kontomaou (fils de la
diva Elizabeth) et du guitariste prodige originaire de Salvador de Bahia Nelson Veras, il interprète avec éloquence,
exigence mélodique et qualité harmonique 12 titres, dont 8 compositions et 4
reprises.
Après son premier Homes,
enregistré en quintet à New York avec d’anciens collègues de promo du Berkelee College of Music où il a
étudié auprès de George Garzone et Joe Lovano, il organise régulièrement des
sessions avec Yoni puis Donald et de la rencontre avec Nelson naîtra peu à peu l’envie de
graver l’interaction et la complicité du quartet en studio d’enregistrement.
Comme l’indique le titre de l’album Small Talk qui se traduit par « conversation légère et
spontanée », la liberté est un des maître-mots du projet, chaque musicien exprime
sa créativité au travers de thèmes inspirés du répertoire traditionnel yiddish (Reysele de Mordechai
Gebirtig) et du folklore des balkans
(Be There). Cependant le swing et l’importance de l’improvisation
demeurent omniprésents, nous n’avons qu’à écouter Played Twice de Thelonious
Monk,For Heaven’s Sake immortalisé notamment par Chet Baker, ou bien Falling
Grace du bassiste Steve Swallow.
Jean-Pierre Como – Express Europa (L’âme Sœur/Absilone/Socadisc)
Le pianiste parisien Jean-Pierre
Como revient avec son 10° opus baptisé Express
Europa. Après Boléro, son
hommage aux musiques latines et méditerranéennes paru en 2013, le co-fondateur du
groupe jazz fusion Sixun a choisi de
redonner (comme à ses débuts avec l’album Padre
1989), une importance toute particulière au chant qui, depuis son enfance
passée dans un milieu familiale marqué par la culture italienne, habite son œuvre
et accompagne son processus créatif.
Toujours bien entouré, on retrouve près du jazzman ses
fidèles acolytes comme le saxophoniste Stefano
Di Battista, le guitariste Louis
Winsberg (également membre de Sixun)
et le batteur Stéphane Huchard, qui figuraient
déjà en 1995 dans le projet initial Express
Paris Roma, que l’artiste considère encore comme l’un des plus beaux
moments de sa carrière. Rejoint par le bassiste Jérôme Regard, le quintet est largement enrichi des voix exceptionnelles
de deux crooners, l’anglais Hugh Coltman
(The Hoax, Nouvelle Vague, China Moses ou encore Eric Legnini) de l’italien Walter Ricci (David Sauzay, Lucas
Santaniello).
Les deux premières plages StarsIn Daylight - part 1 et
part 2 introduisent les timbres vibrants
des chanteurs, ils nous offrent une ballade
jazzy aux reflets souldoux et
délicats, une splendide chanson survolée par les phrasés puissants et inspirés
du saxophoniste italien, habillée des accords acoustiques du guitariste marseillais
aux multiples facettes, ainsi que de le touché léger et toujours impeccable de l’immense
batteur niçois André Ceccarelli (ici
les deux batteurs sont présents !).
Si Hugh Coltman
est à l’origine des textes interprétés en anglais, c’est à Walter que l’on doit l’écriture des charmantes Raccontami et Mio Canto, s’alignant
avec le penchant naturelle de Jean
Pierre Como pour ses racines, une Italie tout autant sublimée dans Musica et Io Che Amo Solo Te, où l’inconditionnel de Sinatra, Bennett et
Fitzgerald y exprime toute sa sensualité et son romantisme.
Mandela Forever
vient raffermir le swing d’Express Europa avec son tempo soutenu, son
efficacité mélodique empruntée au So What
de Miles Davis et sa chaleur latine auSamba
de Uma Nota So d’Antonio Carlos
Jobim.
Le chanteur natif de Bristol nous offre ensuite You Are All et Turn And Turn, deux instants suspendus et intimistes où se
rencontrent esprit pop et magie jazz.Sa
voix de velours qu’il module avec brio et sensibilité inonde les compositions
de Jean Pierre d’une fragilité
touchante, la finesse des arrangements de Pierre
Bertrand (Raccontami, You Are All, Musica et Mio Canto) participent
bien sûr à rendre ces moments d’écoute uniques et inoubliables !
Louis Winsberg a
composé Silencio, aux accents
flamenco et Alba, aux saveurs
brésiliennes, deux titres où la guitare acoustique omniprésente ajoute une note
chaleureuse et conviviale, où chaque instrument trouve sa place entre
improvisation et mélodie accrocheuse.
Une citation de Jean Pierre
Como en personne résume assez bien Express
Europa, décrivant simplement l’ambition du disque :
« J’ai voulu un
projet musical ouvert, aux influences multiples. Ce qui me touche dans la pop music, dans la soul, c’est la voix. Je
pense à Stevie Wonder, à Peter Gabriel, à Caetano Veloso, à Sting, à Joni
Mitchell, à Ricky Lee Jones…»
David
Krakauer – The Big Picture (Label Bleu/L’Autre Distribution)
Le dernier projet mené par le clarinettiste David Krakauer nommé The Big Picture se propose de revisiter des thèmes de musiques de films
célèbres composés par les géants du genre, les mélodies immuables de Nicola Piovani (dans Life Is Beautiful), Randy Newman (dans Avalon)
ou Mel Brooks (dans The Producers), trônent ainsi aux côtés
de titres tout aussi emblématiques légués par Sidney Bechet (Si Tu Vois Ma
Mère du film Midnight In Paris
de Woody Allen, véritable idole pour
le musicien), Serguei Prokofiev (March From The Love Of Three Oranges) ou
encore Johnny Green (Body And Soul). Mêlant comme à son
habitude les sonorités de la musique
classique au jazz et au klezmer, l’artiste novateur explore l’identité
juive à travers le cinéma moderne américain.
Willkommen,
extrait du film Cabaret de Bob Fosse, ouvre The Big Picture et donne le ton, évoquant avec une légèreté
apparente et un swing communicatif
la montée du fascisme dans les années 30. David
aime jouer avec la charge émotionnelle que dégagent ces mélodies touchantes,
confrontant souvent l’horreur au comique (Keep
It Gay), le déracinement à l’espoir (The
Family)… Entouré d’un quintet efficace et réactif, il rend hommage aux
icônes juives américaines comme Barbara
Streisand dans People tiré de Funny Girl ou Roman Polansky avec Moving
From The Ghetto issu du cultissime The
Pianist.
A noter la participation dans l’excellent réarrangement de Si Tu Vois Ma Mère, de la contrebassiste
Nikki Parrott (Michel Legrand, Randy
Brecker, Clarke Terry…), de la guitariste Sheryl
Bailey (Richard Bona, Irene Cara…) et du Dj Keepalive.
Das Kapital - Kind Of Red (Label Bleu/L’Autre
Distribution)
A une époque où l’idée d’Union Européenne n’a jamais autant
été remise en question, le trio jazzDas Kapital nous offre un bel
exemple de cohabitation et de collaboration entre nationalités voisines. En
effet le saxophoniste allemand Daniel
Herdmann, le batteur français Edward
Perraud et le guitariste danois Hasse
Poulsen ont composé l’opus à part égal, 9 titres qui dégagent une énergie
communicatrice qui n’est pas uniquement puisée dans le jazz, mais largement enrichie de sonorités folk, rock et pop.
L’évènement déclencheur de ce troisième disque Kind Of Red est un concert de Wayne Shorter donné à Berlin fin 2012,
les musiciens se sont imprégnés de sa maîtrise du temps, de la clarté de son
jeu, de l’évidence de ses variations et de son art du dialogue. Et comme l’aura
de Miles Davis est à jamais accolée
à la sienne, il semblait logique au trio de faire un clin d’œil au Kind Of Bue du trompettiste…
Les mélodies sont
accrocheuses à l’instar de l’ouverture intitulée Webstern et écrite par le percussionniste nantais, les cordes
métalliques et les peux tendues aux timbres étouffés créent une atmosphère acoustique plutôt intimiste,
une ballade cependant animée par le lyrisme structuré du sax et l’envolée
rageuse de la guitare électrique.
Claudia’s Choice
nous plonge dans une ambiance bien différente, aquatique et légèrement
dissonante, d’une lenteur étourdissante…
Iris, après une
minute d’une ritournelle hypnotique, est porté par un thème de western interprété
par Hasse à grands renforts de
vibrato… Puis se termine en douceur sous le souffle apaisant de Daniel.
Ce dernier est d’ailleurs à l’origine du sombre Macht Nix, In Der Mitte Ist Noch Platz,
on y retrouve les impressions ressenties durant l’écoute de Claudia’s Choice, des accords de guitare
plaqués qui s’éternisent, parsemés de quelques coups de cymbales et de quelques
notes de sax ébauchant une mélodie brutale et saccadée.
Just Like That se
rapproche davantage d’un jazz plus rassurant et d’un swing plus balisé, sax et
guitare échangent autour d’une assise rythmique au tempo soutenu.
Pour sa deuxième composition Jenseits Von Gut Und Böse (titre d’un ouvrage de NietzschePar delà Le Bien et Le Mal : Prélude d’une Philosophie de l’Avenir),
Daniel Erdmann conçoit une longue
introduction rythmée par un tic tac abrutissant, puis laisse les accords folk
de la guitare prendre le relais, le saxophoniste entame alors une improvisation
de près de 2 minutes.
Hasse nous offre
ensuite son blues acoustique et dissonant How
Long, So Low, une plage musicale dépouillée mais expressive à l’image de l’étrange
ballade Nothing Will Ever Be Enough Again,
où le silence est d’or et la retenue de rigueur !
L’énergique Au fond
des yeux aux airs d’hymne pop/rock de l’époque Woodstock rompt le silence
et le calme apparent de King Of Red
avec son déploiement de couleurs criardes et saturées…
Bref, Das Kapital
accouche d’un disque barré, parfois fluide et parfois complexe, il repose sur
l’écoute et le partage des dessins mélodiques de ses trois protagonistes et sur
leurs intuitions à remplir les espaces de chaque morceau.
Souleance est un
projet électro piloté à 4 mains depuis 2006 par les producteurs français Fulgeance et Soulist. Orienté vers les sonorités
disco, soul, hip-hop et afro-latines, le duo nous offrait l’année passée son EP d’inspirationbrésilienne Jogar d’où était extrait l’excellent Mais Um au groove tropicaliste low-club.
En juillet 2015 était publié chez First Word Records le single Secoue,
annonçant la sortie de son dernier EP Tartare
composé de 6 compositions + 2 remixes. Le titre combinait les rythmes haïtiens du kompa et ses accents cuivrés à la puissance des loops etautres beats électroniques.
Cependant avec le second extrait Hustle, Souleance nous
éloigne des tropiques et nous plonge dans les profondeurs abyssales d’un disco instrumental moite et entrainant
façon 80’s, on y remarque en featuring Emile
Sacre alias Vect aux claviers et
vocoder.
Le titre éponyme est de la même trempe, efficace et racé
avec une ligne de basse hypnotique et redoutable. Le producteur breton Débruit, auteur du célèbre Nigeria What ?, s’en empare et nous
livre un remix « au couteau »
plutôt dark avec ses percussions afro et son synthé new wave.
Ratatouille est une
véritable bombe stroboscopique, mixant cuivres
synthétiques festifs et claviers
psychédéliques à la façon de Todd Terje dans It’s Album Time.
I Got It est sans
doute le morceau le plus sensuel de l’EP avec son kit de batterie au grain analogique, ses samples vocaux subjectifs
hérités d’Ohio Players et sa touche disco
house planante…
New York, ou la
perle de Tartare, nous rappelle le pur
son façonné par le mythique duo nu-disco
de Brooklyn, Metro Area, il est remixé
par l’allemand Uffe qui orchestre
une version piano house des plus
pertinentes, m’évoquant le récent disque electro
jazzThe Radicle de l’anglais Tim Deluxe.
Bref, Souleance
confirme sa dextérité en cuisine, après les amuse-bouches il ne lui reste plus
qu’à nous concocter un album aux petits oignons…
La diva Angie Stone,
une des figures emblématiques de la scène néo-soul
depuis 1999 et la parution de Black
Diamond, nous revient avec un septième opus intitulé Dream. Né sous l’impulsion du producteur Walter W. Millsap III (Mariah Carey, Jennifer Lopez, Alicia Keys ou
Brandy), le projet veut remettre en lumière la vie d’une artiste (aux 2 disques d’or et aux 3 nominations aux
Grammy Awards) hors paire et son lègue souvent déprécié au monde de la black music. Rappelons à ce sujet qu’à
la fin des années 70 elle comptait parmi les pionnières du hip-hop féminin avec son trio The Sequence et leurs titres old
school comme Funk You Up paru sur
le label de Sugar Hill Gang en 1979,
Monster Jam en 1980 ou Funky Sound (Tear The Roof Off) l’année
suivante.
Dream se compose
de 10 titres aux reflets soul sucrés et
délicats, la voix puissante et sensuelle d’Angie (qui baigna toute son enfance dans le gospel) est toujours aussi touchante et efficace, on en prend
conscience dès l’ouverture très orientée R&BDollar Bill, qui nous convie sur le
dancefloor en mode ondulations et petits pas langoureux.
Dave Hollister la
rejoint sur le brulant Begin Again dont
l’ambiance ouatée ne s’apprécie pleinement qu’en position horizontale (comme le
titre éponyme d’ailleurs), puis le rythme s’accélère avec Clothes Don’t Make a Man, révélant la facette rétro-soul de l’ex de D’Angelo
(un retour aux sources audible aussi dans l’énergique Quits). C’est justement de sa relation avec le chanteur qu’elle
traite dans la touchante ballade Forget
About Me, où comme dans Magnet, Think It Over ou 2 Bad Habits elle ré-explore les sonorités et le groove de ses
débuts, que Mahogany Soul en 2001 et
Stone Love en 2004 ont
indélébilement gravés dans l’histoire de la soul contemporaine.
Angie Stone,
auteur, interprète, productrice et actrice revient donc sur le devant de la
scène, plus apaisée et sereine que jamais ! Ses relations houleuses avec
sa fille Diamond se normalisent et son
fils Michael (dont D’Angelo est le père), décrit comme un
excellent rappeur, se promet à une belle carrière. Sa foi inébranlable et sa
force de caractère l’ont aidé à surmonter les épreuves de la vie, abimée par des
émissions de téléréalité, la
cinquantenaire pourrait être très prochainement le sujet d’un biopic produit
par Jamie Foxx !
Le rappeur parisien Espiiem
publie son premier opus solo intitulé Noblesse
Oblige. Repéré aux côtés des collectifs Cas de Conscience et The Hop,
il présentait en 2012 son EP L’Eté à
Paris, l’année d’après le mini-album Haute
Voltige - où l’on notait déjà un intérêt
tout particulier apporté aux instrumentations de ses titres, réalisées d’ailleurs
par les pointures Kaytranada (Canada),
Kings (GB) ou J-Louis (USA) - et enfin Cercle
Privé en 2014 (tiré à 500 exemplaires). C’est entouré des beatmakers
français Astronote, Aayhasis (tous deux partis à la
conquête des States) ou encore Chilea’s,
et des MCs K.E.N.T, Esso et Deen Burbigo de L’Entourage,
qu’il s’attaque aujourd’hui à son tout dernier projet. L’humble et ambitieux Espiiem, qui comme il le dit dans le titre
éponyme, « repousse ses limites et développe son art », demeure encore
tapis dans l’ombre mais s’assure lentement une solide réputation auprès de la
critique et des aficionados de la sphère hip-hop
underground hexagonale. Son flow, aussi bien véloce et tranchant que posé
et paisible, se déploie dans des atmosphères
caverneuses où ambiances planantes
et rythmiques lentes nous laissent apprécier des textes soignés, entre
introspection (Noblesse Oblige, Suprématie…), réflexions sur la vie (Sparring
Partner, Darling,…) et la société (Money, Deuxième Famille…).
Luca Nostro - Are You OK ? (Via Veneto
Jazz/Socadisc)
Le guitariste et compositeur romain Luca Nostro nous présente son dernier opus baptisé Are You OK ? Enregistré à New York
avec un quartet du cru composé de l’épatant Donny McCaslin au saxophone, du très classieux John Escreet au Fender Rhodes, de l’élégant Joe Sanders à la contrebasse et du pilier Tyshawn Sorey à la batterie, le disque est clairement orienté jazz contemporain, avec ses combinaisons complexes et répétitives,
ses changements brutaux d’humeurs, de
couleurs et de rythmiques, ses allées-retour entre phrasés incisifs et passages
plus fluides. L’improvisation et l’interaction entre les musiciens y jouent
un rôle prépondérant, faisant naître de
mélodies simples des entrelacs
sophistiqués à la manière de Steve
Coleman et des sonorités brulantes parfois
psychédéliques héritées de Franck
Zappa, artiste qui compte parmi ses influences majeures avec entre autres Steve Reich.