lundi 13 avril 2015

José James - Yesterday I Had The Blues : The Music Of Billie Holiday (Blue Note)


José James - Yesterday I Had The Blues : The Music Of Billie Holiday (Blue Note)

Le label Blue Note et son président, le producteur Don Was, nous présentent Yesterday I Had The Blues : The Music Of Billie Holiday, nouvel opus du jeune crooner originaire de Minneapolis, José James. A l’occasion du 100ième anniversaire de la diva disparue à New York en juillet 1959 à l’âge de 44 ans, le chanteur à la voix de baryton gorgée de soul a décidé de lui rendre hommage (comme l'a fait Cassandra Wilson) à travers un recueil de 9 reprises parmi lesquelles figurent les mythiques Tenderly, Good Morning Heartache et Body And Soul.

Entouré de musiciens d’exception comme le pianiste Jason Moran, le bassiste John Patitucci et le batteur Eric Harland, José a choisi de s’attaquer à un exercice délicat et périlleux, celui d’interpréter les standards écrits ou immortalisés par la dame au camélia, dont la voix est un de ses premiers souvenirs musicaux.

Yesterday I Had The Blues : The Music Of Billie Holiday est un album de ballades touchantes et envoutantes que sa voix caresse tendrement. Quelques titres pourtant arborent un tempo plus soutenu comme What A Little Moonlight Can Do et son swing jouissif ou Fine And Mellow, Lover Man et God Bless The Child et leur shuffle enivrant.

Dans Strange Fruit, qui clôt le disque, José a opté pour un a cappella vibrant résonnant comme le chant d’une marche funèbre. C’est sans aucun doute le plus bel effort du projet, quelques loops construisent la chorale de ce gospel terrifiant tandis que sa voix s’élève et s’affirme avec force, conviction et gravité !

S’il a exploré différents univers lors de ses précédents albums, depuis The Dreamer paru chez Brownswood en 2008, jusqu’à son très personnel While You Were Sleeping en 2014 chez Blue Note, l’artiste au timbre chaud et sensuel revient à un jazz plus classieux, à un blues plus épuré et intimiste. Laissant un temps ses sonorités hip-hop, néo soul, R&B, folk et indie rock qu’il inocule habituellement à son répertoire jazzy, on le retrouve ici dans un projet plus conventionnel, parfois trop monotone et malheureusement sans relief…

Je reste cependant un grand fan !

vendredi 10 avril 2015

Cassandra Wilson - Coming Forth By Day (Legacy)


Cassandra Wilson - Coming Forth By Day

La diva imprévisible Cassandra Wilson publie chez Legacy, à l’occasion du centenaire de la naissance de l’icône du jazz vocal Billie Holiday, un recueil d’interprétations très personnelles de ses chansons les plus emblématiques. Coming Forth By Day rassemble en effet 12 reprises parmi lesquelles figurent les immenses Don’t Explain, All Of Me et Strange Fruit.

L’exercice n’a rien d’original, mais c’est la manière avec laquelle la chanteuse native de Jackson dans le Mississippi a approché l’œuvre de Lady Day qui fait de ce projet anticonformiste un disque remarquable, bien éloigné du pathos mimétique auquel d’autres nous ont habitués. Sa voix de contralto, son timbre profond et rauque apporte une dimension toute particulière à cette célébration audacieuse. Réactualisant des textes forts, elle laisse son égo de côté pour revenir à la source-même de leur inspiration.

Cassandra sort des sentiers balisés du jazz pur et nous emmène dans un hommage qui n’est pas un vulgaire plagiat ne voulant séduire que notre ouïe. Les standards deviennent méconnaissables, ils s’épaississent et s’emplissent d’obscurité, de mélancolie, notamment grâce à l’empreinte impétueuse et vibrante du producteur anglais Nick Launey (Nick Cave, Arcade Fire, Yeah Yeah Yeahs, …), aux textures psyché-rock des Bad Seeds (musiciens de Nick Cave), aux sonorités blues du guitariste/producteur T Bone Burnett (Diana Kall, Elton John, Bob Dylan…) et aux arrangements subtils pour cordes de Van Dicke Parks (U2, Ry Cooder…).

Avec ses ballades aux ambiances romantiques, orchestrales, tragiques, intimistes, nostalgiques ou parfois même angoissantes Coming Forth By Day, nous fait (re)découvrir presque 60 ans après sa disparition le répertoire de la sulfureuse dame au camélia, tantôt paré de nuances folk psychédéliques ou blues sensuelles, tantôt d’éclats pop symphoniques ou jazz cinématiques.

jeudi 9 avril 2015

Werkha – Dusk Feat. Bryony Jarman-Pinto (Tru Thoughts Records)


Werkha – Dusk Feat. Bryony Jarman-Pinto (Tru Thoughts Records)

Le jeune DJ/producteur basé à Manchester Werkha alias Tom A. Leah nous présente par l’entremise de son label Tru Thoughts le single Dusk Feat. Bryony Jarman-Pinto, extrait de son premier opus à paraître courant juin 2015 intitulé Colours Of A Red Brick Raft.

Son EP Beacons nous avait déjà largement conquis l’an passé, l’artiste y exposait alors son univers musicale fascinant et intimiste fait d’une soul électronique gorgée de fraîcheur et de groove organique.

Sur Dusk, nous retrouvons une vieille connaissance de l’artiste, la chanteuse Bryony Jarman-Pinto déjà présente sur l’excellent Sidesteppin’ de Beacons. Les influences de Flying Lotus, Bonobo et Quantic se devinent dans une production à la sensibilité cinématique où s’entremêlent accents jazzy, breakbeat et glitch. Des cordes subtiles ouvrent un titre résolument mélancolique et touchant !

Le deuxième morceau Falling Through The Wall nous immerge dans une ambiance bien plus chaude, les allusions exotiques d’une ritournelle de sitar annoncent la ligne de basse massive au groove communicatif d’une rythmique up-tempo presque deep house, renforcée par les traits minimalistes d’une guitare funky à la pédale wah wah.

Les versions instrumentales et a cappella de Dusk figurent aussi dans le package du single…
 
Ci-dessous Sidesteppin' extrait de son précédent EP et sélectionné par Gilles Peterson dans sa 10° édition de Brownswood Bubblers

Puis le single Dusk, toujours en live avec Bryony Jarman-Pinto
 
 
 
 
 

mercredi 8 avril 2015

Pucinella – L’empereur (Les Productions du Vendredi/L’autre Distribution)

Pucinella – L’empereur (Les Productions du Vendredi/L’autre Distribution)

Le jazz du quartet Pucinella est protéiforme, fruit d’un assemblage loufoque d’influences diverses, il se pare d’atouts jazz-rock aux reflets expérimentaux, flirtant ça et là avec le tango, le bal musette et les rythmes festifs des Balkans. L’Empereur est le 4° opus du groupe composé de Ferdinand Doumerc au saxophone, Florian Demonsant à l’accordéon, Jean Marc Serpin à la contrebasse et Pierre Pollet à la batterie et au clavier. En 9 titres alternant théâtralité, générosité et dynamisme, ces quatre musiciens atypiques, qui ont adopté le nom et les caractéristiques du fameux personnage de la Comedia dell’Arte, se jouent des frontières et versent autant dans l’humour et le populaire que dans le minimalisme et le psychédélisme !

mardi 7 avril 2015

Sacri Cuori – Delone (Glitterbeat/Differ-Ant)


Sacri Cuori – Delone (Glitterbeat/Differ-Ant)
Nous parlions il y a peu du quartet La Batteria, qui rendait hommage à l’âge d’or de la musique de film de l’Italie des années 60 et 70… Leurs compatriotes de Sacri Cuori, originaires de Romagne, nous proposent eux aussi leur B.O. imaginaire influencée par celles des immenses Rota, Morricone ou  Ortolani et agrémentée de sonorités empruntées à la cumbia mexicaine et façonnée d’accents psychédéliques, folk-rock et blues. Pour leur nouveau projet intitulé Delone, ‘’les 3 enfants bâtards de Fellini’’, comme ils aiment se définir, menés par le guitariste et compositeur Antonio Gramentieri, ont invité quelques guests prestigieuses parmi lesquelles on compte le guitariste américain Marc Ribot, le batteur de Sonic Youth Marc Shelley ou la diva Carla Lippis. Un titre nous a touchés plus particulièrement, il se nomme Serge et fait un clin d’oeil non dissimulé à l’album que notre génial Gainsbourg composa en 1971, l’Histoire de Mélody Nelson.

Voici le clip...

ci-dessous un extrait de leur album Rosario enregistré en 2012

lundi 6 avril 2015

Daymé Arocena – The Havana Sessions (Havana Cultura/Brownswood Recordings)


Daymé Arocena – The Havana Sessions (Havana Cultura/Brownswood Recordings)

L e dénicheur de perles rares et de nouveaux talents Gilles Peterson nous revient via son projet The Havana Cultura, avec un sublime EP de 4 titres nous présentant une toute jeune chanteuse cubaine nommée Daymé Arocena. Véritable révélation d’à peine 22 ans, elle impressionne dès son premier tour de chant grâce à une voix puissante et précise, gorgée d’un groove R&B éblouissant, d’une maîtrise vocale digne des divas historiques du jazz et d’une énergie latine puisée dans les traditions afro-cubaines du boléro et de la salsa. L’écouter donne l’impression d’avoir en face de soi un chœur formé de Gregory Porter et Concha Buika, une association parfaite de passion, de soul, de vécu et de métier !

Fraichement signé sur le label du DJ/producteur anglais Brownswood Recordings, la jeune artiste a fait parti du projet Havana Cultura Mix en Mai 2014. Ce dernier consistait à inviter plusieurs producteurs émergeants de musique électronique à la Havane et établir ainsi des collaborations avec les musiciens locaux (on se souvient notamment de l’ouvrage Mala In Cuba du fondateur du dubstep, réalisé en 2012 lors de l’édition Havana Cultura – The Search Of…). 
Après 3 featurings dans la compilation et une prestation live lors du lancement du disque à Londres, il est apparu logique et souhaitable qu’elle enregistre son propre album !

Son génie s'écoute d’emblée sur le vibrant Drama, ouverture resplendissante de ce Havana Cultura Sessions, qui démarre comme une complainte délicate et intimiste interprétée par Daymé et le pianiste Rob Mitchell, mais qui se pare très vite d’un groove enivrant mis en scène par les percussions d’Oli Savill, Simbad et Maître Samsou, ainsi que par la ligne de contrebasse de Neil Charles.

La jeune prodige à la carrure de Jill Scott, immense héroïne de la scène néo soul U.S., opère une fusion majestueuse des musiques jazz et caribéennes ancrées dans un héritage africain vivace et sauvegardé, notamment grâce à la religion Santeria et ses rythmes de transe. Cet héritage est d’ailleurs marquant dans le jeu des percussions du titre Cry Me A River, reprise étonnante du standard immortalisé par Ella Fitzgerald.

Ce morceau est un des classiques du jazz les plus joués mais ici, il nous est livré dans une version magique et dépouillée, à la croisée du chant gospel et de l’incantation chamanique. Quinto et Matador jouent les claves, chékérés et autres tres-dos tandis que Dagoberto Arocena et Yosvani Diaz l’accompagnent au chœur.

Dans Sin Empezar, Daymé se met au piano et entame une merveilleuse ballade aux reflets mélancoliques servis par la trompette au son feutré de Yelfris Valdes. Le culte qu’elle voue à feu Whitney Houston s’y manifeste alors pleinement, mâtinant son jazz d’une sensualité R&B touchante.

Avec ses rythmes chaloupés et son invitation à la danse dignes de la grande Célia Cruz, El Ruso demeure le titre le plus ‘cubain’ de cet EP qui annonce un album Nueva Era des plus intéressants de ce début d’année. Les talents d’interprète et de compositeur de Daymé confirment une fois de plus que Gilles Peterson a vu juste en la plaçant sous l’aile bienfaitrice de Brownswood Recordings, comme il le fît par le passé pour José James, Ben Westbeech, Zara McFarlane ou les japonais de Soil & ‘’Pimp’’ Sessions.

dimanche 5 avril 2015

Château Marmont - Sound Of Shambala (Sony Music)

Château Marmont - Sound Of Shambala (Sony Music)

Le tandem Château Marmont publie chez Sony Music l’excellent Sound Of Shambala. Ce second disque franchement orienté dancefloor est un pur bijou pop taillé dans la french touch des 90’s, serti d’éclats deep house et incrusté de paillettes soulfull. Les deux barbus prêtent une attention toute particulière à l’écriture de leurs mélodies, mélancoliques mais profondément séduisantes et attirantes d’où jaillit une sensualité délicate.
En 11 titres sans une seule fausse note, Château Marmont nous fait revivre ce qui s’est fait de mieux ces 15 dernières années sur la scène électronique française, nous rappelant à quel point la pop a transformé ses reliefs, brisant des tabous et proposant de nouvelles perspectives.
La house sucrée et estivale de Sound Of Shambala s’immisce insidieusement dans nos esprits, apaisés par l’arrivée du printemps, dès son ouverture avec Nothing To Hold Back interprétée par la délicieuse Steffaloo.
Bent Van Loo nous accompagne ensuite, à la manière d’un Chet Faker, dans un Don’t Cry déchirant et vibrant, tandis que la voix vocodée du titre City Of Giants nous rappelle celle des Daft Punk dans Game Of Love, une influence des maîtres casqués de la french touch que l’on retrouve plus loin avec l'énergique Everybody is somebody.
Le R&B futuriste de  A.T.T.Y.S. (avec les Twinsmatic en guests) rejoint les prouesses instrumentales d’un Flume jusqu’à ce qu’In Love viennent annoncer un changement de tempo. En effet Music Is My Land,  avec ses accents jazzy et son breakbeat entêtant, nous invite à quitter calmement le coin lounge pour rejoindre le dancefloor, le chanteur Rouge Mary (qui s’est notamment  illustré aux côtés de Bob Sinclar et Hercules & Love Affair) nous y accompagne avec sa voix gorgée de soul et de gospel.
Puis vient enfin le clou de l’album, même si tous les invités y ont une présence forte et remarquable, celle d’Alex Gopher revêt une dimension bien particulier. Quasiment disparu des écrans radars ce véritable héros de l’electro française réapparaît dans l’enivrant Paris La Nuit et ses nappes de synthés technoïdes étourdissantes, nous transportant vers cet ailleurs hindo-bouddhiste nommé Shambala ou « lieu du bonheur paisible ».

En parlant de leur disque, Château Marmont a déclaré:
« L'idée de départ de ce disque était de faire une musique moderne et actuelle avec des outils vintage. Recréer avec des instruments électroniques des années 70 ou 80, ce type de musique qui habituellement se fait sur un ordinateur dans un home studio. La moitié de ce disque repose sur des collaborations avec des producteurs, arrangeurs, musiciens, chanteur/chanteuses. C'est quelque chose qu'on voulait faire depuis longtemps, explorer de nouveaux horizons et surtout partager l'univers musical des autres. De manière générale, On voulait faire les choses de manière plus fraîche et moins cérébrale que l'album précédent. »