jeudi 5 novembre 2015

Las Hermanas Caronni - Navega Mundos (Les Grands Fleuves/L’autre Distribution)


Las Hermanas Caronni - Navega Mundos (Les Grands Fleuves/L’autre Distribution)

Las Hermanas Caronni, sœurs jumelles natives d’Argentine, publient leur troisième opus très aquatique par sa thématique, baptisé Navega Mundos. Laura, violoncelliste et Gianna clarinettiste, se plongent dans leurs souvenirs d’enfance à la recherche d’instants magiques et d’êtres disparus. Leur solide formation musicale et leur goût pour le voyage, les aident à dépasser leur background classique et traditionnel afin de créer un style singulier, mêlant atmosphères intimistes voire minimalistes et sonorités riches, puisées chez les impressionnistes français Debussy et Ravel, le compositeur brésilien Heitor Villa Lobos, le tango et la musique populaire de la Pampa. Les deux chanteuses offrent 12 titres dépaysants en hommage à leur maman Beatriz Pell et à leur mentor Juan Carlos Caceres, musicien, peintre et historien d’art disparu en Avril dernier. On notera la reprise de The Doors Spanish Caravan et la très belle mise en musique d’un poème de Rainer Maria Rilke La Mélodie des Choses.

Virginie Teychené – Encore (Jazz Village/Harmonia Mundi)


Virginie Teychené – Encore (Jazz Village/Harmonia Mundi)

La chanteuse de jazz originaire de Draguignan Virginie Teychené nous présente Encore, un subtil recueil de chansons qu’elle empreinte aux monstres sacrés de la variété française mais aussi aux maîtres de la bossa nova, du jazz ou de la folk outre-atlantique. Sa maîtrise parfaite aussi bien dans les graves que dans les aigus et son habileté à habiller les mots d’un scat délicat (commme dans Doralice), lui permettent d’exprimer ou plutôt de sublimer les textes de Léo Ferré (Jolie Môme), Claude Nougaro (à l’honneur avec Allées des Brouillards et A Bout de Souffle), Joni Mitchell (Both Side Now), George & Ira Gershwin (But Not For Me) ou Vinicius de Moraes et Antonio Carlos Jobim (Eu Sei Que Vou Te Amar). Entourée de son fidèle quartet, Virginie est à l’origine de deux titres, le touchant Before The Dawn avec la complicité de son pianiste Stéphane Bernard et la ballade Encore, composée par son contrebassiste Gérard Maurin.
On appréciera la performance de l'harmoniciste Olivier Ker Ourio dans le sublime et intimiste Septembre de Barbara!

mercredi 4 novembre 2015

Emilien Véret - Clarinettes Urbaines (Le Bruit Court)


Emilien Véret - Clarinettes Urbaines (Le Bruit Court)

Dans l’imaginaire collectif, la clarinette na pas forcément le même aura emblématique et impérieux que le saxophone, à part bien sûr lorsque c’est Stravinsky qui lui dédie des pièces ou bien Sidney Bechet, Benny Goodman et plus récemment David Krakauer ou Louis Sclavis qui la domptent. Cependant elle demeure aussi omniprésente dans la musique classique, que dans le jazz, le Klezmer,  les folklores d’Europe de l’est, de Turquie ou d’autres contrées.

Le jeune clarinettiste basé à Paris Emilien Véret  nous invite à pénétrer dans le vaste univers musical qu’il a bâti autour de cet instrument. Aussi bien inspiré par les métissages world de Yom ou Ibrahim Maalouf, que le jazz de Michel Portal ou le groove d’Electro Deluxe, il présente son premier projet solo intitulé Clarinettes Urbaines.

Voulant dépoussiérer l’image vieillissante de la clarinette et se détacher de ses répertoires un peu convenus, il s’attèle à explorer différentes pistes mêlant avec brio esprit des balkans et beats hip-hop dans Quartier Est, Run It Back (avec le MC AMZ en guest), beatbox, loop et mélodies pop dans Pop Wok ou La Ville, groove et funk dans l’excellent Know Your Name avec Nina Attal à la guitare/voix, musique moderne, FX et rythmique électro dans Hommage à C. Debussy, improvisation free et techno dans Le Panda Hirsute, voire trans dans Street Pipeau, folklore tzigane dans la reprise Les Yeux Noirs et ambiance romantique dans De Passage

Bref un effort réussi et séduisant pour un artiste aux multiples facettes, puisqu’en plus de jouer de la clarinette en Sib, de la clarinette basse et bambou, Emilien se mue en boîte à rythmes humaine manipulant samplers et boîtes à effets.

Ed West & RTKal - The Frass EP (Tru Thoughts)


Ed West & RTKal - The Frass EP (Tru Thoughts)

L’écurie Tru Thoughts dégaine une nouvelle arme de poing confectionnée par le producteur londonien Ed West (batteur du groupe reggae The Drop) et le MC de Birmingham RTKal. L’EP intitulé The Frass nous balance ses sonorités reggae/dance hall et dubstep à travers 4 titres punchy où apparaissent les pionniers de l’UK Sound System,  Serocee dans le titre éponyme et Jimmy Screech (moitié de Ghost Writerz) dans un Style Pon Target très orienté hip-hop. Ils déposent leurs flows racés et tranchants dans un projet croisant l’héritage jamaïcain et les rythmes électroniques de la nouvelle scène anglaise. Pour une première collaboration, The Frass sonne comme une évidence !
A noter que les 4 titres sont enrichis de leurs versions instrumentales et a cappella...

mardi 3 novembre 2015

Victor Démé – Yafaké (Chapa Blues/World Village-Harmonioa Mundi)


Victor Démé – Yafaké (Chapa Blues/World Village-Harmonia Mundi)

Le duo électro français Synapson, composé des DJs Alexandre Chière et Paul Cucuron publiaient en 2014 un tube qui allait les installer sur les ondes radio et les clubs mondiaux jusqu’à la sortie toute récente de leur LP Convergence, ce titre n’était autre que le remix de Djon’ Maya, succès d’un musicien africain récemment disparu !

Le chanteur/guitariste folk Victor Démé, originaire de la capitale économique du Burkina Faso, Bobo Dioulasso, nous quittait fin septembre dernier alors que son troisième et ultime Yafaké s’apprêtait à paraître sur le label Chapa Blues. Reconnu tardivement, ce chantre de la culture mandingue nous laisse un opus posthume poignant dont le titre signifie « pardonner » en langue dioula. Issu d’une lignée de griots du côté de sa mère et d’une famille de couturiers du côté de son père, Victor amorce sa carrière musicale en Côte d’Ivoire qu’il rejoint adolescent pour œuvrer dans l’atelier paternel. Rentré au pays à la fin des années 80, il collabore dans de nombreux orchestres et devient rapidement un chanteur populaire dans les nuits d’Ouagadougou. Ce n’est pourtant qu’en 2007 que paraît son premier disque éponyme, il est alors âgé de 46 ans et se remet péniblement d’une maladie qui l’emportera finalement quelques années plus tard.

Artiste témoin des troubles qui ont ponctués l’histoire de sa terre natale, Victor a toujours célébré dans ses compositions la femme, la tolérance, la paix et la solidarité, affectionnant les instruments traditionnels tels que la kora et les percussions tout en appréciant les sonorités latines.

Si Yafaké reprend les ingrédients d’une recette folk/blues peaufinée par le compositeur depuis plusieurs décennies, il s’émancipe aussi de ses prédécesseurs en octroyant une importance plus grande à la batterie, interprétée par Abdulaye Zon et Patrick Goraguer. Les guitares mandingues sont bien entendu toujours omniprésentes, qu’elles soient acoustiques ou électriques, le complice Issouf Diabaté les arrange comme personne. Les frères Diarra assurent quant à eux la section rythmique avec kora, balafon et percussions tandis que l’excellent Grégoire Yanogo impose son groove à la guitare basse. A noter, entre autres invités pour les cuivres, chœurs et piano, la présence du fameux accordéoniste Fixi (François Xavier Bossard), remarqué pour son projet avec le jamaïcain Winston McAnuff et son travail avec Tony Allen.

Une voix puissante et touchante, une musique élégante touchée par la grâce d’un griot combattif parti trop tôt.