lundi 9 février 2015

Xiomara Laugart - Tears And Rumba (Chesky Records)


Xiomara Laugart - Tears And Rumba (Chesky Records)

La chanteuse cubaine Xiomara Laugart fait partie de cette diaspora exilée aux US qui partage et fait vivre la culture musicale d’une ile qui s’apprête enfin à sortir de plus de 50 ans d’embargo. Respectée pour sa maîtrise du répertoire classique de Cuba - guajira, son, rumba -  et de la nueva trova (chansons engagées des années 50 et 60), la diva a décidé pour son dernier Tears And Rumba de rendre hommage à l’âge d’or de la musique poético-romantique cubaine des années 20 et 30 - la trova - avec des reprises incontournables de pionniers tels que Maria Teresa Vera et Miguel Matamoros. Etonnamment ressemblante à celle de son aînée CeliaCruz, la voix de Xiomara, authentique et vibrante, nous accompagne durant 12 titres sensuels sur des rythmes enivrants de la rumba afro-cubaine, combinant les traditions ouest africaines, caribéennes et européennes.

vendredi 30 janvier 2015

Boubacar Traoré – Mbalimaou (Lusafrica)


Boubacar Traoré – Mbalimaou (Lusafrica)

Il est des sonorités qui touchent et s’adressent à tous, sans distinction de culture,  de situation géographique ou temporelle… Le blues fait partie de ces langages musicaux universels traversant les âges et les continents, le chanteur, guitariste et compositeur malien Boubacar Traoré nous le prouve une fois de plus avec son nouveau Mbalimaou. A 73 ans, Kar Kar signe 12 titres acoustiques poignants et roots nous immergeant dans la culture mandingue et l’univers poétique nostalgique et mélancolique d’un septuagénaire qui n’a de cesse d’affiner son chant et son jeu de guitare depuis ses débuts dans les 60’s. Devenu une référence incontournable au Mali, Boubacar a, pour la première fois, intégré le traditionnel n’goni (violon africain) et l’incontournable kora, interprétée ici par l’immense Ballaké Sissoko, que l’on retrouve d’ailleurs à la production de ce disque sobre et vibrant.

dimanche 25 janvier 2015

The Avener - The Wanderings Of The Avener (96 Music/Universal Music Division Capitol Music France)


The Avener - The Wanderings Of The Avener (Universal Music Division Capitol Music France)

Auteur d’un track internationalement salué par un public aficionado d’un son deep-house délicat et gorgé de vibes pop, folk, soul, jazz, blues et rock, le français The Avener, nom de scène de Tristan Casara, publie son premier disque intitulé The Wanderings Of The Avener. Le niçois a fait ses premières armes de Dj au sein du High Club - appartenant au comique Franck Dubosc - campant face à la Promenade des Anglais (…ça c’était pour la petite anecdote !).

Le succès de son premier single Fade Out Lines (emprunté au répertoire de Phoebe Killdeer and the Short Straws), s’inscrit dans la continuité des productions en vogue de Wankelmut, Alle Farben, Fritz Kalkbrenner, Claptone ou encore Route 94. À sa sortie il laissait déjà présager un goût prononcé pour l’art du rework raffiné et radieux.

La découverte de l’album ne nous déçoit pas puisqu’on y retrouve les beats ouatés mid-tempo, les samples aux sonorités chaudes et les lignes de basse lourdes et entrainantes qui avaient fait leurs preuves auprès du dancefloor. The Avener vise forcément l’efficacité et la bonne réception de ses ondes positives par un large auditoire, cependant on ne peut que constater l’étendue d’une culture musicale de bon goût, étoffée et variée, allant du blues roots de John Lee Hooker (auquel il rend hommage dans son remix de It Serves You Right to Suffer ) au rock indie 90’s de Mazzy Star (avec Fade Into You), en passant par la folk des canadiennes de The Be Good Tanyas (Waitin' Round to Die) ou la soul sensuelle d’Andy Bey (Celestial Blues).



Le jeune Tristan a bien digéré l’impact d’artistes comme Moby ou appartenant à la mouvance french touch et leur rayonnement sur la scène électro actuelle, il accouche ainsi d’un disque réussi, déclinant en 14 titres cohérents une recette bien éprouvée (certes, mais au combien efficace) consistant en un mélange habile de séquences électroniques, d’instruments, de voix naturelles et d’accents acoustiques… Il projette d’ailleurs, pour de futurs enregistrements, de faire intervenir plus de musiciens et moins de claviers, histoire d’humaniser encore un peu plus sa vision de l’EDM !
 


Björk - Vulnicura (One Little Indian)

Björk - Vulnicura (One Little Indian)

La grande prêtresse islandaise, Björk, sortait discrètement ce mercredi 21 Janvier 2015 son 8ième album studio intitulé Vulnicura.
Ce qui rassure à l'ouverture de ce disque qui clôt un chapitre important de sa vie affective, c'est que la musicienne n'a rien perdu de son génie, de cette force à imaginer des ambiances, des mélodies, des arrangements hybrides et sensuels.
Vulnicura met en musique l'assaut des spectres menaçants qu'une séparation amoureuse peut engendrer. Ce déferlement des passions les plus troubles et les plus sombres alimente pourtant un réservoir créatif sans limite, que Björk annonce d'emblée dans son titre en forme de mot valise résumant les 3 étapes de la déception sentimentale: Vulnérable Volcanique Cure.

Son précédent Biophilia nous plongeait dans un univers technoïde conceptuel et barré qui, pour ma part, allait trop loin dans les expérimentations... Ici, nous retrouvons les orchestrations de cordes sophistiquées et épiques que nous écoutions dans l'immense Homogenic, son 5ième opus paru en 1997 (Björk a d'ailleurs déclaré être devenue "une nerd du violon" pour parer sa détresse).

Sa voix, si sublime et si unique habite les 9 titres de Vulnicura avec la clarté cristalline de ses débuts. Elle erre dans des décors magistraux et grandioses, où les productions électroniques bourdonnantes, faites d'abstract, d'indus et d'ambient, brossées par le vénézuélien Arca (Kanye West, FKA Twigs...) et l'anglais The Haxan Cloak, nous conduisent droit vers l'asphyxie, l'angoisse, la perte de connaissance, où tous repères se dissolvent dans des entrelacs soniques complexes et parfois futuristes (sans pour autant devenir inaudibles et indigestes). Sa rencontre avec les deux producteurs aura heureusement fait de "ce disque étrange, l'album à la fois le plus douloureux et le plus magique de sa carrière !"

Björk se livre corps et âme et on ne peut que saluer la forme, sans retenue elle étale ses émotions, avec langueur ces complaintes enivrantes deviennent radieuses (Lion Song), abrasives (History Of Touches) ou glaçantes (Black Lake), frôlant parfois le dubstep (Quicksand).

L'artiste conçoit ses chansons avec dramaturgie en leur édifiant différents mouvements, l'angoissant Family par exemple, nous fait croire être un temps victime d'acouphènes, puis au bout de 3 minutes se remet en ordre en s'apparentant à un extrait pour quatuor à cordes de musique de chambre, avant d'entamer une montée au violon oppressante et théâtrale, pour finalement mourir et se répandre dans un abysse électronique.

L'incisif Not Get et sa mélodie orientalisante nous happe dans un enchainement progressif de beats et de drones assourdissants, Björk  y déploie une voix à la fois lente, monotone et pugnace !

Le chanteur new-yorkais Anthony Hegarty (Anthony & the Johnsons, Hercules & Love Affair...) vient apporter un chœur soul à la délicieuse ballade Atom Dance, rythmée par des cordes pincées somptueuses et la marche militaire d'une caisse claire syncopée. On se surprend à repenser dans les premières secondes à cette reprise mémorable de It's Oh So Quiet, immortalisé en 1951 par Betty Hutton, que seule Björk a su mener avec justesse... Shhhh Shhhh...!






Vulnicura est curatif, il marque la renaissance d'une icône de la musique électronique. Elle y signe des textes comme tirés du journal intime d'une ado en souffrance, marquée par "la rupture la plus douloureuse de son existence". Elle était mariée au plasticien américain Matthew Barney - une idylle qui vit naître leur fille Isadora - mais elle ne l'est plus et la vie doit continuer !

vendredi 23 janvier 2015

Silk Rhodes – Silk Rhodes (Stones throw Records)


Silk Rhodes – Silk Rhodes (Stones throw Records)

Silk Rhodes publiait en Décembre 2014 son premier opus au titre éponyme sur le prestigieux label californien Stones Throw - l’exigeante maison de disque orientée hip-hop underground a signé de véritables légendes du beatmaking comme Jay Dilla (RIP), Madlib, Dudley Perkins, MF Doom ou encore Percee P - Peanut Butter Wolf (patron du l’écurie) a véritablement eu le coup de cœur pour leurs sonorités sensuelles et racées, aux accents psychédéliques, funky et méditatifs surgis d’un autre temps.

Le duo originaire de Baltimore et composé du producteur Michael Collins et du chanteur Sasha Desree, nous présentait alors leur soul cosmique au groove minimaliste renouant avec la tradition classique des 70’s, dont The Delfonics de Philadelphie ou encore l’immense Al Green figurent parmi les piliers.

Si leur son est dépouillé, leur look s’avère l’être beaucoup moins ! En effet nos deux dandies arborent un style kitsch-vintage semblant tout droit sortie d’un film de Tarantino ou d’un clip de Prince (qui semble être une de leurs références musicales). Vêtus de chemises à jabot, de colliers de perles, de blazers et de pantalons à taille haute et pattes d’éléphant, l’un porte de longs cheveux bouclés et une fine moustache, l’autre une barbe bien taillée et un chignon lâche…

Pour l’anecdote, l’album est né sur la route, dans une voiture, un Honda CR-V 97’ exactement ! Une pédale pour harmoniser, auto tuner et faire des boucles, un micro, le radiocassette pourri du bolide et la voix de Sasha, douce, langoureuse, dramatique et captivante, formée au chant classique.

En résultent 12 ballades aux atmosphères romantiques, organiques et suaves… Sauf 2 peut être, habitées d’un groove plus assassin et ensorceleur que les autres, le très sexy Face 2 Face et Personal Use, plus electro funk…presque deep house !

Les productions épurées de Michael sont parfaitement élaborées pour évoquer les arrangements magiques et efficaces de Sly And The Family Stone sans pour autant donner l’impression d’en être de vulgaires plagiats. Les influences bien actuelles du R&B et de la nusoul sont perceptibles, comme celles de la pop et du rock, ce qui fait de  Silk Rhodes une entité bien différente des signatures vintage de Daptone Records (que j’apprécie par ailleurs).

C’est en état d’apesanteur que l’auditeur parcourt donc ces 30 minutes de pur bonheur, bien au chaud dans l’univers soul soyeux et délicat d’un tandem à suivre de près !

mercredi 21 janvier 2015

Olivier Sens + Juanjo Mosalini – Dicrete Time (ZAM/Socadisc)


Olivier Sens + Juanjo Mosalini – Discrete Time (ZAM/Socadisc)

Discrete Time est le produit d’une collaboration inédite de deux musiciens d’exception, le contrebassiste/programmeur français Oliver Sens et le bandonéoniste argentin Juanjo Mosalini. Les sonorités acoustiques de leurs instruments respectifs se mêlent à des nappes et des rythmiques électroniques sophistiquées mais discrètes. Le lyrisme virtuose du bandonéon s’appuie sur l’assise délicate et langoureuse de la contrebasse, la programmation venant théâtraliser avec finesse cet accord subtil mêlant la créativité et l’improvisation du jazz à l’expressivité et la sensualité du tango.


Giovanni Mirabassi Quartet – No Way Out (CAM Jazz/Harmonia Mundi)


Giovanni Mirabassi Quartet – No Way Out (CAM Jazz/Harmonia Mundi)

Considéré comme l’un des plus jeunes musiciens de la génération des « italiens de Paris », le pianiste et compositeur autodidacte Giovanni Mirabassi publie son nouveau projet personnel intitulé No Way Out. Souvent remarqué en tant qu’accompagnateur dans le milieu de la chanson, il s’illustre aussi dans différentes formations jazz aux côtés de Louis Moutin, Flavio Boltro ou encore Leon Parker. Ici le quadragénaire, accompagné du batteur cubain Lukmil Perez Herrera et du contre-bassiste Gianluca Renzi, invite l’excellent vibraphoniste de Los Angeles Stefon Harris. Le quartet nous propose 8 compositions pleines de fraîcheur et d’élégance, aux mélodies exquises et ensorceleuses. Le disque sonne très jazz américain moderne et évoque immanquablement l’âge d’or de Blue Note des années 60.
Ci-dessous un extrait de son opus Cantopiano paru en 2006, dans lequel Giovanni rendait hommage à la chanson française.