mercredi 20 avril 2016

Alaia & Gallo - Who Is He (Soul Heaven)


Alaia & Gallo - Who Is He (Soul Heaven)


 
 

Imaginez la fine fleur de la house italienne reprenant le classique de Bill Withers "Who Is He (And What Is He To You?)"Forcément c'est alléchant et évidemment que cela fonctionne! Pour leur début chez Soul Heaven, le duo Alaia & Gallo fait très fort en signant la rencontre parfaite d'une soul la plus sensuelle qui soit et d'une house au groove funky des plus efficaces. Le résultat est hypnotique et la voix de Kevin Haden bluffante d'émotion, la ballade intemporelle de Bill devient une véritable machine à remuer, sonnant bien sûr comme un succès estival assuré!

Tommy Bones – Arrival EP (Strictly Rhythm)

Tommy Bones – Arrival EP (Strictly Rhythm)

Le label américain Strictly Rhythm nous offre une nouvelle pépite aux sonorités house, il s'agit du dernier EP Arrival du Dj/producteur new-yorkais Tommy Bones. Dans le milieu depuis plus d'une vingtaine d'année, celui que l'on connait aussi sous l'alias The Dancer's Dj nous gratifie de 2 titres irrésistibles menés par un groove funky/soul. "Aisha" est une véritable bombe aux reflets tech house orientée dancefloor qui n'a d'ailleurs pas échappé aux pointures Pete Tong, Sandy Rivera et Doorly, sans doute séduits par ses vocaux sensuels livrés par la torride Aisha Koswara. "T's Jazzy Joint" est plus deep avec ses saveurs 90's, la légende Terry Farley ne s'y trompe pas en le plaçant dans son top 10 du mois d'avril sur Traxsource.


Rosemary Standley - A Queen of Hearts (Jazz Village/Harmonia Mundi)


Rosemary Standley - A Queen of Hearts (Jazz Village/Harmonia Mundi)

Le projet A Queen of Hearts est d'abord l'histoire d'une voix, intemporelle et reconnaissable entre toutes, devenue si familière depuis quelques années grâce au succès de la formation franco-américaine Moriarty (on se souvient de leur sublime single "Jimmy" extrait de l'album Gee Whiz But This Is a Lonesome Town paru en 2007). En effet la chanteuse Rosemary Standley, qui jusque là nous avait habitué à un registre plutôt blues, country et rock acoustique, nous plonge ici dans le répertoire glamour du "tour de chant" à l'américaine, cette tradition du cabaret grande époque plus ou moins perdue, que les divas Monroe, Holiday, Dietrich, Simone et autres Rita Hayworth ont indélébilement marqué de leur empreinte.

Beauté, élégance, décadence et mélancolie font partie de ces ingrédients nécessaires qui tamisent le timbre d'une voix, la rendent vibrante et profonde. Les 23 titres que Rosemary interprète accompagnée du pianiste Sylvain Griotto sont largement imprégnés de jazz, de musique classique et de chansons populaires influencées par le cinéma des années 40, 50 et 60. On y retrouve les standards incontournables du XX° siècle écrits, joués ou composés par Gershwin, Nina Simone, Lennon et McCartney, Kurt Weill, Henry Purcell mais aussi Margueritte Duras, Alain Bashung ou Francis Poulenc.

A Queen of Heats est à l'origine un spectacle de music-hall mis en scène par Juliette Deschamps et qui tourne depuis déjà 3 ans. Ce CD est complété d'un DVD permettant de découvrir ou redécouvrir cet hommage à ces héroïnes insatisfaites et malheureuses qui connurent le firmament, mais finirent empoisonnées par la solitude…  
 


En duo sur scène, Rosemary et Sylvain sont épaulés par le bassiste Vincent Talpaert et le batteur/percussionniste Eric Dubessay en studio.

mardi 19 avril 2016

Hyperculte – Hyperculte (Bongo Joe/l'Autre Distribution)


Hyperculte – Hyperculte (Bongo Joe/l'Autre Distribution)

Energie punk, pop sauvage et rock pugnace aux relents électro, les influences du duo genevois Hyperculte sont aussi bien à chercher du côté de l'avant-gardisme de Russell et des expérimentations minimalistes et répétitives de Reich ou Glass, que des transes chamaniques ancestrales. Formé par la féroce Simone Aubert (guitariste et co-fondatrice de Massicot) à la batterie et le manitou Vincent Bertholet (chef de file de l'anticonformiste Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp) à la contrebasse/looper/effets, le groupe sort son premier opus ravageur et audacieux, jouant la carte des rythmiques frénétiques, des textes azymutés, des chants électrisants et des ambiances psychédéliques.


Basel Rajoub Soriana Project - The Queen Of Turquoise (Jazz Village/Harmonia Mundi)


Basel Rajoub Soriana Project - The Queen Of Turquoise (Jazz Village/Harmonia Mundi)



Le compositeur et saxophoniste Basel Rajoub est originaire de la ville d'Alep en Syrie, aujourd'hui sinistrée et toujours prise entre deux feux. C'est à Damas durant son adolescence que la trompette fixe toute son attention, le jazz de Miles Davis et Louis Armstrong s'impose alors à lui jusqu'à son immersion dans les musiques orientales et l'adoption (malgré lui) du saxophone ainsi que du duclar (instrument russo-allemand récent, se situant entre la clarinette et le doudouk).






Il publie en 2007 un premier disque Kamir (accompagné de la trinité piano, basse, batterie) et, souhaitant s'investir davantage dans les sonorités propres à l'héritage musical de son pays natal, amorce en 2009 son projet Soriana ("notre Syrie") avec Asia, second effort qu'il enregistre en trio avec le percussionniste Khaled Yessin et Feras Charestan, virtuose du qanûn. C'est véritablement à cette période que l'artiste se plonge dans le folklore syrien en composant notamment pour cet instrument perse de la famille des cithares sur table. "Il combine ainsi les myriades de modes mélodiques et les subtilités micro-tonales de la musique arabe traditionnelle à son écriture contemporaine", enrichie de son expérience de jazzman.

Toujours entouré de Feras Charestan au qanûn, il fait cette fois-ci appel au joueur de oud Kenan Adnawi, au percussionniste Andrea Piccioni et à la chanteuse Lynn Adib, pour nous offrir The Queen Of Turquoise, traduction littérale du nom de son épouse Malika Fairouz. L'improvisateur nous invite à le suivre à travers 9 compositions aérées et inspirées, où le silence est d'or, laissant flotter des notes surgies d'un autre temps. La voix de Lynn, poignante dans les enivrants "Hamam" et "Ya Tha Elqawam", est bouleversante de pureté, convoquant bien sûr le souvenir de ses illustres aînées d'Egypte, du Liban et d'ailleurs. Les percussions d'Andrea nous mettent en transe dans l'excellent "11:11" qui s'ouvre pourtant très lentement par quelques notes en suspension de Basel. Rejoint par Kenan et sa virtuosité, le rythme s'accélère, le tambourin entame alors sa ronde hypnotique virevoltant côte à côte avec le saxophone…

Une très belle ballade dans la Syrie imaginaire d'un esprit rêveur et surement mélancolique.

lundi 18 avril 2016

David Linx & Brussels Jazz Orchestra - Brel (Jazz Village/Harmonia Mundi)

David Linx & Brussels Jazz Orchestra - Brel (Jazz Village/Harmonia Mundi)

Avant même d'écouter le nouveau projet de David Linx et tout fraîchement débarqué de son précédent enregistrement avec Fresu et Wissels, on est interpelé par son titre et forcément curieux de savoir si l'artiste habitué aux prises de risques (Follow The Songlines) en réchappe grandi ou pas! Lorsque le crooner belge décide de chanter les titres emblématiques de son illustre compatriote Jacques Brel, la question essentielle du SENS se pose. En effet comment aborder une personnalité si complexe et complète sans tomber dans l'écueil du pathos?

Collaborant avec l'un des plus fameux orchestres de jazz au monde, le chanteur acrobate a répondu présent à l'invitation du Brussels Jazz Orchestra, formulée conjointement par son directeur artistique Franck Vaganée et son manager Koen Maes. Ensemble ils révèlent les talents d'auteur sensible et profond d'un compositeur raffiné et sophistiqué, un monstre sacré de la chanson aux succès intemporels et universels.

Plus que révélées, les mélodies de "La Valse à Mille Temps", "Mathilde","Quand on a que l'amour", "Vesoul - Amsterdam" sont réarrangées de manière à en extirper un swing captivant, le pittoresque et l'intime se dévoilent au grand jour avec grandiloquence et élégance, si les mots demeurent toujours aussi percutants et vrais, ils s'allègent, s'arrondissent et rebondissent. Jazz orchestral, scat et textes géniaux fusionnent pour le meilleur.

"Ne me quitte pas" devient une comptine, douce et délicate, "Isabelle" et "Le Plat Pays" deux ballades romantiques où la chaleur des cuivres est persistante tandis que "Ces gens là" perd ses accents...

La reprise de "Bruxelles" résonne bien sûr de manière toute particulière suite aux évènements tragiques du 22 Mars 2016, enjouée et virevoltante elle fait plus que jamais un pied de nez à la terreur...



Arthur Verocai - Arthur Verocai (Mr Bongo)

Arthur Verocai - Arthur Verocai (Mr Bongo)

Les têtes chercheuses du label anglais Mr Bongo sont allées nous débusquer une oeuvre magistrale et pourtant quasiment disparue des écrans radars d'Arthur Verocai, multi-instrumentiste, compositeur et arrangeur brésilien originaire de Rio de Janeiro, qui s'est notamment illustré aux côtés des divas Maria Creuza, Gal Costa ou Ellis Regina.

Souvent comparé à Tim Maia et Jorge Ben, le chef d'orchestre méconnu publiait en 1972 son album éponyme de 10 titres, où la fusion des genres folk, classique, jazz, samba, funk, bossa nova (Tom Jobim), soul et tropicalisme dénotait un esprit d'aventure d'une grande sophistication.

Osant même bousculer les codes de l'époque en explorant les sonorités électroniques et psychédéliques ("Karina"), Arthur a su éviter la censure militaire en employant un style d'écriture imagée:
Si les ambiances soul/funk 70's étasuniennes transparaissent dans "Presente Grego", c'est en effet pour mieux critiquer le pouvoir en place et ses fausses apparences, il fait allusion à l'épisode du Cheval de Troie et du piège tendu aux troyens par les grecs.

S'inspirant autant d'artistes nord-américains tels Shuggie Otis, David Axelrod et Charles Stepney ou Miles Davis, Bill Evans, Oscar Peterson et Herbie Hancock que de ses compatriotes précurseurs comme H. Villa Lobos, Milton Nascimento et Tom Jobim, il avait déjà imposé sa marque par le passé en arrangeant les cordes pour Jorge Ben ou en produisant Agora d'Ivan Lins (1971) et 2 albums pour Célia (chanteuse d'ailleurs présente dans son projet). Sa réussite fut telle que Continental lui offrit la possibilité d'enregistrer ses propres compositions, défi qu'il accepta en imposant le choix de ses musiciens. Au casting figurent donc12 violonistes, 4 altos et 4 violoncelles, des percussionnistes, batteurs, guitaristes, bassistes, trompettistes, flutistes et claviéristes... On y croise entre autres les pointures Pedro Santos (percussions) Toninho Horta (guitare), Edson Maciel et Paulo Moura (saxophone) ou Pascoal Meireles (batterie)... sans oublier les chanteurs Carlos Dafe et Oberdan.

Bien que l'opus soit court, une trentaine de minutes à peine, Arthur Verocai a su traduire le large spectre musical qui inondait le Brésil à l'époque, il témoigne ainsi d'une effervescence féconde, qui prend ici des allures de bande-son orchestrale psych-funk. La musique de film l'ayant toujours attiré, c'est pour son travail à la télévision qu'il sera finalement récompensé avec entre autres les musiques pour les pubs de Brahma, Fanta ou Petrobra's.

Le disque, dont une version originale peut se vendre autour des 2000$, a été échantillonné par les piliers de la scène hip-hop US dont MF Doom, Ludacris & Common, Little Brother ou encore Action Bronson. L'immense Madlib déclare même à son sujet "I could listen to the album everyday for the rest of my life"!