vendredi 15 avril 2016

Hareton Salvanini - S.P. / 73 (Mr Bongo)

Hareton Salvanini - S.P. / 73 (Mr Bongo)

Le label Mr Bongo est une nouvelle fois allé nous dénicher une petite pépite musicale oubliée... Il s'agit du premier opus (et accessoirement chef d'oeuvre) S.P. / 73 du multi-instrumentiste, compositeur et arrangeur brésilien Hareton Salvanini (RIP). Paru initialement en 1973 chez Continental, le disque est aujourd'hui réédité pour le plus grand bonheur des amateurs d'un jazz-funk orchestral aux reflets carioca, façon Eumir Deodato dans son illustre reprise du théâtral "Also Sprach Zarathoustra" de Richard Strauss.

Directeur musical de TV Record (Sao Polo) à la fin des années 90, il demeure un auteur méconnu de jingle publicitaire et de musique de film. Véritable crooner à la voix d'ange (qui remporta le 1er prix de chant lors du festival universitaire de TV Tupi), il nous régale de 11 titres symphoniques interprétés par la quarantaine de musiciens de l'Orchestre Municipal du Théâtre de Campinas qu'il dirige avec maestria. Son frère Ayrton, qu'il considère comme son bras droit, signe quant à lui les textes de chansons qui alternent avec des plages exclusivement instrumentales à rapprocher de celles de Lalo Schifrin ou d'Henry Mancini. Entre bossa nova, BOF, jazz, MPB et musique classique, Hareton nous livre un disque emblématique et rare... Qui reçu à l'époque le prix du meilleur album étranger au Japon.

Junior Sanchez – Built EP (DFTD)


Junior Sanchez – Built EP (DFTD)

Junior Sanchez, l'un des piliers de la scène électronique underground de New-York, nous offre un nouvel EP baptisé Built, composé de deux titres au groove solide et massif, parcourus de sonorités house classiques et armés de lignes de basse funky. Distribués en format digital par le label londonien DFTD, "Da House Dat Jack Built" et "Suck My Soul" se retrouveront inévitablement dans la playlist de bien des Djs lors de la saison estivale à venir. Leurs vocaux catchy, leurs bass lines hypnotiques et leurs rythmiques entraînantes feront mouche à tous les coups. Mention spéciale pour un "Suck My Soul" explosif et contagieux!


jeudi 14 avril 2016

Martha High - Singing For The Good Times (Blind Faith Records/Differ-Ant)


Martha High - Singing For The Good Times (Blind Faith Records/Differ-Ant)

Le nom de James Brown est indissociable de celui de ses fidèles acolytes Fred Wesley, Bobby Bird, Alfred "Pee Wee" Ellis, Lyn Collins et autres Marva Whitney … Pourtant il en est une dont on ne parle que trop rarement, c'est sa choriste Martha High, qui l'accompagna sur scène et en studio pendant plus de 30 ans, avant de rejoindre au début des années 2000 l'orchestre du saxophoniste Maceo Parker (autre étoile de la JB's factory), puis la formation hexagonale Shaolin Temple Defenders en 2008 (W.O.M.A.N.) et enfin les Speedometer en 2012 (Soul Overdue). S'apprêtant à publier un nouvel opus solo baptisé Singing For The Good Times prévu pour le 22 Avril prochain, la "Platine Blond Soul Sister" revient sur le devant de la scène pour le plus grand plaisir des aficionados d'une southern soul profonde et originelle, puisant ses racines dans le blues et le gospel ! A travers 11 titres enregistrés à l'ancienne, elle nous replonge dans ses sonorités corrosives des 60's, si chaudes et si sensuelles, qui firent la renommée d'un genre qui n'a jamais cessé de passionner et de renaître de ses cendres (Amy Winehouse, Angie Stone, The Dap Kings…). Epaulée par le producteur et crooner italien Luca Sapio la diva, qui a dépassé les 70 printemps, n'a rien perdu de sa fraîcheur et de sa superbe, comme le prouve son premier extrait intitulé "Lovelight", résolument racé et si proche du Memphis Sound de l'illustre écurie Stax.

mercredi 13 avril 2016

Elza Soares - The Woman At The End Of The World (Mais Um Discos/Differ-Ant)


Elza Soares - The Woman At The End Of The World (Mais Um Discos/Differ-Ant)

A presque 80 ans l'icône carioca Elza Soares n'en finit pas de nous surprendre, se réinventant sans cesse et abordant des problématiques brûlantes d'un Brésil bien éloigné des clichés. Masquant les outrages du temps par multe interventions esthétiques et sous une épaisse couche de fond de teint, la diva aux sept vies publie son 34ième album studio intitulé The Woman At The End Of The World (A Mulher Do Fim Do Mundo), composé de 11 morceaux inédits… Une première pour l'artiste !

 Représentante d'un nouveau genre musical baptisé dirty samba ou samba sujo issu de la scène avant-gardiste paoliste, Elza nous dépeint sur fond d'histoires sordides le portrait renversant d'un pays abusé et excessif, où racisme, sexe, drogue et violence côtoient l'image d'Epinal du Carnaval et des plages de Rio.

Celle qui fut la protégée de Louis Armstrong dans les années 50, l'épouse de la légende du foot Garrincha et qui partagea la scène de Chico Buarque, Caetano Veloso et autres Gilberto Gil, a toujours voulu innover sa samba l'associant au jazz, à la soul, au hip-hop, au funk ou à la musique électronique. C'est avec le free jazz et le rock que l'octogénaire à l'énergie punk décide aujourd'hui de fricoter, dans un disque dur et éraillé où la MPB (musica popular brasileira) est largement mise à mal. Le batteur/percussionniste Guilherme Kastrup en est le maître d'œuvre, conviant aux côtés de la chanteuse les auteurs, musiciens et compositeurs de SP: Kiko Dinucci, Rodrigo Campos, Felipe Roseno, Marcelo Cabral, Thiago França, Douglas Germano, Clima, Celso Sim et Romulo Froes

Sa voix rauque et vibrante dans l'ouverture en acapella "Coraçao Do Mar" (poéme d'Oswald de Andrade, auteur moderniste du célèbre Manifeste Anthropophage), nous fait calmement glisser vers la sublime samba triste "A Mulher Do Fim Do Mundo"accents électro et guitares saturées nous annoncent d'emblée une musique grave et pesante, exprimant douleur, désespoir et colère… Les cordes viennent rajouter une touche de lyrisme hypnotique et terriblement captivant à un titre qui demeure plutôt soft au regard de ce qui suit.

En effet tout se gâte à partir de "Maria Da Vila Matilde", la samba devient bruyante (samba esquema noise), une chape de plomb s'abat sur l'auditeur avec cette chanson sombre et corrosive où Elza incarne une femme battue (du vécu?) avertissant son ex-compagnon de ne plus l'approcher sinon "você vai se arrepender de levantar a mao pra mim" (tu vas regretter d'avoir levé la main sur moi).

"Luz Vermelha" et sa mélodie dissonante aux reflets psychédéliques nous livre ensuite une réflexion pessimiste et effrayante sur le monde…

Le très explicite "Pra Fuder" ("pour baiser") et son air de samba afro-punk endiablé exprime le désir sexuel incandescent et sauvage d'une femme prédatrice… L'instrumentation y est dominée par les cuivres acides de Bixiga 70.

"Benedita" raconte l'histoire d'un transsexuel drogué accablé par les violences sociales, violences illustrées par la distorsion des guitares tranchantes…

La moiteur du Shrine transparaît ensuite dans l'afrobeat de "Firmeza?!", qu'elle interprète en duo avec Rodrigo. Les cuivres funky rappellent bien sûr ceux de Fela Kuti

Le tango désarticulé et chancelant "Dança" est post mortem, narré par une disparue qui, même réduite en poussière, veut danser…

Dans la ballade maritime "O Canal" est cité Alexandre Le Grand, veillant sur la construction d'un passage près de la mer Egée et réprimant ses sujets par cupidité et désir de grandeur… Un écho à la dictature militaire au Brésil?

Le tendre "Solto" est l'unique titre de l'opus dans lequel il n'y a pas de perturbation sonore ni d'agression verbale, l'orchestration y est composée d'arpèges de guitare et d'un quatuor à cordes formant un doux écrin à la voix apaisée d'Elza, qui ne crie plus mais murmure un texte demeurant tout de même noir et triste, faisant sans doute écho à sa liaison avec l'amour de sa vie.

En clôture de ce qui semble être le meilleur album brésilien de l'année 2015 (Rolling Stone Brazil), Elza se retrouve à nouveau seule , nous offrant un second acapella touchant, surgi d'une nappe électronique cacophonique et angoissante. "Comigo" est un hommage à la mère, qui malgré sa disparition reste présente auprès de ses enfants... Des mots qui résonnent de façon particulière pour la diva qui perdit un fils quelques mois avant le lancement du disque fin 2015. 
Bien que les textes soient écrits par d'autres, l'artiste se les approprie et se raconte san jouer la comédie...
 

vendredi 8 avril 2016

S-Man & Harry Romero – Searching Feat. Melisa Whiskey (Strictly Rhythm)


S-Man & Harry Romero – Searching Feat. Melisa Whiskey (Strictly Rhythm)

Le phénoménal Roger Sanchez alias S-Man, ardent agitateur de dancefloor et pionnier d'une house music underground des plus exigeantes nous revient avec sa bombe "Searching" qu'il produit en collaboration avec une autre signature emblématique de la scène électronique américaine, le Dj/producteur Harry "Choo Choo" Romero (HCCR).

Remarqué tout récemment pour sa compilation Strictly Roger Sanchez, dans laquelle il revient à travers une sélection de 30 titres old school sur les moments marquants de sa carrière, le new-yorkais nous montre qu'il demeure toujours autant d'actualité, avec une production aux sonorités définitivement classiques mais qui résonnent de manière contemporaines.

Dans la version vocale de "Searching", les deux légendes invitent la diva basée à Londres Melisa Whiskey qui, sur un beat deep-house, injecte avec sa voix puissante un fluide soulful captivant. La version Dub est plus typique de la patte de S-Man et se renforce d'une solide partie rythmique rendue plus sèche et percutante par Harry Romero.

jeudi 7 avril 2016

Ebo Taylor – My Love And Music / Twer Nyame (Mr Bongo)


Ebo Taylor – My Love And Music  / Twer Nyame (Mr Bongo)

 L'illustre guitariste ghanéen Ebo Taylor, véritable chantre du highlife des années 70, est considéré comme une véritable légende de la musique d'Afrique de l'Ouest tant son apport a su moderniser ce style traditionnel apparu au début du 20ième siècle, en le combinant à l'afrobeat, au jazz et à la funk des icônes américaines.

Toujours à tourner alors qu'il fête cette année ses 80 printemps, l'artiste voit son œuvre être célébrée par l'excellent label Mr Bongo, qui republie deux de ses albums (dont les éditions originales se négocient à prix d'or), le premier de sa carrière solo My Love And Music paru en 1975 et Twer Nyame en 1978.

My Love And Music est largement dominé par l'influence du reggae (manifeste sur "Maye Omama" et le titre éponyme) on note bien sûr l'emprunte caribéenne du calypso (une des composantes essentielles du highlife), mais aussi celle de Fela Kuti sur le brulant "Odofo Nyi Akyiri Biara" et de la soul sur "Will You Promise".

Le second disque sonne plus roots, Ebo l'a composé et arrangé de façon plus classique, avec les accents latin-jazz radieux du titre éponyme, les cuivres afro-funky et la guitare électrique de "Peace On Earth", les claviers psychédéliques et les percussions entêtantes d'"Atwer Abroba".

De quoi réjouir les amateurs d'afro-groove férus de raretés…!

mardi 5 avril 2016

Camarao Orkestra - Camarao Orkestra (Clapson Records/L'Autre Distribution)


Camarao Orkestra - Camarao Orkestra (Clapson Records/L'Autre Distribution)

C'est à Paris, ville-étape située sur la route des grooves afro-brésiliens, entre Addis Abeba et Rio de Janeiro, que la formation Camarao Orkestra prend forme en 2008 autour du trompettiste Paul Bouclier. Largement influencés par les rythmes syncrétiques du Brésil, les 10 musiciens élaborent un savoureux mélange fusionnant les sonorités jazz/funk des années 70 aux traditionnels Maracatu du nordeste, Afoxé et autres Samba… Doté d'une section cuivre puissante et de percussionnistes aguerris à l'atabaque, à la cuica et au berimbau entre autres instruments propres aux rondes de capoeira ou aux rites religieux du Candomblé, l'Orchestre Crevette exprime à travers 8 titres syncopés et endiablés sa vision captivante du groove. Un groove qui swing dans "Saidera" ou qui se pare d'accents afrobeat dans "Afroben" et éthiojazz dans "Baravento".

A noter la présence d'une assise rythmique plutôt funky composée du bassiste Virgile Raffaëlli, du claviériste Florian Pellissier et du guitariste Farid Baha. Nous remarquerons aussi la prestation sensuelle des chanteuses Amanda Roldan et Agathe Iracema.

Ce premier opus au titre éponyme parait chez Clapson Records et mérite toute notre attention car il ne reprend pas les sempiternels relents festifs "sauce brésilienne" que nous servent souvent les batucadas et autres collectifs de rue, en effet Orkestra Camarao s'efforce de bâtir un répertoire original et réfléchi, une identité musicale singulière…