jeudi 30 octobre 2014

Théophilus London – Vibes (Warner Bros. Records)


Théophilus London – Vibes (Warner Bros. Records)

Malgré tous ses dehors blingbling et son orgueil démesuré, le patron mégalo de G.O.O.D. Music Kanye West a vu juste en s’intéressant au nouveau projet du jeune prodige originaire de Trinidad, Théophilus London. En effet le rappeur newyorkais publie Vibes, un disque aux influences multiples, allant de la soul anglaise façon Omar dans le sublime Water Me, à la synthpop de Neu Law, en passant par le hip-hop alternatif de Can’t Stop, le new jack swing façon Boyz II Men de Figure It Out, l’électro french touch de Tribes et la pop’n’B expérimentale façon Prince de Heartbreaker ou Need Somebody.

L’artiste affirme avoir passé deux années à réaliser ce second disque, un long chemin parsemé de tâtonnements et de questionnements, mais récompensé au final par un son classieux plus abouti et prometteur.

Théophilus a réuni autour de lui des invités intéressants puisque la légende de la Motown Léon Ware y côtoie des signatures de Ninja Tune Jessie Boykins III et de Bromance Le Club Cheval et Brodinski, le producteur exécutif K.W. en personne, la chanteuse française Soko, ou encore Devonte Hynes de Lightspeed Champion ! On note aussi la participation du couturier Karl Lagerfeld pour la direction artistique… Rien que ça !

Vibes est une réussite difficilement définissable tant son instigateur a les idées larges. Les conseils de Kanye l’ont aiguillé vers un flow plus mélodique, des sonorités plus fashion et pop, mais surtout vers un art de l’entertainment plus averti ! Espérons juste pour le futur, que Theophilus n’ait pas définitivement vendu son âme au diable.
 

mercredi 29 octobre 2014

Djessou Mory Kanté – River Strings – Maninka Guitar (Sterns Music/Harmonia Mundi)


Djessou Mory Kanté – River Strings – Maninka Guitar (Sterns Music/Harmonia Mundi)

16 années et un tas de tournées et de collaborations se sont écoulés depuis la parution du premier opus du guitariste guinéen Djessou Mory Kanté. L’artiste est issu d’une longue lignée de griots au même titre que les célèbres familles Diabaté ou Kouyaté. Intitulé Guitare Sèche, on pouvait y écouter le musicien virtuose interpréter quelques grands classiques du répertoire mandingue. Avec River Strings – Maninka Guitar, le petit frère de l’illustre Kanté Manfila (RIP) poursuit sa célébration de la tradition musicale de l’Afrique de l’Ouest en nous offrant 13 titres instrumentaux enjoués et envoutants parmi lesquels on retrouve Coucou et Laban, composés par les chantres de la culture mandingue, feu son grand frère et l’illustre Salif Keita. C’est chez ce dernier d’ailleurs, au studio Moffou à Bamako, qu’il enregistra ce disque.

lundi 27 octobre 2014

Ben Sidran – Blue Camus (Bonsai Music/Harmonia Mundi)


Ben Sidran – Blue Camus (Bonsai Music/Harmonia Mundi)

Le jazzman américain Ben Sidran, diplômé en littérature anglaise et docteur en musicologie, nous livre son nouvel opus intitulé Blue Camus. Faisant suite à plus d’une trentaine de disques parus depuis 1970 en tant que sideman ou leader, le pianiste, professeur, journaliste et animateur télé/radio s’attèle à nous présenter un projet inspiré du roman L’Etranger de l’écrivain français Albert Camus (Blue Camus), de la fable La Ferme des Animaux de l’anglais George Orwell (‘A’ Is For Alligator) et du recueil de poèmes Poète à New-York de l’espagnol Frederico Garcia Lorca (The King Of Harlem). Le choix de ses 3 œuvres majeures de la littérature engagée datant du début des années 40 (Ben naquit un 14 aout 1943) indique sans équivoque les prises de positions du personnage qui reprenait en 2009 les textes de Bob Dylan dans Dylan Different ou qui expliquait en 2012 dans son livre There Was A Fire : Jews, Music and the American Dream, l’influence juive dans la musique américaine !

Lui qui a collaboré avec les plus grands noms du jazz et du rock américain, des Rolling Stones à Wynton Marsalis en passant par Steve Miller (Ben est d’ailleurs l’auteur d’un de ses tubes Space Cowboy), Eric Clapton, Gill Evans, Bobby Mc Ferrin ou encore Herbie Hancock, enregistre avec Blue Camus un disque aux tonalités jazz/blues, influencé par le pianiste/chanteur Mose Allison connu pour sa fusion entre la musique aux trois accords et le be-bop.

Notre érudit, loin de vouloir faire une musique intellectuelle et inaccessible, trouve donc sa voix et sa voie « en racontant des histoires sur de la musique qui groove ». En effet le gentleman charmeur entouré pour l’occasion de son fils Léo à la batterie et des frères Peterson, Ricky à l’orgue hammond et Billy à la basse, parle, chante, improvise et joue avec les mots et les idées non sans humour, et toujours avec un esprit critique aiguisé. Il ballade sa voix suave et attachante sur des mélodies jazzy où swing et décontraction font bon ménage.

Dans Wake Me It’s Over, allusion aux aventures d’Alice au Pays des Merveilles de l’ambigue Lewis Carroll, Ben Sidran se fait crooner délicat à l’instar d’Al Jarreau tandis que sur Dee’s Dilema du pianiste Mal Waldron (unique reprise de l’album) il rend hommage au saxophoniste Jackie McLean avec un groove ravageur et communicatif.
À 71 ans, Ben Sidran, artiste complet et discret, parvient une nouvelle fois à nous surprendre par sa jeunesse et sa fraîcheur !


mercredi 22 octobre 2014

Mr Twin Sister – Mr Twin Sister (Twin Group/Modulor)


Mr Twin Sister – Mr Twin Sister (Twin Group/Modulor)

Véritable petit bijou sonore nous projetant, le temps de ses 37 mn, dans une nuit coquine éclairée par une boule à facettes et un stroboscope, ce second album au titre éponyme des américains de Twin Sister, rebaptisé Mr Twin Sister, abandonne les sonorités indie-pop du précédent In Heaven pour explorer de nouveaux univers musicaux faits d’instants ambient (Medford et Crime Scene), chill out (Sensitive), quiet storm (Rude Boy et Blush), cosmic house (In The House Of Yes), electro disco (Out Of The Dark) et dark techno (Twelve Angels)…

N’ayant pas connu le groupe avant leur renaissance sous l’entité Mr Twin Sister, je découvre sur le tard la mutation opérée par les 5 musiciens de Long Island depuis leur dernier effort paru en 2011. Orientés dream pop et psyché pop, la chanteuse Andréa Estella, le bassiste Gabe d’Amico, le claviériste Dav Gupta, le guitariste/chanteur Eric Cardona et le batteur Bryan Ujueta ont opté cette fois-ci pour une identité musicale plus aquatique et complexe, où le R&B nébuleux de Sade côtoie le trip-hop de Lana Del Rey sur fond d’électro au groove sensuel et hypnotique.

Une belle découverte !


 

mardi 21 octobre 2014

AMP Live – Headphone Concerto (Modulor)


AMP Live – Headphone Concerto (Modulor)

Le Dj/producteur californien Anthony Anderson alias AMP Live publie son second opus solo baptisé Headphone Concerto. Il y élabore un univers musical singulier, flirtant autant avec le hip-hop et l’électro que la musique classique. La moitié de Zion I, qu’il forme avec le MC Zumbi depuis 2000, fait grand bruit lorsqu’en 2008 il revisite In Rainbows de Radiohead, obtenant non sans mal l’autorisation de mettre gratuitement à disposition du publique ce fameux projet de remixes intitulé Rainydayz.

Headphone Concerto se distingue par des mariages sonores inattendus, passant en effet des arrangements symphoniques de la violoncelliste Rebecca Roudman (des Dirty Cello) distillés notamment dans Remembrance et Flight, aux reflets cuivrés ravageurs de Last Wall, en passant par les sonorités dubstep de Brass Knuckles ou 100,000 Watts

Le beatmaker accorde une importance particulière au chant, on apprécie la participation enivrante des chanteuses Saint Tiimbre sur un Run Back nébuleux, Ill-Esha sur un Are We Dancing aux couleurs R&B ou encore Povi Tamu sur un Hustle 360 très néo soul. Les voix masculines sont aussi misent à l’honneur comme celle d’Eric Rachmany qui, sur Signs, nous livre une prestation suave et hypnotique. Les invités sont pléthore puisque que l’on note à leur côté la présence des rappeurs Planet Asia, The Grouch & Eligh, Anya & Prof, Sol, Dom de Big Gigantic ou encore The Reminders

Bel effort !

vendredi 17 octobre 2014

Monogrenade – Composite (Atmosphériques)


Monogrenade – Composite (Atmosphériques)

Si l’on devait définir la musique du groupe montréalais Monogrenade, un mot viendrait à l’esprit et c’est d’ailleurs le titre de leur deuxième opus, Composite.

En effet la formation électro-pop parvient à déployer, malgré l’usage exclusif du français, une force mélodique unique. Utilisant des synthés et boîtes à rythmes vintage alliés à une basse polymorphe (François Lessard) et une batterie tranchante (Mathieu Colette), Jean Michel Pigeon et ses musiciens nous livrent 10 chansons somptueuses, hypnotiques et énergiques, piochant leurs influences dans le rock indé (Labyrinth) et le folk-pop-alternatif (J’attends), tout en s’élevant par moment vers un rock planant voire cosmique auquel s’ajoute les arrangements de cordes raffinés et majestueux de Marianne Houle, Ingrid Wissink et Julie Boivin (Composite, Phaéton, Le Fantôme). La voix suave et brumeuse du leader, claviériste et guitariste, nous raconte la complexité de l’homme et de ses rapports avec autrui (L’aimant) et son environnement (Metropolis).

Composite est plus rythmé et plus théâtrale que leur précédent Tantale, il explore différents univers musicaux et croise les sonorités électroniques, électriques et acoustiques sur des mélodies pop fraîches et entraînantes (Cercles et Pentagones, Tes Yeux).

jeudi 16 octobre 2014

Marina Quaisse – The Legend Of Sirena (Phonosaurus Records)


Marina Quaisse – The Legend Of Sirena (Phonosaurus Records)

La violoncelliste française Marina Quaisse a débuté sa carrière dans le répertoire classique, ayant fait ses armes en orchestre symphonique et orchestre de chambre. En 1999, elle s’investie au sein d’un projet trip-hop baptisé Aktarus qui ne durera pas, mais ses rencontres avec les producteurs Wax Tailor puis plus tard Mattic influenceront définitivement sa palette musicale. Intégrant les vibrations et la grâce de son instrument à des productions abstract hip-hop aquatiques et hypnotiques, la jeune compositrice nous offre enfin son premier opus intitulé The Legend Of Sirena, publié sur le label quebeco-franco-suisse Phonosaurus Records. Les beats soignés qui font penser ici aux productions de Dj Krush et là à celles de Dj Cam, servent d’écrin aux lamentations poétiques du violoncelle de Marina rejointe dans Dance With The Devil et Good Times par l’excellent rappeur Mattic. L’histoire commence un 8th of July, lors d’un embarquement (Boarding Time), le personnage principal est une sirène ensorceleuse voulant attirer un marin séduit au fond de la mer (The Torning Sound). The Legend Of Sirena nous raconte sa descente dans les profondeurs d’une eau calme et paisible (In a Peaceful Deep Water), un bref interlude amoureux et joueur cède ensuite sa place aux regrets et à la nostalgie d’une surface lumineuse et familière (Nostalgia) …