vendredi 30 août 2013

Jamie Lidell - Compass (Warp Music)


Jamie Lidell - Compass (Warp Music)

La première impression est assez surprenante voire déroutante, il ne ressort de Compass que le fatras bruyant et démembré d'une soul désarticulée, désossée et chancelante...Puis la folie de Jamie nous gagne rapidement, et ses ritournelles obsédantes finissent par tourbillonner et finalement s'orienter vers une seule et même idée LA LIBERTÈ. Après Jim en 2008, le double de Jamie en plus baroque et bricoleur n'a plus lieu d'être, Mr Lidell semble avoir enfin concilié sa double personnalité. Jamie est donc de retour avec un album funky dense et riche. Deux ans de recherche, de rencontres et d'échanges lui auront été nécessaires pour accoucher de cet oSni (Jamie est un habitué des objets soulfunkelectropsyché non identifiés)...Jamie Lidell est un fou qui se nourrit de tout et recrache tantôt un gospel éclaté, tantôt une nusoul onctueuse et sucrée, ici un clin d'oeil aux Jackson Five et là un blues vrombissant, une berceuse alanguie puis une pop explosive et sombre. Bref, Jamie a glissé dans ce Compass le meilleur de lui-même et s'est entouré de sacrées pointures pour donner forme à ce bordel confus, grinçant gravé en clair/obscur, on y retrouve en effet Feist, Gonzales, Beck, Chris Taylor (des Grizzly Bear), James Gadson (batteur de Bill Withers et Quincy Jones...) et bien d'autres. Eparpillée et étourdissante, la soul WARPienne de Jamie cherche oreilles à défleurer.

JACK DE MARSEILLE – INNER VISIONS (Wicked Music/Module)


JACK DE MARSEILLE – INNER VISIONS (Wicked Music/Module)

Enfant du pays de la bouillabaisse et des calanques, Jack est l’un des Djs frenchy les plus respectés dans l’univers très spécialisé des musiques électroniques. Depuis ses débuts remarqués, notamment lors de la première rave des transmusicales de Renne en 1992, sa touche et ses penchants technoïdes l’ont emmené dans les places chaudes du monde entier. Sa facette fashion héritées des soirées house dans les 90’s, merveilleuse époque des bandanas et smileys,  a aussi contribué à lui forger une réputation sans bémol où éclectisme, technique et écoute du dancefloor contribuèrent à l’équilibre efficace et ravageur de ses sets. Deuxième opus en presque 20 ans d’activisme, Inner Visions fait suite à Free My Music sorti en 2002. Jack de Marseille y distille une musique deep enivrante aux accents techno bien sûr, dub aussi, mais pas que… En effet ses premières amours, l’électro funk héritée des 80’s et l'énergie ancestrale de la percussion sont palpables sur l’ensemble des titres, elles se mêlent à l'envoûtante poésie des sonorités synthétiques et renouent l’auditoire avec la house originelle de Chicago et Détroit. Moins frénétique et davantage intimiste, Jack de Marseille nous invite à partager sa définition de la musique autour d’une danse envoûtante au pays du groove. Tantôt downtempo tantôt plus percussive, les visions du patron de Wicked Music se prêteront à toutes les ambiances et à toutes vos humeurs…

IZABO – « Super Light » (ROY Music/EMI Music France)


IZABO – « Super Light » (ROY Music/EMI Music France)

Isabeau d’Anjou se transformait en faucon le jour et aimait Etienne de Navarre qui lui se métamorphosait en loup la nuit, un amour impossible et pourtant ! Izabo passe du disco au rock underground des 60’s, flirtant avec le crachin punk sur un lit de gourmandises orientales, une rencontre improbable ? Enregistré en 2 jours pour garder l’énergie du live où ils excellent et affolent, leur second opus intitulé « Super Light » prouve que les murs de béton ne sont pas si hermétiques et que la culture trouve toujours une voie. Israéliens de confession juive, les membres du quatuor emmenés par le charismatique Ran Shem Tov (chanteur, guitariste et producteur) et son amie Shiri Hadar, déversent une énergie jouissive et festive sur des titres survoltés à l’efficacité enivrante et vitaminée telle l’ouverture tubesque et premier single de l’album « Slow Disco ». Une voix naziarde, agaçante et percutante, qu’on aime détester, des gémissements, des guitares rock saturées tantôt planantes tantôt punchy, de puissantes lignes de basse disco funk (Jonathan Levy) et les prouesses d’une batterie fracassante (Nir Mantzur) …Bref, les ingrédients d’un succès incontournable sur les dancefloor. Ambiance psyché-déjantée assurée !

Iza – An Partan (Akord’/Harmonia Mundi)


Iza – An Partan (Akord’/Harmonia Mundi)

« Créole », rien que le mot est de toute beauté, évoquant exotisme, métissage, tropique, épices et couleurs… Pourtant la créolité a souvent mal été assumée, comme un accent trop marqué que l’on veut atténuer ou une histoire trop sombre que l’on souhaite oublier… Mais comme le dit si bien Danyèl Waro, chantre de la tradition musicale réunionnaise : en partant de sa culture on ne peut que tendre vers l’universel. Iza a mis du temps à assimiler ce concept et a accepter fièrement sa filiation, elle qui est originaire d’une petite enclave montagneuse au cœur du massif du Piton des Neiges, perchée à 3000 m d’altitude dans le territoire des « Yab » (petits blancs des hauts). C’est le chanteur Davy Sicard qui va patiemment l’accompagner dans son évolution artistique à la recherche de ses racines que la peur des moqueries lui a fait camoufler. Deux disques naîtront de cette collaboration déterminante faisant du Maloya (« blues de la canne ») son art de vivre. « An Partan », nouvel opus de la chanteuse réunionnaise, est entièrement interprété en créole, Iza a participé à l’ensemble de sa conception, tant dans l’écriture que dans les arrangements. Les 12 titres reflètent enfin une culture métisse assumée et affichée, alliant les sonorités brésiliennes et africaines aux traditions insulaires de l’archipel des Mascareignes. Maloya et Sega demeurent évidemment sa principale source d’inspiration mais, accompagnée de Didyé Kérgrin et de l’ami fidèle Christophe de Montagu, la chanteuse a su aussi livrer sa vision propre de la culture et de la société réunionnaise en nous offrant de sa voix douce et parfaitement maîtrisée un très intimiste « disque-voyage ». A noter la magnifique reprise du titre  « Kafrîn » de Nathalie Natiembé, contant l’histoire d’une femme créole fière et forte ayant la vie dure et pour qui « Son kri de gèr sé son pwin férmé wayo ».
 
extrait d'un autre album "Cilaos"

Intervie Stéphane Pompougnac pour la sortie de "Hôtel Costes XI"


Interview Stéphane Pompougnac :

Stéphane Pompougnac nous revient avec le XIème volet de sa série "Hôtel Costes". Toujours aussi classieuse et éclectique, sa touche ne cesse de séduire un auditoire fidèle et exigent. Il nous livre quelques détails sur sa vie et son activité au sein du label Pschent.

 

1) Emploi du temps d'une journée type de Stéphane Pompougnac (du lever au coucher)


Je commence toujours ma journée par un jus d’orange pressé vers 7h30, avant d’emmener mes enfants à l’école. Plutôt 14h les lendemains de live…
J’allume la musique dans le salon avant de prendre ma douche.
Je check mes mails et mon agenda.
Déjeuner entre amis.
Je passe généralement l’après-midi en studio à écouter les derniers morceaux reçus ou à composer.
Je récupère les enfants à l’école.
Je dîne en famille avec ma femme.

Tout cela est bien sûr très différent quand je suis en tournée…


2) Dans cette suractivité et parmi ces déplacements continuels, as-tu encore le temps pour une véritable écoute de la musique (la tienne et celle des autres) ?


Bien sûr, c’est même une priorité ! Tous les gadgets modernes me facilitent d’ailleurs la tâche.


3) Et d'ailleurs quelles musiques écoutes-tu ? quel genre pour quel moment ?


Je suis très éclectique. Mes coups de cœurs en ce moment sont Bjork, Shazz, et Variety Lab. Je passe la journée avec de la musique dans les oreilles, il m’est difficile de définir à quel moment j’écoute tel ou tel type de musique…


4) Quels sont tes critères de séléction lorsque tu prépares une tracklist pour une compilation Costes ? Es-tu entièrement libre dans tes choix ?


Je fonctionne vraiment au coups de cœur, tout en cherchant à rester fidèle à l’esprit  des établissements Costes. Aucune contrainte particulière cependant. On reçoit une cinquantaine de CD par mois, ce qui me laisse pas d’heures d ‘écoute à effectuer…



5) Tries-tu toi même les sons qui te parviennent ou as-tu un "assistant" qui pré-sélectionne et dégrossit le tout ?

Je travaille en étroite collaboration avec le directeur artistique de Pschent, Charles Shillings, et de mon complice Marc Ritchie.




6) L'art du mélange (mix des morceaux) est-il primordial pour toi, car dans tes compiles tu sembles vouloir t'effacer en juxtaposant les plages sans user d'effets, de nappes sonores et autres artifices...Et lors de tes sets en club comment envisages-tu l'art du mix ?


Seule la onzième compilation est ainsi, les autres étaient mixées. Pour ce qui est des sets en club, le principal pour moi est de prendre mon pied et de voir que les autres le prennent aussi en écoutant ma musique.


7) Si tu devais choisir un morceau de ton dernier opus, XI° de la série, lequel serait-il ? Pourquoi ?


Très certainement Shazz, avec leur album « Mirage ». Cet artiste sait me faire voyager et possède une identité musicale originale que j’adore.


8) Dans ton activité de DJ, quel moment d'une soirée préfères-tu pour jouer ? pourquoi ?


Chaque moment  d’une soirée à son importance. Le début est primordial puisqu’il faut pouvoir mettre les gens dans l’ambiance, chauffer la piste. Une fois que la machine est lancée, on ne fait plus vraiment attention est tout se déroule naturellement. Mais le monent le plus agréable est certainement quand la fête bas son plein en plein milieu de la nuit !

9) Le plus beau souvenir d'une performance, où, quand et pourquoi ?


Les soirées privées en générales sont toujours magiques car elles représentent l’aboutissement d’un rêve de gamin. Etre entouré de stars et de personnes que l’on admire et qui, l’espace d’une nuit, vous écoutent faire ce que vous faites le mieux…

10) Le pire souvenir de soirée ? (un bide ou autre)


Je me suis une fois retrouvé dans une soirée très étrange à Moscou, ou je me suis finalement demandé si je n’étais pas « hottage » de la soirée... Ça s’est finalement bien terminé.

11) Tu mixes avec quel matos ? (en général)


Pioneer CDJ 1000 en général.

12) Comment se passe la promo d'une compile Costes ?


C’est un rythme soutenu, mais c’est toujours agréable d’être mis en avant et de parler de ce que l’on aime.


13) Retour sur ta carrière, as-tu des regrets ou des remords ?

Aucun ! Comment avoir des regrets lorsque l’on mène la vie dont on a toujours rêvé… ? J’ai un travail que j’aime, le succès, et une famille formidable… !





14) Projection vers l'avenir, tes futurs projets (dans la musique ou autre) ?

Je termine ma tournée internationale qui se prolonge à priori jusque Janvier, mais je travaille aussi sur d’autres projets dont il est encore un peu trop tôt pour en parler pour l’instant….

Interview Spleen pour la sortie de "Comme Un enfant"


Depuis maintenant quelques années on croise Spleen au détour d’un plateau TV, sur les planches d’un théâtre ou en concert, puis dernièrement dans les bacs avec son dernier opus « Comme un enfant » dont sont issus les singles « Tu l’aimeras » et « Love Dilemme. Personnage sincère, accessible et sensible, Spleen se livre et nous explique très simplement la genèse de son dernier album ainsi que son parcours artistique, il nous fait alors entrevoir quelques bribes de la personnalité de ce futur grand monsieur de la chanson française…

 
 
Pour quelles raisons as-tu choisi ce nom d’artiste « Spleen » ?

Spleen : Mélancolie sans cause apparente.

Spleen est un mot qui a une connotation émotionnelle assez forte et qui caractérise bien ma personnalité ainsi que ma démarche artistique…En plus c’est un mot très mélodieux, très planant, il marque les esprits et c’est justement ce que je veux : rester gravé dans les têtes et donner des émotions.

Que s’est-il passé depuis le premier album sorti en 2005 « She was a girl » ?

Plusieurs projets dans la musique, le théâtre, l’écriture et aussi des rencontres…J’ai participé aux albums de Cocorosie, j’ai aussi joué dans deux pièces de théâtre, dans un téléfilm puis j’ai rencontré des musiciens exceptionnels comme Sébastien Martel ou Pauline Croze, Laurent Garnier et bien d’autres, qui m’ont fait comprendre qu’il fallait que je m’investisse davantage dans la composition et les arrangements de mes morceaux. De là, j’ai rencontré deux pointures de la production Marc Lumbroso et Marlon B.

Quel est le point de départ de « Comme un enfant », quel est le détonateur qui t’a poussé à écrire de cette manière et à traiter de ces thèmes ?

C’est mon enfance ! Je ne savais jamais quoi répondre à cette question, puis en y pensant sérieusement la réponse est apparue clairement, mon instinct musical vient de ces années et ma manière d’appréhender la musique aujourd’hui est toujours aussi instinctive, ça ce fait toujours avec les moyens du bord…

Quel cap as-tu franchi avec ce deuxième album ?

Je ne crois pas encore avoir l’âge de raison, mais j’ai acquis une certaine maturité : le fait d’accepter de me faire aider par exemple, d’être entouré par des professionnels et des personnes intègres qui me guident afin de me faire toucher un public plus large sans pour autant me fourvoyer dans de mauvais projets.

Tes textes racontent-ils des histoires et décrivent-ils des sentiments vécus par Pascal Oyong-Oly (ton vrai nom) ou bien sont-ils écrits pour un rôle, celui de Spleen ?

La réalité couchée sur du papier n’est pas suffisante à mon goût, il faut la sublimer comme au cinéma. Je cite souvent en exemple cette anecdote : avant il y avait au sein des orchestres classiques et des fanfares militaires un musicien pour la caisse claire, un autre pour la grosse caisse et encore un pour les cymbales…etc. puis l'apparition de la batterie (en tant que regroupement de ces divers instruments), directement liée à la naissance du jazz, a changé la donne et a élevé cet instrument au statut de soliste. Pour en revenir à mes textes, ça part d’une histoire racontée ou vécue puis je la transcende afin de décrire une réalité plus belle, plus pure, plus intense, plus profonde…

Tu as parlé du jazz, quelles sont tes influences ?

Le jazz, la soul…j’admire les musiciens comme le saxophoniste Steve Coleman et notamment ses projets hip-hop avec les Metrics, ou encore Ornette Coleman et son Free Jazz…je me sens d’ailleurs très proche de la trompette car elle permet de traduire toute une gamme d’émotions que j’essaie moi d’obtenir grâce à un travail sur les différentes textures de ma voix.

On remarque tes influences hip-hop notamment sur ton premier album, quels sont donc les artistes qui t’inspirent ?

Cela dépend de mes travaux en cours, de mes rencontres, de mes découvertes…Pour « She was a girl », mes références étaient le hip-hop des Roots, et la new-soul de D’Angelo. Sur le second album « Comme un enfant », ce sont les artistes de la grande variété française comme Jacques Brel ou ceux, plus jeune, comme Mathieu Boogaerts (pas assez connu à mon goût) qui m’ont intéressé…Puis il y a « Off The Wall » de Mickael Jackson sorti en 1979, album fondateur pour moi, où l’on sent toute l’énergie des musiciens mise au service d’une voix. La production est parfaite, le son est chaud…

Tes derniers CDs achetés ?

L’album « Third » de Portishead, leur meilleur à mon goût, et « The Movie » de Clare & The Reason qui est une jeune artiste pop à la voix jazzy reprenant les ambiances de film des années 30.

Tes derniers concerts en tant que spectateur ?

NTM évidemment ! et Hugh Coltman, un artiste faisant parti de mon collectif « The Black & White Skins ».

Interview Sandra Nkaké pour la sortie de "Mansaadi"


Sandra Nkaké est une femme entière, sincère, talentueuse et généreuse. Sa musique, son énergie et sa sensibilité s’offrent enfin à l’auditeur sous la forme d’un magnifique premier album intitulé « Mansaadi ». Son parcours, ses influences et sa philosophie de la vie nous donnent quelques indices laissant entrevoir la personnalité et le tempérament d’une artiste spontanée, dont la fraîcheur est un présent qui réchauffe les cœurs en ces temps de crise, de froid, de pluie et de morosité. « La petite mère » se confie sans réponses toutes faites ni détours, sa franchise nous rapproche davantage du lien qu’elle tisse entre ses histoires : « l’amour fraternel, maternel, charnel et amical ».


1) Après la scène, ton projet perso abouti et rencontre un franc succès (public et critique), quelles sont tes impressions avec le recul?

Le recul !  Je ne sais pas encore si j'en ai assez (lol!), mais je dois dire que je suis heureuse que "Mansaadi" soit apprécié à ce point ! J'aime cet album pour ce que nous y avons tous mis dedans ! C'est une aventure "à plusieurs" ! Les musiciens qui m'entourent depuis quelques années y ont tous participé avec comme envie de faire sonner chaque chanson comme elle se déroulait dans ma tête !!! Une chance, réellement !
Donc, je suis ravie...



2) Comment t'es-tu construite, artistiquement parlant ? (autodidacte, école de musique…)

Je suis totalement autodidacte: j'ai appris en écoutant beaucoup de musiques, des chanteurs et chanteuses de styles différents mais qui me procuraient la même sensation: les poils qui se hérissent !


3) Quels sont les artistes qui t'ont motivé à chanter dans tes débuts ? Et d'ailleurs parle-nous de tes débuts.

Ce sont surtout les musiciens que j'ai rencontré qui m'ont motivée à chanter de manière professionnelle ! J'ai toujours "chantonné" sans jamais imaginer que j'en ferai un jour mon métier ! Chanter comme remède, comme soutien pour mieux respirer, moi qui malgré un tempérament assez fort suis assez pudique et timide par moment !
Mes débuts !? J'étais en DEUG d'anglais à la Sorbonne (LEA) pour devenir professeur, et une copine de l'époque m'entendant chanter dans les couloirs m'a proposé d'aller passer une audition pour un groupe de funk, des amis à elle.
J'ai donc pris rendez-vous avec les membres du groupe Marlon B (producteur pour Sebastien Tellier, -M-, Mozesli, Hugh Coltman, Spleen...) et David Taieb alias DJ Shalom (-M-, Mozesli, Shalark...) et à ma grande surprise ils m'ont prise dans le groupe ! Nous avons beaucoup travaillé en studio mais sans faire de concerts car je n'étais pas prête à l'époque !
Assez rapidement, 1994?, j'ai rencontré toute une "niche" de musiciens talentueux et généreux !!! Gérald Toto, 13NRV, Juan Rozoff, Cheick Tidiane Seck... qui m'ont fait partager leurs musiques, leurs scènes ! Et depuis les rencontres ont fait naitre d'autres rencontres: Booster, Les Troublemakers, Ji Mob, Karl The Voice, BlackJoy, Mark de Clive-Lowe, M Nahadr, tous ayant comme point commun de faire de la musique avec beaucoup de cœur, d'ingéniosité et d'esprit d'exploration ! Tout ce que j'aime !!!



4) Quels sont les tendances musicales qui te branchent actuellement et vers lesquelles tu te sens proche ?
Tendances, euh, je ne sais pas si j'aime une tendance en particulier !!! J'aurais du mal à choisir entre Alice Russell, Imani Uzuri, Gnarls Barkley, Saul Williams, David Walters, Khalid K !
J'aime les explorateurs-trices !



5) Quels sont les moments forts de ta carrière ?
Je dirais qu'il y en  a plusieurs ! Chaque rencontre est importante parce qu'elle me fait ouvrir des portes que je ne pourrais pas ouvrir seule, ou moins rapidement !
Mais je dirais...Mon premier concert "solo" au China Club, à l'époque où Swannie Vincendon programmait ! Avant que la salle ne soit revendue aux Hôtels Costes ! Swannie m'a programmé alors qu'elle n'avait écouté que des démos dont le son n'était pas terrible, mais elle m'a fait confiance ! J'avais déjà pas mal d'années de scène derrière moi mais je dois dire que ce soir là (décembre 2005) j'ai eu une trouille pas possible ! J'avais envie de disparaitre et me voyant dans un état proche de la liquéfaction, mon bassiste, Guillaume Farley ( Naturalibus) m'a dit qu'avec lui à mes côtés il ne pouvait rien m'arriver ! Qu'il me suivrait jusqu’au bout du monde !!! Il m'a rassurée et poussée à être moi de plus en plus ! Comme tous mes musiciens d'ailleurs !



6) En tournée pour la promo de « Mansaadi », décris-nous une journée type de Sandra Nkaké.

Les journées se suivent mais ne se ressemblent pas ou presque !
Quand j'ai la garde des enfants, je me lève à 07h, je les pose à l'école pour 08h30 (après un trajet en bus puis en métro),  je vais boire un café Chez Prune (Canal St Martin) puis je vais à mes rendez-vous !
Aujourd'hui c'était comme ça ! Ensuite je suis allée répéter pour un concert où j'étais guest de Naturalibus de 13h à 16h, j'avais ensuite rendez-vous à 17h au Centre Georges Pompidou pour une interview avec live (machine-voix) pour France Culture et à 20h30 il fallait être prête pour le concert.... Je viens seulement de rentrer et il est.... 02h00 !
Demain je suis en concert à Ivry, donc balance à 16h, mais avant je récupère les livrets du premier trimestre de mes enfants à 11h !
Une journée type se partage entre mon "travail "de maman et de chanteuse, parfois j'ai la sensation de manquer de sommeil (sensation juste!) Mais je suis heureuse car je défends un projet qui me tient à cœur !



7) Comment est né « Mansaadi » ? (point de départ d'un premier album)

Il a fallu plusieurs concerts sous mon nom au China Club pour me dire que c'était le bon moment ! Après une tournée de deux ans avec une pièce musicale, "Fantômas Revient" avec Romane Bohringer, Thierry Stremler ...( mise en scène par Pierre Pradinas), je n'entendais plus que les titres de la pièce et "ma" musique me démangeait ! C’est donc assez naturellement que nous avons monté le répertoire ! Les chansons étaient là en filigrane, et je leurs ai laissé le temps de faire leur chemin dans ma tête ! Nous sommes entrés en studio en mars 2007 (studio Pigalle) ! Et nous voici !
Mais il est vrai que le décès de ma mère, Lucie Nkaké, a été un accélérateur ! A son "départ" j'ai compris la nécessité de toujours aller de l'avant car la Vie qu'il nous est donnée de goûter est.....brève ! Mangeons là, est mon leitmotiv !



8) « La Mauvaise Réputation » de Brassens est un titre fort qui engage fortement l'interprète, es-tu une artiste engagée ? Quelles sont les causes qui te tiennent à cœur ?


Georges Brassens était un des chanteurs, auteurs, musiciens, hommes du monde que ma mère aimait le plus et nous l'avons beaucoup écouté mon frère et moi dès notre plus jeune âge ! Ses mots, son humour, sa tendresse et sa grande humanité m'ont toujours frappée, même quand je ne comprenais pas toujours ce qu'il voulait dire ! La reprise s'est faite toute seule: j'avais une "boucle" de voix dans mon RC50, et les paroles de cette chanson sont venues assez vite !
Un auteur que l'on n'aura de cesse de chanter encore dans plusieurs siècles !
Suis-je engagée !!!? Je ne le sais pas, par contre, je sais que si je peux donner mon énergie à des projets auxquels je crois, je fonce !!! J'ai chanté il y a peu pour "Les Amoureux au ban public", association de la Cimade qui milite pour le droit des couples franco-étranger à vivre en famille en France ! Nous avons (Tiken Jah Fakoly, Ayo, Renan Luce, Sergent Garcia , les Boukakes et moi) participé à un concert au Zénith de Montpellier pour manifester notre soutien !
Un concert le 14 février au Cabaret Sauvage est en train de se mettre en place....et il y a un projet de chansons de Brassens revisitées par Rodolphe Burger et beaucoup d'invités ( Jacques Higelin, Rokia Traoré, Spleen et moi même) qui devrait voir le jour pour cette occasion !
Il y en a d'autres ! Drepan-Hope par exemple, qui lutte pour que l'information circule sur une maladie peu connue, la drépanocytose !
Je suis heureuse de pouvoir apporter énergie et joie pour que d'autres se sentent mieux, ne serait-ce que l'espace d'un concert ! Je ne sais pas si cela fait de moi quelqu'un d'engagée? Mais tant que j'aurai du souffle et de l'énergie, je ferai de mon mieux pour la partager avec des personnes qui défendent la vérité et le partage !



9) Toujours sur ce morceau, l'idée du beat-box, des loops…comment t'est elle venue ? Qui t'as épaulé ?

Je n'avais pas prévu de faire cette reprise ! C'est la musique qui a appelé ces mots ! Mon RC50 me permet de stocker instantanément toutes les idées qui me passent par les oreilles ! J'avais enregistré un beat box et les mots de Brassens sont venus immédiatement ! Quelques jours plus tard, j'ai appelé Booster, producteur assez extraordinaire en plus d'être un ami et un compagnon de route, et il a réussi à matérialiser ce que j’entendais.



10) As-tu d'autres reprises en tête ? Quels titres et de qui ?

Oui, j'en ai, une de Fela Kuti qui s'appelle "Upside down", un morceau de Prince !
J'ai chanté il y a peu avec Vincent Théard (réalisateur de l’album), en chapelle (piano-voix- acoustique) un morceau de Francis Poulenc qui est une mise en musique d'un poème de Paul Eluard..."Une ruine coquille vide".... J'adorerai mettre notre version sur un disque !
Beaucoup d'envies, maintenant il me faut un peu de temps pour toutes les concrétiser.



11) Lorsque tu écris, quels sont tes sujets de prédilection ? En français ou toujours en anglais ? Le français sonne-t-il mal sur des rythmes Nusoul ?

Le français est une langue merveilleuse et qui sonne, à mon sens sur tous les styles ! Mais la question était ailleurs !
L'anglais a été la langue de l'intime, des émotions, du vrai...à la maison! Et c'est assez naturellement que les textes sont "sortis" ! Qu'il s'agisse de ma vie ou de ce qui arrive aux personnes qui se confient à moi, je parle de situations dans lesquelles je me reconnais ! Mon moteur étant l'Amour sous toutes ses formes, il est donc mon sujet principal: fraternel, maternel, charnel, amical!
Les textes en français abordaient des sujets pour lesquels je n'avais pas encore la distance émotionnelle nécessaire...Je me suis donc concentrée sur le plaisir de chanter plutôt que délivrer une psyché mal "essorée".



12) Tu nous racontes l'histoire d'un titre énorme de Booster « Sex Friend)

C'est Juan (Rozoff) qui nous a mis en contact!!!! Booster avait travaillé avec lui quelque temps auparavant  sur un morceau qui s'appelait "you're The One"... Booster m'a appelé et je suis allée dans son studio à Bougival et il m'a fait écouter plusieurs morceaux dont il avait déjà les paroles ! Le refrain de "sexfriend" était déjà prêt, j'ai écrit les paroles et la mélodie des couplets.... Le morceau a été finalisé assez rapidement ! La musique de Booster et sa manière de travailler m'ont vraiment donné des ailes ! Le début d'une longue collaboration !
Le titre est passé longtemps sur Radio Nova et on m'en parle encore !!!!



13) Comment gère-tu, dans ta musique, tes origines, ta famille et ta condition de femme ? Quelle est leur place ?

Je me sens plurielle et non compartimentée ! Ma famille, ma féminité, mes origines sont des parties de moi que je ne souhaite ni réduire, ni analyser ! Je me sens instrument de la Musique et j'essaie de me faire le plus plaisir possible pour l'honorer ! Suis-je française ou camerounaise!? Un peu des deux, ni l'une ni l'autre, tout ça à la fois !
Je me sens "humaine" et solidaire de mes "congénères" c'est déjà pas mal non? (lol)
Je suis femme, mère et ça ne m'empêche pas d'être chanteuse, bien au contraire ! Cela me permet de bien garder les pieds sur "Terre"...


14) Cite-nous une phrase célèbre qui reste gravée en toi. Pour quelle raison ?

"La beauté est dans l'œil de celui qui regarde"....
Pour quelle raison?.... Je crois que la raison se fait entendre d'elle-même, non?



15) Que souhaite-tu pour 2009 ?

Pour le groupe et moi!? Encore plus de concerts, donc encore plus de sourires à la sortie, plus de musique et de bons moments à partager avec les musiciens !
Commencer l'écriture du second album, dont plusieurs chansons sont déjà en chantier et plusieurs collaborations... Mais tant que rien n'est fait je ne m'avance pas... Ce ne sont que des souhaits!
J'aimerais avoir plus de temps pour les miens, amis et famille, et puis pour moi surtout !!!Dormir plus de 6h par jour est devenu un phantasme absolu !



16) Si tu devais faire le vide dans ta discothèque pour ne garder que trois albums, lesquels seraient-ils ?

"My Baby Just Cares For Me"/  Nina Simone
"Where I'm Coming From"/ Stebie Wonder
"Sign Of The Times"/ Prince

Dur dur de choisir comme ça, à chand.... La même question un autre jour et j'aurais dit

"Grace"/ Jeff Buckley
"There's A Riot Going On"/ Sly an The Family Stone
"Plantation Lullabies" Meshell Ndegeocello!



Merci Sandra pour ta patience (répondre aux mêmes questions des dizaines de fois !)

Merci à toi pour ton intérêt ! Un plaisir d'y avoir répondu !

J'adore Mansaadi, c'est sans doute une de mes plus belles découvertes de cette année, je te souhaite plein de bonnes choses pour le futur

Merci Nico, sincèrement et musicalement!
Au plaisir de te rencontrer