Asgeir – In
The Silence (One Little Indian Records)
La précédente claque islandaise m’a été donnée par Peter Von
Poelh alors qu’il sortait sa pépite folk “Going Where The Tea Trees Are” en 2006. Une
voix, une ambiance, des nuances, des harmonies et des mélodies magiques…
Aujourd’hui c’est le jeune prodige de
l’indie-pop nordiqueAsgeir qui,
avec ses chansons légères et aériennes, part à la conquête de la scène folk européenne et nord américaine. Publiant
« In The Silence », la version anglophone de son premier album qui lui
valut des nominations aux Island Music Awards et au Nordic Music Prize, le
chanteur/songwriter et guitariste combine avec délicatesse des éléments électroniques et acoustiques,
posant sa voix emplie de spleen et de douceur sur les textes originaux et
poétiques écrits par son père. Les 10 titres de « In The Silence », avec
leurs incursions pop-rock (« Torrent »), electro soft-pop (« Going
Home ») et même glitch (« Head In The Snow ») seraient à classer
dans un registre hybride: lafolktronica.
Forcément avec un tel titre, l’album du trio jazz originaire des FlandresLabtrio, prend le risque d’être rapproché, avant même sa première
écoute, du célèbre courant artistique Fluxus, actif pendant les années 60 et
70. Prônant souvent avec humour une liberté totale, ces artistes revendiquaient
un refus des institutions artistiques et des limites imposées à leur pratique
de l’art, et c’est précisément de rupture des frontières qu’il s’agit avec nos
trois jeunes belges tout fraîchement sortis de l’adolescence. En effet, le
batteur Lander Gyselinck, la
contrebassiste Anneleen Boheme et le
pianiste Bram De Looze s’évertuent
au travers de leurs 9 compositions à nourrir
leur jazz instrumental de musique classique moderne, de pop et d’électro. L’écriture
de Lander y est très contemporaine, entre mélodies
lyriques et harmonies complexes elle offre une large place à l’improvisation et reconnait l’héritage légué par
les géants tels que Paul Motian ou Miles Davis. Labtrio place la barre très
haute avec ce premier opus enregistré dans les fameux studios de la Buissonne
près d’Avignon.
Magnifique chanteuse aux airs de Jill Scott, Laeticia N’Diaye possède la voix soul des grandes divas, elle déploie
son timbre sur les compos R&B de
son acolyte le claviériste Julien Grandon
et les productions, orientées black busic,
de Nicolas Gueguen. Leur projet Malabar
Watson réunit une excellente section rythmique 100 % made in France. On y
compte Moon (bassiste de Juan Rozoff),
Enrico Mattioli (batteur de Beat
Assaliant) et Thomas Broussard
(guitariste d’NTM…), autant dire que du lourd ! L’EP se compose de 7
titres aux allures funky, hip-hop et jazzy, dont 3 remixes sur lesquels on retrouve les danois Dafuniks et leur patte soul/electro, les français Bost & Bim et leurs sonorités reggae/dancehall puis le Dj Dee Nasty en personne, pour une version
très nu soul de « No One To Blame ».
À suivre de très près… !
C’est un bien joli objet pop-rock que les cinq toulonnais de Twin Apple nous offrent.
Solaire, acidulé et coloré, ce deuxième opus autoproduit paraît avec le soutien
de l’association varoise Tandem. « After The Endless Day » déploie une pop mélodique forcément influencée
par les sonorités d’Outre-Manche,
mais reconnaissante de cet héritage… L’album est empreint de cette touche anglaise resurgissant des 60’s
et 70’s si familière et efficace, avec ses rythmiques de guitares
acoustiques et électriques justement dosées, ses accords de piano plaqués
sobrement et la voix authentique de Gabriel Arnaud, meneur du projet.
Le duo initial, composé de Didier Malherbe au Doudouk et aux
flûtes ainsi que de Loy Ehrlich au Hajouj, Gumbass et Yayli Tanbur, était devenu trio avec la venue du joueur de
Hang, Steve Sehan. Pour la première fois en quartet, la formation Hadouk s’enrichie
du batteur/percussionniste et chanteur Jean-Luc Di Fraya et remplace Steve (parti
pour développer son projet solo) par le guitariste Eric Löhrer. Musicalité et
virtuosité sont toujours au rendez-vous, naviguant entre sonorités jazz et
world. Légèreté, rêverie, ballade et voyage en Orient et en Afrique sont de
mise dans cette délicate carte postale musicale intitulée, non sans humour, « Hadoukly
Yours ».
Le combo américano-néerlandais, composé à la base du chanteur Phonte Coleman et du producteur Nicolay (Matthijs Rook), publie un cinquième opus intitulé "Love In Flying Colors". Débutant leur collaboration à distance en 2002, ils produisent leur premier disque "Connected" en 2004 par mails interposés. Aujourd'hui, Foreign Exchange est installé en Caroline du Nord, fort d'une nomination aux Grammy's Awards en 2009, le groupe a acquis une certaine notoriété dans le milieu du R&B. Un cocktail savamment dosé entre hip-hop, néo-soul, funk et électro dévoile 10 titres séduisants et parfaitement produits, où le groove règne en maître absolu.
Hiatus
Kaiyote – Tawk Tomahawk (Flying Buddha Music/Sony Masterworks)
Comme quoi une ballade chez son disquaire réserve encore des
surprises… Une pochette étrange montrant le dessin d’un coyote gueule
grand-ouverte (façon esprit vengeur de la Princesse Mononoké d’Hayao Miyazaki),
le regard jaune et menaçant, derrière deux grues représentées en origami le
narguant avec un serpentin rouge… Une couverture assez énigmatique mais plutôt
efficace car la curiosité me met le casque à l’oreille… Puis là, deuxième effet Kiss Cool…
Né sous l’impulsion de la chanteuse, guitariste et
songwriter Nai Palm, Hiatus Kaiyote
est la vision futuriste d’une Soul
éclairée, cultivée, généreuse et organique. Rejoint par le bassiste Paul Bender, le touche-à-tout Perrin Moss et le claviériste Simon Mavin, l’alchimie opère et le
projet prend forme attirant comme un aimant le soutien des plus grands comme le
batteur chevelu des Roots, Questlove ou le Dj anglais Gilles Peterson (BBC
Radio 6 Music).
L’album « Tawk Tomahawk » est paru pour la première
fois en 2012 sur Bandcamp, il débarque cette année sous la signature Flying
Buddha du label Sony Masterworks.
Le quartet australien basé à Melbourne est parvenu à extraire
la « substantifique moelle » du courant NuSoul, dont les mètres
étalons furent mis en place dés les 90’s par les immenses Erikah Badu, Bilal et
autres Raphael Saadiq ou Music Soulchild. Mais son génie est
d’avoir autant puisé son répertoire musical dans l’opéra que dans les musiques
urbaines et électroniques. En effet, le titre « Malika » est tiré
de Lakmé composé par le français Léo
Delibes à la fin du XIX° siècle, il s’inspire de ce fameux air immortalisé
entres autres par Natalie Dessay : « Le Duo des Fleurs ». On
note par ailleurs que l’instru du morceau est un montage abstract hip-hop des plus délectables (à rapprocher des travaux du
producteur américain Flying Lotus),
avec les lignes de basse clé-de-voûte de Bender
soutenant l’ensemble par son groove imparable.
En ouverture, c’est le très atmosphérique et mystérieux « Mobius
Streak » (le fameux ruban rouge de la pochette ?) qui nous mène en
bateau entre ballade électro-soul et
ambient experimentale. Nai Palm y dévoile une voix touchante, approchant celle d’une Lauryn Hill dans ses meilleures heures, tandis que les claviers de Simon Mavin nous enivrent et nous
transportent vers des contrées délicatement syncopées par le broken beat éblouissant de Perrin Moss.
« The World It Softly Lulls » nous offre ensuite une
ambiance néo-soulfeutrée où D’Angelo pourrait facilement y poser ses mots doux et son groove
sensuel façon « Spanish Joint ». La chanteuse choisi pourtant d’y
imposerun flow tranchant et
revendicatif, un slam tempétueux sur
une rythmique funk éthérée aux
accents de guitare jazz.
Un interlude instrumental interstellaire « Leap
Frog » nous fait glisser vers « Malika » puis
« Ocelot » et « Boom Child », deux courtes plages aux beats
hip-hop brutaux et crasseux (pas
bien éloignées de certaines productions de Madlib).
« Lace Skull » déverse ensuite sa Soul électrisante et tumultueuse,
s’amorçant avec un arpège de guitare et quelques accords de piano puis se
terminant par un déferlement psychédélique.
C’est Jay Dilla
(RIP), énorme producteur de Détroit, qui semble avoir tissé les trames de ces
trop brefs « Rainbow Rhodes » et « Sphynx Gate », où Fender
Rhodes, MPC, choeurs et basses font leur office dans ces célébrations légères
et groovy à la musique promue par des labels tels que Stone Throw Records et
Okayplayer.
Enfin « Nakamara » vient clore ce pur bijou. Un
titre coloré et nusoul en puissance, sans boîte à rythme ni nappe électronique,
du groove à l’état brut, faisant directement allusion à l’identité australienne
du groupe. Le rappeur QTip (des
Tribe Called Quest) fait une apparition dans une version exclusive présente
dans la toute récente ré-édition du disque.
Royal
Southern Brotherhood – Royal Southern Brotherhood (Ruf Records)
Ce projet au nom un brin prétentieux, mais amplement justifié, réunit la crème des
scènes Soul, Blues et Rock du sud des
Etats-Unis. Rassemblant deux dynasties légendaires de Louisiane et de
Géorgie, la Royal Southern Brotherhood est une collaboration voulue par le
chanteur/guitariste Devon Allman
(fils du claviériste Gregg des Allman
Brothers, fers de lance du Southern
Rock dans les 70’s) et du chanteur/percussionniste Cyril Neville (membre de la célèbre fratrie des Neville Brothers, chantres de la Soul made in New-Orleans). Rejoints par le
guitariste/chanteur de Blues de St Louis Mike
Zito, les trois piliers nous délivrent leur fusion explosive et roots dans un album de 12 titres définitivement
rock’n’roll. À noter la présence d’une
section rythmique terrifiante menée par le bassiste au groove fracassant Charlie Wooton et le batteur de Détroit Yonrico Scott, apparu sur scène aux côtés
de BB King, Santana, Clapton, Taj Mahal… !
Tricia Evy – Meet Me (Plus Loin Music/Abeille Musique)
La jeune chanteuse Tricia
Evy nous invite à l’écoute de son second opus intitulé « Meet
Me ». Originaire de la Guadeloupe, elle se passionne très tôt pour la
chanson et la variété, c’est en débarquant sur le continent qu’elle s’éprend
des icônes du jazz vocal américain
et de la bossa nova. Billie Holiday, Antonio Carlos Jobim ou encore Mel
Tormé habitent ainsi son univers musical. Forte de ses racines créoles, sa
voix douce est très justement dosée, alliant rondeur et sensualité. La belle
interprète, écrit et participe à la composition de la majorité des 11 titres du
disque, au côté de son mentor et pianiste David
Fackeure. Qu’elle s’exprime en français, en anglais, en portugais ou en
créole, Tricia mêle avec délicatesse la
chanson au rythme chaloupé de la
biguine et à l’élégance d’un jazz
classique teinté de reflets latins. Nous emmenant, au gré de ses ballades, à Paris et aux Etats-Unis,
ou encore à Rio et dans les Caraïbes, elle s’est entourée d’une solide section
rythmique : le guitariste et bassiste Thierry
Fanfant (Bernard Lavilliers, Tania Maria…) et le batteur Francis Arnaud (Charles Aznavour, Eddy
Louiss…). Une jolie découverte !
Le Duo allemand basé à Frankfort, Booka Shade, nous donne un avant goût de son cinquième opus "Eve" à paraître sur le label anglais Embassy Music, début Novembre. Leur premier single intitulé "Love Inc." est un concentré de sensualité deep-house matiné d'influences funky et ambient, reprenant un sample du producteur house Lil Louis "Club Lonely" ( Club Lonely ).
Le clip est réalisé par Thomas Hayo...
7 Days Of Funk - Faden Away (Stones Throw Records)
Le californien Calvin Cordozar Broadus Jr. aka Snoop Doggy Dogg, Snoopy, Bigg Snoop Dogg, Snoop Dogg... Snoop Lion et enfin Snoopzilla, figure emblématique du G-Funk, revient avec un projet nous replongeant dans le son West Coast des 90's. "7 Days Of Funk" est une collaboration du rappeur de Long Beach avec le producteur/roi du Modern Funk DâM Funk. Le premier single "Faden Away" annonce la couleur en faisant clairement référence à la légende du Funk Bootsy Collins...
Le groove assassin de la basse allié aux synthés vintage et aux beats syncopés de DâM Funk remettent en scelle la voix traînante, nonchalante et paresseuse d'un Snoop qui nous avait semé dans ses délires ultra-commerciaux, et dernièrement reggae.
Snoopzilla a déclaré dans un communiqué : « Nous sommes les bébés du Mothership. J’ai eu des influences funk dans ma musique durant toute ma carrière. Dam-Funk est froid. Il a gardé le funk en vie et je savais que je devais travailler avec lui. »
Dam-Funk a également déclaré : « Snoop savait à quoi je pensais sans que j’aie à l’articuler. C’est ainsi que vous savez quand vous coller artistiquement avec quelqu’un. »
L'album signé chez Stones Throw Records est prévu pour début Décembre...
Les Espoirs de Coronthie – Fougou Fougou (Chapter
Two/Wagram/Dekalage)
La Guinée revient sur le devant de la scène avec la sortie
de « Fougou Fougou », quatrième album d’une des formations les plus
représentatives de la jeunesse désœuvrée de Conakry : Les Espoirs de
Coronthie. Enregistré à Lyon dans les studios du Peuple de l’Herbe, le disque
est emprunt de chants polyphoniques africains, interprétés en soussou ou en
français, et de sonorités mandingues issues
de la tradition Mamaya, originaire du Mali. Les huit musiciens autodidactes, natifs
du quartier de Coronthie, agrémentent parfois leurs 12 chansons engagées d’accents
festifs, afrobeat et rythmes latins leurs donnent alors une touche moderne et mordante.
3 chanteurs, des percussions et des cordes, pour un message d’amour adressé au
peuple guinéen et des revendications légitimes lancées à ses gouvernants… !
Le magazine Les
Inrocks la compare à la Dj/productrice et chanteuse anglaise M.I.A, il est vrai que la ressemblance
est troublante tant au niveau de l’allure que du son, seulement voilà… Karol Conka
est brésilienne. Son hip-hop/electro
post-baile funk aux sonorités ultra synthétiques invite ici et là quelques
réminiscences traditionnelles do Brasil
et bien sûr africaines, grâce aux samples éclairés et bien placés du beatmaker
Nave. Son premier disque s’intitule « BatuFreak », en 12 titres racés
et délirants Karol nous amène dans son
univers dancehall électronique, percussif et coloré où les lignes de basse
y sont obsédantes, puissantes et sensuelles…
Bel univers intime et féminin que nous dévoile la chanteuse grenobloise
pop Perrine Faillet, baptisée Peau. Publiant son second opus intitulé « Archipel »,
l’artiste, armée d’un synthé, d’un ordi et de quelques guitares, nous plonge
dans ses sonorités électro délicates
et finement ciselées que des James Blake, Emilie Simon ou Thom Yorke lui ont inspirées.
Enregistré dans le Vercors avec la collaboration de Daniel Bartoletti, le
disque est un recueil de 10 chansons écrites en majorité en français et fredonnées
d’une voix douce et sensuelle. Entre une fragilité apparente de son timbre et une
légèreté complexe de ses textures instrumentales, Peau allie les ambiances et relie
sa pop arty au post-rock électronique bâti de cliquetis « distordus et
trébuchants ».
Depuis 1993 et la parution de leur premier disque, le
producteur sénégalais Ibrahima Sylla et l’arrangeur malien Boncana Maïga sont
devenus des références incontournables dans le monde de la salsa. Composée de musiciens
latino-américains basés à New-York, de chanteurs africains originaires de Guinée, du
Sénégal, du Congo, d’Haïti, du Bénin et du Cap-Vert, cette véritable machine à
danser nous revient, après 7 ans d'absences, avec l’immense « Viva Africando », enregistré à
Paris fin 2012. Toujours aussi dansante et brulante, la salsa d’Africando est
chantée en espagnol bien sûr, mais surtout en wolof, en lingala et autres langues
africaines. En 13 titres colorés et racés, le combo réaffirme sa maîtrise du son et du rythme afro-cubain rapprochant
ainsi La Havane de Dakar.
Dénicheur de vielles galettes rarissimes, le label Mr Bongo
ressort « Chapter One » de BLO, premier trio rock d’Afrique dans les
70’s. Les trois nigérians, Berkely
Ike Jones à la guitare, Laolu Akins
Akintobi à la batterie et Mike Gbenga Odumosu
à la basse, sont les pionniers d’un mouvement enraciné dans l’afro-beat et
influencé par le rock psychédélique et la funk/soul U.S. du milieu des années
60. En 8 titres bluffants, le trio nous donne une leçon de fusion parfaite entre
deux continents, Fela Kuti d’une part et Jimi Hendrix croisé avec James Brown
de l’autre. Un vrai régal !
Harold
Lopez-Nussa – New Day (Jazz Village/Harmonia Mundi)
Tout jeune pianiste, le cubain Harold Lopez-Nussa est
pourtant reconnu comme une des valeurs sûres du jazz contemporain. Influencé
par les monstres sacrés qui l’ont bercés toute son enfance (Herbie Hancock, Wayne
Shorter, Keith Jarrett), le musicien s’imprègne aussi de musique classique
(Debussy, Ravel) et des traditions populaires de Cuba (Rumba, salsa). Il nous
présente aujourd’hui son cinquième opus intitulé « New Day », un
recueil de 10 titres érudits, colorés et énergiques. Assisté de son frère le
batteur Ruy Adrian Lopez-Nussa et du contrebassiste Gaston Joya, le trio s’agrémente
de la trompette de Mayqel Gonzalez et de la voix de Kelvis Ochoa pour nous
offrir un jazz latin puissantet résolument nouveau à l’instar du sublime
« Paseo », titre entêtant, vigoureux et métis.
Ahmad Jamal
– Saturday Morning (Jazz Village/Harmonia Mundi)
Après son excellent « Blue Moon » paru en 2012 et
la redécouverte du groove raffiné et
classieux du pianiste américain octogénaire, Ahmad Jamal publie « Saturday
Morning ». Toujours accompagné de Reginald Veal à la contrebasse, d’Herlin
Riley à la batterie et de Manolo Badrena aux percussions, l’album fut
enregistré en Février 2013 au studio La Buissonne près d’Avignon. Le vieux
jazzman y distille une fois de plus un jazzsensuel et ronronnant agrémenté de son
swing si ample et voluptueux. « Saturday
Morning » est un véritable moment de grâce, un de ses instants magiques
sur lesquels plane un jenesaisquoisi communicatif… Richesse harmonique, équilibre
rythmique mélodies touchantes, et virtuosités soupesées sont rarement combinés en
aussi bon ordre !
The
Garifuna Collective – Ayo (Stonetree Records/Cumbancha)
Le label indépendant Cumbancha publiait en 2008 l’album
d’Umalali intitulé « The Garifuna Women’s Project », mettant ainsi en
lumière les traditions musicales issues des côtes de Belize, du Honduras, du
Nicaragua et du Guatemala. Des noms comme Ivan Duvan et bien sûr Andy Palacio
(RIP) sont les fers de lance de cette culture afro-amérindienne et en s’inscrivant
dans leur sillage, l’ensemble The Garifuna Collective poursuit la modernisation
et la promotion de ces sonorités chaudes héritées des esclaves africains et des
indiens Arawaks et Caribs. Leur nouvel opus « Ayo » participe à la
conservation de la langue et de l’identité d’une culture fragile. On y écoute
12 titres gorgés d’espoir et de joie, arborant les rythmes traditionnels de la
Paranda, de la Punta et de la Jungujugu… Magique !
The Toxic
Avenger – Romance And Cigarettes (Roy Music/Universal)
Après une sortie fracassante en 2011, le français expatrié
aux U.S. Simon Delacroix nous présente son deuxième essai au long format, « Romance
and Cigarettes ». Beaucoup moins décapant et club que son précédent
disque, l’électro/rock survitaminée de « Angst » cède ici sa place à un
trip italo-discorétrokitsch. Plongé dans un bain popifiant aux sonorités 80’s gluantes, The Toxic Avenger semble être tombé dans
la même marmite que Kavinsky. Assumant pleinement ses choix et ses clins d’œil
à la musique pop FM de son enfance, le
Dj/producteur élabore un mix plutôt réussi entre une New Wave aux mélodies collantes et obsédantes et une électronarcoleptique, gavée de synthés disco à rendre jaloux un certain Mr Tellier. On s’éloigne du
dancefloor pour se rapprocher d’un Simon plus intime.
VV Brown –
Samson And Delilah (Yoy Records/The Orchad/Modulor)
Revisitant le mythe biblique de Samson et Dalila, la
chanteuse aux multiples casquettes V.V. Brown fait son retour dans l’arène
musicale avec la sortie d'un nouveau disque aux sonorités électro/pop, à classer dans la rubrique avant-gardiste du rayon R&B. La belle anglaise publie sur
son propre label Yoy Records « Samson And Delilah », un album déroutant,
crépusculaire, froid et conceptuel, le premier qu’elle assume pleinement! Les
spectres de Grace Jones, Bjork et Kate Bush planent au dessus des 11 titres composés en collaboration
avec Dave Okumu (producteur de Jessie Ware). V.V. Brown réinvente son univers
artistique, le rendant plus baroque, sombre et sophistiqué. Elle se libère du
poids de l’industrie musicale et de ses canons pour fournir un objet personnel et
anti-commercial. Audacieux et prometteur !
Nishtiman – Kurdistan Iran-Iraq-Turquie
(Accords Croisés/Harmonia Mundi)
La musique d’un peuple, réparti entre quatre pays et quatre
histoires, est enfin gravée dans un seul et même écrin. Le projet intitulé « Kurdistan »
est interprété par un ensemble de sept artistes mené par le percussionniste iranien
Hussein Zahawy. En 10 titres que le chanteur et musicien Sohrab Pournazeri a composés
pour l’occasion, Nishtiman nous apprend que la musique kurde est plurielle,
festive, populaire et raffinée. Restés confidentiels jusqu’à présent, ces rythmes
et ces mélodies millénaires réapparaissent timidement, avec ici une touche
occidentale apportée par la contrebasse jazz et les percussions sénégalaises de
deux européens. L’écriture du compositeur est nourrie par les différentes
traditions kurdes implantées en Iraq, en Iran, en Syrie et en Turquie. L’initiative
est rare et audacieuse, la musicalité y est intense et lyrique !
Le projet « Rivière Noire » répond à l’appel d’une
Afrique désirée, rêvée et sublimée. Réunissant le chanteur/songwriter brésilien
Orlando de Morais Filho, le guitariste/chanteur/songwriter d’origine
guadeloupéenne Pascal Danae et le réalisateur et ingénieur du son Jean Lamoot,
ce premier disque métisse les sonorités de la MPB, du reggae, de la folk, du blues malien et de la culture mandingue, avec évidence et
profondeur… Les chants en portugais et en bambara, la kora, les percussions
traditionnelles, les guitares électriques et acoustiques, les rythmes séculaires
enivrants et la modernité d’une écriture éclairée, créent une alchimie illustrant
à merveille ce terme parfois galvaudé de World
Music.
Célia Cruz –
This Is… Célia Cruz, The Absolute Collection (Legacy/Sony Music)
Célia Cruz, c’est LA voix qui incarne le plus la musique cubaine et la salsa. Partie de rien, son chant va
d’abord séduire la Havanne, puis l’Amérique latine dans les années 50 et les
USA dans les 60’s (fuyant ainsi le régime de Fidel Castro). L’Europe la
découvre au milieu des années 70, alors qu’elle devient une des stars du
célèbre label Fania Records. Dans cette
« Absolute Collection », sont compilés 12 titres de la diva Café Con Leche, dont les succès « Qimbara »,
« Usted Abuso » et « Yo Viviré ». Piochés entre 1955 et 2001, on
peut y écouter La Reina de la Salsa s’illustrer
au côté des légendes Tito Puente, Ray Barretto ou encore Willie Colon. Cet hommage
est une célébration saluant la longue carrière d’une artiste que seule la maladie
fit taire en 2003 à presque 90 ans !
Black Bazar
– Round 2 (Lusafrica/Sony Music Entertainment)
Tout est parti d’un roman paru en 2007, qui traite des problèmes
de la communauté africaine à Paris, Black Bazar est depuis devenu un concept
musical. L’écrivain Alain Mabanckou, entouré des maîtres de l’ambiance
africaine, a voulu revenir aux sources de la rumba congolaise. En 2012, le combo Black Bazar publie « Premier
Round » et le succès est tel que son petit frère « Round 2 »,
plus diversifié et ouvert sur d’autres rythmes (soukous, sonorités afro-caribéennes…),
lui emboîte le pas un an plus tard. Sur les compositions du guitariste Popolipo
Beniko et du bassiste Michel Lumuna, une flopée d’artistes congolais,
nigérians, cap-verdiens et haïtiens s’évertuent à nous transmettre la fièvre et
la folie d’une Afrique plurielle en ébullition.
Grand
Pianoramax – « Till There’s Nothing Left » (Obliqsound/Harmonia
Mundi)
Le pianiste Suisse Léo Tardin nous présente le quatrième
volet de son projet jazz/fusion
intitulé Grand Pianoramax. Remarqué au côté de Roy Ayers, des Nubians, de Toots
Thielemans ou de son compatriote Eric Truffaz, le musicien au groove saisissant
et aux idées novatrices publie « Till There’s Nothing Left ». Il est
accompagné du batteur zurichois Dominik Burkhalter et du poète/slammeur
new-yorkais Black Cracker. Le trio nous propose d’entrevoir, à travers son
objectif grand angle, un paysage musical expérimental ponctué d’éléments jazz, trip-hop, dub, rock et hip-hop. Entre jubilations
psychédéliques, accents électroniques et sonorités acoustiques, rythmiques
tranchantes et poésie ténébreuse, Grand Pianoramax nous plonge dans son univers
contrasté en clair/obscur.
Dino D'Santiago, jeune artiste d'origine cap-verdienne, a fréquenté
toute son enfance la chorale paroissiale que ses parents animaient dans le sud
du Portugal. Après s'être investi dans différents projets Hip-Hop, Soul et R&B
(Jaguar Band, Dino SoulMotion, DaWeasel), le chanteur publie "Eva",
un disque touchant et encré plus que jamais dans ses racines africaines. C'est lors
d'un voyage initiatique sur l'île de Santiago au Cap Vert que Dino, accompagné
de son père, s'éprend des traditions musicales insulaires comme la morna, largement répandue par Cesaria
Evoria (R.I.P.), la coladeira et le funana lento ou encore le batuque. Agrémentant son répertoire crioulo
de sonorités empruntées au fado, la
voix de ce nouvel ambassadeur de la lusophonie est à découvrir d'urgence!
Que dire de cet ancien sportif de haut niveau converti au
jazz ? Que dire encore de cette bête de scène élevée au gospel et formée à Broadway ? Le chanteur Gregory Porter est la
révélation jazz/soul de ces
dernières années, depuis la parution en 2010 de son premier effort intitulé
"Water". Véritable phénomène vocal et scénique influencé, entre
autres, par Nat King Cole, Marvin Gaye et Bill Withers, l'enfant de Bakersfield (Californie) publie
aujourd'hui "Liquid Spirit" ,un recueil autobiographique de 16
compositions puissantes et touchantes. Ce troisième opus marque son entrée dans
le prestigieux label Blue Note, mettant au service du groove, sa voix chaude et sa plume engagée. Avec une élégance sans
pareil et un brin de classicisme rassurant, le compositeur nous rappelle les
liens sacrés unissant le gospel, le blues, le R&B, la soul et le jazz.
Magique!
Deluxe - The
Deluxe Family Show (Chinese Man Records)
Il s'agissait d'un projet plutôt sympa, mêlant swing, soul, funk,
hip-hop et électro dans une ambiance pleine de peps et bonne humeur... Nous
sommes maintenant confrontés à un véritable phénomène!L'ex-quintet urbain devenu sextet avec la
chanteuse LiliBoy a quitté les rues d'Aix-en-Provence pour signer chez la
référence hexagonale du hip-hop pointu et décalé, Chinese Man Records.
Apparaissant dans la BO de Fast and Furious 6, les petits français s'offrent
même des guests d'exception, comme le rappeur sud-africain Tumi. Leur premier
EP avait créé un buzz fin 2011, leur premier album "The Deluxe Family
Show" les consacre... Enorme!
Mariana
Caetano - Mé Ô mond (Sin Zeo Music/Madame Bobage/Coop Breizh)
Une voix sombre, grave et colorée d'un délicieux accent
portugais, des rythmiques pop inspirées du folklore brésilien nordestin... La
belle Mariana Caetano, originaire de Rio mais installée en France, publie son
second opus intitulé "Mé Ô mond". Comédienne et chanteuse, elle mêle
les univers de la MPB, du tropicalisme et du maracatu à celui de la chanson
française. Le résultat est forcément métis, une soft-pop hybride avec quelques
incursions rock. Le disque est un recueil de ballades féminines traitant de
plaisir, d'amour, de l'intime et de société. Un brin mélancolique !
Le percussionniste et chanteur argentin nous revient avec un
hommage musical festif à sa ville natale. Renouant avec les rythmes traditionnels
de la cumbia, du candombe et de la tunga tunga,
"Asado" nous rend compte du métissage qu'a connu Cordoba depuis les
années 60. Minimo Garay l'a enregistré avec ses musiciens de "Los Tambores
Del Sur" entre Buenos Aires et Paris. La tunga tunga ou cuarteto,qui se joue avec un piano, des cuivres et un accordéon, est un
style très populaire hérité de la tarantelle
italienne et du paso doble espagnol.
L'artiste se le réapproprie en y mêlant son grain de folie et de modernité. Il
s'est entouré pour l'occasion d'une pléiade d'artistes de tous horizons, parmi
lesquels on retrouve la chanteuse égyptienne Natasha Atlas ou le flutiste
parisien Magic Malik...
YOKOHAMA ZEN ROCK – « Yokohama Zen Rock » (Jarring
Effects/discograph)
L’histoire commence à deux, la danseusebutō,
chorégraphe,
compositrice, chanteuse et musicienne Yoko Higashi (née en 1974 à Yokohama,
Japon) et Takeshi Yoshimura, guitariste expatrié en France et inventeur de la
porn pop japonaise (mélange d’électro pop, new wave disco pop et textes grivois).
Taillé pour la scène et formé juste à l’occasion d’un festival en 2003 du côté
de Lyon, le projet devient rapidement sérieux et le duo trouve alors en Spagg (bassiste
et beat maker, membre du Peuple de l’Herbe), puissance, expérience et sagesse. Le
résultat de cette union tient en quatre mots : Japanese electro punk rock.
Yokohama Zen Rock illustre son métissage à chaud, en live, avec des textes
chantés et performés dans la langue du pays du soleil levant. Fort de
l’influence expérimentale de Yoko, pop rock de Takeshi et métal électro du
français Spagg, le YZR alterne titres énergiques et déjantés « Kill
Me » et « Kome - Eloge de la Fuite » avec des plages plus zen
« Miminari » ou encore « Rosoku », alliant le son saturé et
planant de la guitare aux rythmiques électroniques cousues main de l’ancien de
la bande. Mélodies simples et efficaces, lignes de basses massives et basiques,
chant torturé, sombre et doux à la fois…Entre brutalité punk et classicisme
pop, ce premier opus intitulé Yokohama Zen Rock est un cocktail étonnant à
servir bien frappé !
Il y a ceux qui réchauffent, évitant ainsi l'écueil
d'une quelconque prise de risque, ceux qui opèrent une rupture, allant même
jusqu'à la négation...Puis il y a Zuco 103, en marge de toutes ces
considérations souvent commerciales ou marketing, dont la seule perspective est
de partager sans imposer, de planter le décor musical d'un après-carnaval,
lorsque les corps se délassent et que les esprits s'apaisent.
Ce trio créatif, novateur et joyeux ne cherche ni à
décliner une vieille recette, ni à changer la donne. Proposant un cocktail
métissé flirtant avec le jazz, le funk, l'électro et la musique brésilienne, la
chanteuse do Brasil Lilian Vieira, le batteur-sampleur néerlandais Stephen
Kruger et le pianiste allemand Stephen Schmid bâtissent depuis 1989
(date de leur rencontre au Conservatoire de Rotterdam) un édifice sonore
alliant l'Ancien et le Nouveau Continent.
La magie opérant depuis 1999 et la sortie de leur
premier opus éponyme, le succès ne tarde pas avec Otro Lado en 2000, son
single du même nom inonde les ondes radios et figure dans les compilations
lounge de l'époque.
Après trois autres albums dont une expérience jazz
acoustique avec One Down, One Up, After The Carnaval est un paisible
moment d'échange.
Berimbau, cavaquinho, guitare, banjo, beats
électroniques et percussions brésiliennes sont autant d'explorations sonores
qui apportent maturité et épaisseur à la texture de ce remède musical agissant
contre la morosité.
Nous retrouvons après trois ans d'absences la voix
touchante de Lilian Vieira, de retour sur sa terre natale avec ses complices,
pour l'enregistrement d'une grande partie de ce dernier album.
Taillé pour la scène, After The Carnaval annonce
des moments live inoubliables.