mardi 10 novembre 2015

Souleance – Tartare EP (First Word Records)


Souleance – Tartare EP (First Word Records)

Souleance est un projet électro piloté à 4 mains depuis 2006 par les producteurs français Fulgeance et Soulist. Orienté vers les sonorités disco, soul, hip-hop et afro-latines, le duo nous offrait l’année passée son EP d’inspiration brésilienne Jogar d’où était extrait l’excellent Mais Um au groove tropicaliste low-club.

En juillet 2015 était publié chez First Word Records le single Secoue, annonçant la sortie de son dernier EP Tartare composé de 6 compositions + 2 remixes. Le titre combinait les rythmes haïtiens du kompa et ses accents cuivrés à la puissance des loops et autres beats électroniques.

Cependant avec le second extrait Hustle, Souleance nous éloigne des tropiques et nous plonge dans les profondeurs abyssales d’un disco instrumental moite et entrainant façon 80’s, on y remarque en featuring Emile Sacre alias Vect aux claviers et vocoder.

Le titre éponyme est de la même trempe, efficace et racé avec une ligne de basse hypnotique et redoutable. Le producteur breton Débruit, auteur du célèbre Nigeria What ?, s’en empare et nous livre un remix « au couteau » plutôt dark avec ses percussions afro et son synthé new wave.

Ratatouille est une véritable bombe stroboscopique, mixant cuivres synthétiques festifs et claviers psychédéliques à la façon de Todd Terje dans It’s Album Time.

I Got It est sans doute le morceau le plus sensuel de l’EP avec son kit de batterie au grain analogique, ses samples vocaux subjectifs hérités d’Ohio Players et sa touche disco house planante…

New York, ou la perle de Tartare, nous rappelle le pur son façonné par le mythique duo nu-disco de Brooklyn, Metro Area, il est remixé par l’allemand Uffe qui orchestre une version piano house des plus pertinentes, m’évoquant le récent disque electro jazz The Radicle de l’anglais Tim Deluxe.

Bref, Souleance confirme sa dextérité en cuisine, après les amuse-bouches il ne lui reste plus qu’à nous concocter un album aux petits oignons…

 

Angie Stone – Dream (Shanachie)


Angie Stone – Dream (Shanachie)

La diva Angie Stone, une des figures emblématiques de la scène néo-soul depuis 1999 et la parution de Black Diamond, nous revient avec un septième opus intitulé Dream. Né sous l’impulsion du producteur Walter W. Millsap III (Mariah Carey, Jennifer Lopez, Alicia Keys ou Brandy), le projet veut remettre en lumière la vie d’une artiste (aux 2 disques d’or et aux 3 nominations aux Grammy Awards) hors paire et son lègue souvent déprécié au monde de la black music. Rappelons à ce sujet qu’à la fin des années 70 elle comptait parmi les pionnières du hip-hop féminin avec son trio The Sequence et leurs titres old school comme Funk You Up paru sur le label de Sugar Hill Gang en 1979, Monster Jam en 1980 ou Funky Sound (Tear The Roof Off) l’année suivante.

Dream se compose de 10 titres aux reflets soul sucrés et délicats, la voix puissante et sensuelle d’Angie (qui baigna toute son enfance dans le gospel) est toujours aussi touchante et efficace, on en prend conscience dès l’ouverture très orientée R&B Dollar Bill, qui nous convie sur le dancefloor en mode ondulations et petits pas langoureux.

Dave Hollister la rejoint sur le brulant Begin Again dont l’ambiance ouatée ne s’apprécie pleinement qu’en position horizontale (comme le titre éponyme d’ailleurs), puis le rythme s’accélère avec Clothes Don’t Make a Man, révélant la facette rétro-soul de l’ex de D’Angelo (un retour aux sources audible aussi dans l’énergique Quits). C’est justement de sa relation avec le chanteur qu’elle traite dans la touchante ballade Forget About Me, où comme dans Magnet, Think It Over ou 2 Bad Habits elle ré-explore les sonorités et le groove de ses débuts, que Mahogany Soul en 2001 et Stone Love en 2004 ont indélébilement gravés dans l’histoire de la soul contemporaine.

Angie Stone, auteur, interprète, productrice et actrice revient donc sur le devant de la scène, plus apaisée et sereine que jamais ! Ses relations houleuses avec sa fille Diamond se normalisent et son fils Michael (dont D’Angelo est le père), décrit comme un excellent rappeur, se promet à une belle carrière. Sa foi inébranlable et sa force de caractère l’ont aidé à surmonter les épreuves de la vie, abimée par des émissions de téléréalité, la cinquantenaire pourrait être très prochainement le sujet d’un biopic produit par Jamie Foxx !

lundi 9 novembre 2015

Espiiem - Noblesse Oblige (Orfevre Label/Musicast)


Espiiem - Noblesse Oblige (Orfevre Label/Musicast)

Le rappeur parisien Espiiem publie son premier opus solo intitulé Noblesse Oblige. Repéré aux côtés des collectifs Cas de Conscience et The Hop, il présentait en 2012 son EP L’Eté à Paris, l’année d’après le mini-album Haute Voltige - où l’on notait déjà un intérêt tout particulier apporté aux instrumentations de ses titres, réalisées d’ailleurs par les pointures Kaytranada (Canada), Kings (GB) ou J-Louis (USA) - et enfin Cercle Privé en 2014 (tiré à 500 exemplaires). C’est entouré des beatmakers français Astronote, Aayhasis (tous deux partis à la conquête des States) ou encore Chilea’s, et des MCs K.E.N.T, Esso et Deen Burbigo de L’Entourage, qu’il s’attaque aujourd’hui à son tout dernier projet. L’humble et ambitieux Espiiem, qui comme il le dit dans le titre éponyme, « repousse ses limites et développe son art », demeure encore tapis dans l’ombre mais s’assure lentement une solide réputation auprès de la critique et des aficionados de la sphère hip-hop underground hexagonale. Son flow, aussi bien véloce et tranchant que posé et paisible, se déploie dans des atmosphères caverneuses ambiances planantes et rythmiques lentes nous laissent apprécier des textes soignés, entre introspection (Noblesse Oblige, Suprématie…), réflexions sur la vie (Sparring Partner, Darling,…) et la société (Money, Deuxième Famille…).
 

vendredi 6 novembre 2015

Luca Nostro - Are You OK ? (Via Veneto Jazz/Socadisc)


Luca Nostro - Are You OK ? (Via Veneto Jazz/Socadisc)

Le guitariste et compositeur romain Luca Nostro nous présente son dernier opus baptisé Are You OK ? Enregistré à New York avec un quartet du cru composé de l’épatant Donny McCaslin au saxophone, du très classieux John Escreet au Fender Rhodes, de l’élégant Joe Sanders à la contrebasse et du pilier Tyshawn Sorey à la batterie, le disque est clairement orienté jazz contemporain, avec ses combinaisons complexes et répétitives, ses changements brutaux d’humeurs, de couleurs et de rythmiques, ses allées-retour entre phrasés incisifs et passages plus fluides. L’improvisation et l’interaction entre les musiciens y jouent un rôle prépondérant, faisant naître de mélodies simples des entrelacs sophistiqués à la manière de Steve Coleman et des sonorités brulantes parfois psychédéliques héritées de Franck Zappa, artiste qui compte parmi ses influences majeures avec entre autres Steve Reich.

Ameen Saleem - The Groove Lab (Via Veneto Jazz/Socadisc)


Ameen Saleem - The Groove Lab (Via Veneto Jazz/Socadisc)

Le nom du bassiste/contrebassiste originaire de Washington DC, Ameen Saleem, ne vous dira peut être rien, il est pourtant loin d’être un inconnu. Officiant notamment depuis plus de 6 ans aux côtés du trompettiste Roy Hargrove dans son Roy Hargrove Quintet et son RH Big Band, il est l’artisan d’un groove élégant, puissant et contagieux. Installé à New York, le musicien impose d’emblée sa versatlité, oeuvrant dans différents registres il matine son swing de sonorités néo-soul et de beats funky.

Homme de l’ombre, il publie aujourd’hui sur le label italien Via Veneto Jazz (qui tente une perçée en France), son premier album solo baptisé The Groove Lab. Le disque porte bien son titre puisqu’on y devine toute l’effervescence du mode de vie de Brooklyn, qui devient peu à peu le vivier du jazz américain aux dépens de Manhatan, où les loyers exorbitant chassent les clubs.

Ce laboratoire du groove débordant d’énergie et de raffinement se décline en 13 compositions qu’Ameen a choisi d’interpréter avec la crème des musiciens new-yorkais, on note alors la présence de l’époustouflant saxophoniste Stacy Dillard, de l’excellent pianiste Cyrus Chesnut, des batteurs Jeremy “Bean” Clemons et Gregory Hutchinson, du guitariste Craig Magnano et de l’immense Roy en personne. Bien évidemment ce casting demeurerait incomplet sans citer les chanteuses Mavis “Swan” Poole et Ramona Dunlap, qui inondent d’une puissante vibe soul/R&B les vibrants et sensuels Don’t Walk Away, For My Baby et Best Kept Secret.

The Groove Lab renoue avec le son que Roy Hargrove nous proposait du temps de son terrible RH Factor, un projet jazz/funk efficace et prenant qu’Ameen Saleem emmène, avec créativité et fluidité, fricotter avec les travaux de RobertGlasper et autres Esperanza Spalding.
 

jeudi 5 novembre 2015

Las Hermanas Caronni - Navega Mundos (Les Grands Fleuves/L’autre Distribution)


Las Hermanas Caronni - Navega Mundos (Les Grands Fleuves/L’autre Distribution)

Las Hermanas Caronni, sœurs jumelles natives d’Argentine, publient leur troisième opus très aquatique par sa thématique, baptisé Navega Mundos. Laura, violoncelliste et Gianna clarinettiste, se plongent dans leurs souvenirs d’enfance à la recherche d’instants magiques et d’êtres disparus. Leur solide formation musicale et leur goût pour le voyage, les aident à dépasser leur background classique et traditionnel afin de créer un style singulier, mêlant atmosphères intimistes voire minimalistes et sonorités riches, puisées chez les impressionnistes français Debussy et Ravel, le compositeur brésilien Heitor Villa Lobos, le tango et la musique populaire de la Pampa. Les deux chanteuses offrent 12 titres dépaysants en hommage à leur maman Beatriz Pell et à leur mentor Juan Carlos Caceres, musicien, peintre et historien d’art disparu en Avril dernier. On notera la reprise de The Doors Spanish Caravan et la très belle mise en musique d’un poème de Rainer Maria Rilke La Mélodie des Choses.

Virginie Teychené – Encore (Jazz Village/Harmonia Mundi)


Virginie Teychené – Encore (Jazz Village/Harmonia Mundi)

La chanteuse de jazz originaire de Draguignan Virginie Teychené nous présente Encore, un subtil recueil de chansons qu’elle empreinte aux monstres sacrés de la variété française mais aussi aux maîtres de la bossa nova, du jazz ou de la folk outre-atlantique. Sa maîtrise parfaite aussi bien dans les graves que dans les aigus et son habileté à habiller les mots d’un scat délicat (commme dans Doralice), lui permettent d’exprimer ou plutôt de sublimer les textes de Léo Ferré (Jolie Môme), Claude Nougaro (à l’honneur avec Allées des Brouillards et A Bout de Souffle), Joni Mitchell (Both Side Now), George & Ira Gershwin (But Not For Me) ou Vinicius de Moraes et Antonio Carlos Jobim (Eu Sei Que Vou Te Amar). Entourée de son fidèle quartet, Virginie est à l’origine de deux titres, le touchant Before The Dawn avec la complicité de son pianiste Stéphane Bernard et la ballade Encore, composée par son contrebassiste Gérard Maurin.
On appréciera la performance de l'harmoniciste Olivier Ker Ourio dans le sublime et intimiste Septembre de Barbara!