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mercredi 20 mai 2015

Van Hunt - The Fun Rises, The Fun Sets (Godless Hotspot)

Van Hunt - The Fun Rises, The Fun Sets (Godless Hotspot)

Un bien bel effort que ce cinquième opus néo-soul (mais pas que !) intitulé The Fun Rises, The Fun Sets du crooner et multi-instrumentiste Van Hunt. Natif de Dayton, il se met à la musique dès l’âge de 7 ans, motivé par l’amitié nouant son père au batteur des mythiques Ohio Players… On comprend ainsi mieux d’où lui viennent ses sonorités sexy et psychédéliques héritées de la black music des années 70 !

A la fin des 90’s, après avoir envoyé ses démos hip-hop à quelques maisons de disques et rencontré plusieurs producteurs dont l’excellent Jermaine Dupri, le compositeur se fait remarquer en écrivant le titre Hopeless pour Dionne Farris (Arrested Development) et une partie de l’album Love In Stereo de Rahsann Patterson

Après Van Hunt (2004) et On The Jungle Floor (2006) parus chez Capitol Records, ses deux premiers albums plutôt bien accueillis par la critique, le musicien déchante en étant notamment affligé par l’avortement de son projet Popular qui devait sortir chez Blue Note Records en 2008. Excédé par l’industrie du disque, il s’en émancipe et fonde son propre label baptisé Godless Hotspot où paraîtront What Were You Hoping For ? en 2011 et The Fun Rises, The Fun Sets en 2015.

Influencé depuis ses débuts par des univers musicaux souvent aux antipodes, rock, folk et country d’un côté puis jazz, funk, soul et R&B de l’autre, Van Hunt distille avec brio l’héritage des icônes Iggy Pop, David Bowie, Neil Young et Curtis Mayfield, Thelonious Monk, Serge Giansbourg… Souvent comparé avec raison à Prince, il s’empare de tout un pan de la culture musicale américaine et la restitue dans une fusion proche de celle qu’opérait déjà dès la fin des 60’s Sly Stone et sa famille. Sa musique allie rythmiques R&B, mélodies contagieuses et psychédélisme, créant ainsi une identité pop/soul/rock hybride et débridée.

Dès l’ouverture avec le torride Vega (Stripes On), Van Hunt nous annonce la teneur de l’album en mêlant une instrumentation funk digne des JB’s à sa voix gémissante et caressante, qui rappellerait presque celle de Lenny Kravitz dans ses meilleures prestations.

Avec des morceaux comme Old Hat, (Let It) Soak (N) ou French For Cloud (Cstbu) c’est le génie de D’Angelo qui semble surgir de cette soul moite et tourmentée, aux accents organiques de gospel, de blues ou de jazz.

Dans Pedestal, si la guitare acoustique semble entamer une balade folk, c’est bel et bien dans un rock électrifié obsédant et saturé façon Jimi Hendrix que l’on pénètre un peu surpris mais rapidement conquis.

Teach Me A New Language nous replonge dans une soul cosmique et langoureuse où le groove nébuleux nous emmène rejoindre Curtis et sa voix délicate de ténor aigue.

She Stays With Me est dans la lignée des meilleures productions de Prince, avec une ligne de basse massive et ténébreuse, des synthés 80’s et une voix gavée de reverb…

Quant aux thèmes Headroom et If I Wanna Dance With You, il est quasiment question d’a cappella, le chanteur est juste accompagné par quelques accords pop joué au piano et nous offre deux slows, deux ballades lentes et aériennes que l’on s’attendrait à écouter dans une galette de R. Kelly !

Emotional Criminal et le titre de clôture The Fun Rises, The Fun Sets, sont conçues elles aussi comme deux ballades romantiques et sensuelles, aux ambiances pop profondes et un brin psychés mais qui, malgré leurs mélodies accrocheuses, ne capteront pas les ondes radio. Encore heureux !

Parlons pour finir de la bombe funky …Puddin’, prenant des airs d’Iggy Pop au chant, Van Hunt nous livre le titre le plus dansant et le plus joyeux du disque.

A l’instar du Black Messiah de D’Angelo paru il y a peu, The Fun Rises, The Fun Sets nous prouve que certains artistes surgis lors de l’explosion néo soul de la fin des années 90, sont parvenus à se renouveler en conservant leur singularité. Van Hunt ne fait aucun compromis, quitte à prendre des risques en s’aventurant dans des sonorités bien éloignées des standards.


samedi 16 mai 2015

Bootleggaz – Liquid (Los Angers City Soul Recordz)


Bootleggaz – Liquid (Los Angers City Soul Recordz)

Issue de l’association des producteurs K.rlo et LordGéo, Bootleggaz nous livre Liquid, un premier opus nu soul aux flaveurs french west-coast des plus efficaces. Originaire de Los Angers City, le crew y distille savamment un groove sensuel et assassin digne de celui de leurs compatriotes Hocus Pocus. En effet, d’un bout à l’autre de cet objet musical qui nous veut que du bien, le duo égraine ses influences extraites des scènes soul, funk, jazz, hip-hop, electro et R&B, n’en retenant que la substantifique moelle, un essentiel positif et gorgé de chaleur. Suspendu aux lèvres charnues d’une ligne de basse voluptueuse et aux accords jouissifs d’un Rhodes funky, l’auditeur en sueur se laisse embobiner par un déballage de sonorités live douces et sirupeuses, marquées du sceau des icônes J. Dilla, Maxwell, Beat Assailant, Bilal, 9th Wonder et autres D’Angelo.

Au fil de ses 15 titres, Bootleggaz nous ballade entre Détroit, Londres, Philadelphie, New York et la Nouvelle Orléans, ne manquant pas de faire escale à Toulouse pour enrôler le crooner Gimenez E (que nous écoutions il y a peu sur l'excellent projet The Empire Of Sound), à Paris pour solliciter les services de la diva Jaleenah Birdland, à Oakland pour amadouer le flow old school du rappeur Raashan Ahmad ou encore à Guyana cueillir le blues du rasta Ras Mac Bean… Un voyage initiatique autour du monde et à travers les époques où les cuivres d’un big band cohabitent avec les scratchs d’une technics sl1200 et les beats d’une MPC…

Bref, un disque qui ne vous veut que du bien !!!


 

dimanche 22 mars 2015

Marcus Miller – Afrodeezia (Blue Note Records)


Marcus Miller – Afrodeezia (Blue Note Records)

Chaque disque de Marcus Miller est un évènement, chacun d’eux est une immersion dans son univers en fusion qu’il nous dépeint à grand renfort de slap et de lignes de basse massives au groove assassin. Après Renaissance paru en 2012, il publie Afrodeezia  sur le prestigieux label Blue Note, entouré d’un quintet exceptionnel : le saxophoniste Alex Han, le trompettiste Lee Hogans, le pianiste Brett Williams, le guitariste Adam Agati et le batteur Louis Cato. Nommé artiste de l’Unesco  pour la paix en 2013 et porte-parole du programme éducatif La Route De l’Esclavage, Marcus entreprend avec ce nouvel opus de « remonter à la source des rythmes qui font la richesse de son héritage musicale », de l’Afrique aux Etats-Unis , en passant par la France, le Brésil ou les Caraïbes.

Débutant son voyage initiatique en Afrique, il s’abreuve de culture mandingue au Mali, passe prendre le chanteur Alune Wade au Sénégale puis poursuit son exploration de l’ouest africain vers le Ghana berceau du Highlife, tout proche du Nigeria et plus précisément de Lagos terre de l’afrobeat et de Fela Kuti. Hylife est la première étape de son pèlerinage et constitue par la même le premier single d’Afrodeezia.

Dans B’s River, inspiré par sa femme Brenda au retour d’un trip en Zambie, Marcus au guembri (ainsi qu’à la basse et à la clarinette basse), Cherif Soumano à la kora, Guimba Kouyaté à la guitare, Adama Bilorou Dembele aux percussions et Etienne Charles à la trompette, nous invitent en Afrique Australe pour une ballade où jazz, mélodie pop et sonorités ancestrales font bon ménage autour d’une rythmique hypnotique, avant de descendre en Afrique du sud écouter les chœurs interpréter du gospel.

Dans Preacher’s Kid (Song For William H), dédicacé à son père William, Marcus troque en effet sa guitare basse pour une contrebasse et rassemble autour de lui l’organiste Cory Henry (Snarky Puppy) et une chorale d’exception composée des voix d’Alune, Lalah Hathaway (oui oui, vous ne rêvez pas !), Julia Sarr et Alvin Chea des Take 6.

Traversons l’Atlantique maintenant, les rythmes chaloupés de la samba font leur entrée avec un titre coécrit par un héro de la MPB Djavan, We Were There. Le pandeiro et autres percussions de Marco Lobo servent d’écrin à une bassline ‘millerienne’ tonique, rejointe par le solo du pianiste de génie Robert Glasper au Fender Rhodes (pincez vous une nouvelle fois !) et par les chœurs d’inspiration brésilienne menés par le scat brulant de Lalah.

Dans un thème plus classique, Mr Miller et sa bande nous livre un Papa Was A Rolling Stone des plus funky, si vous êtes pris de tremblements et de vertiges pas d’inquiétude, ce doit être à cause des riffs de guitares électriques et acoustiques du légendaire Wah-Wah Watson (présent dans la version originale des Temptations) et du bluesman Keb’ Mo’, ou bien du souffle électrisant de l’excellent trompettiste Patches Stewart.


C’est le violoncelliste classique Ben Hong, notamment remarqué au côté de Bobby McFerrin et de l’orchestre philarmonique de Los Angeles, qui nous fait prendre de la hauteur grâce à sa délicate interprétation d’une composition du français George Bizet, I Still Believe I hear (Je Crois Entendre Encore). Guitare basse et violoncelle semblent évoluer en apesanteur, jouant à l’unisson une mélodie faite d’arabesques.

Son Of Macbeth et ses accents caribéens nous plonge ensuite dans une mer au bleu azur, le genre de paysage idyllique où le calypso s’anime sur les sonorités métalliques des tambours d’acier, ici domptés par le joueur de steel drums Robert Greenridge. Ce titre est un hommage au percussionniste originaire de Trinidad et Tobago Ralph Macdonald, qui débuta sa carrière dans la troupe du crooner Harry Belafonte.

L’intermède alléchante Prism nous fait songer, le temps de ses 30s, à la magie du groove nusoul d’un Woodoo de D’Angelo, sensuel et addictif. Il semble être extrait d’une jam session enregistrée sur un vieux dictaphone par Marcus et ses réguliers.

 
Xtraordinary et ses reflets pop est une autre de ces sublimes ballades évoquant l’habileté qu’a le compositeur à fusionner les genres musicaux, un peu à la manière du bassiste et chanteur camerounais Richard Bona. Alvin Chea y fredonne avec son timbre de voix très bas une mélodie enivrante tandis que Marcus, à la guitare basse gémissante, se met aussi à la kalimba, instrument africain 3 fois millénaire.

Water Dancer porte bien son nom, hymne à la danse et à la fête porté par une énergie débordante, il pourrait être le thème joué par un brass band électrifié de la Nouvelle Orléans. A noter la participation d’Ambrose Akinmusire à la trompette, Michael Doucet au violon et Roddie Romero à l’accordion.

En clôture d’Afrodeezia, Marcus a convié le beatmaker Mocean Worker et la moitié de Public Enemy Chuck D, pour un I Can’t Breathe electrojazz s’ouvrant avec une ritournelle gnawa interprétée au guembri  par notre serviteur en personne, bientôt rejoint par les séquences du producteur, bassiste et chanteur natif de Philadelphie et le flow revendicateur d’un des piliers du hip-hop engagé et politique.

Marcus Miller voulait à travers ce projet célébrer la musique afro-américaine et montrer qu’elle pouvait donner de la voix à ceux qui n’en n’avait pas, à l’instar des esclaves arrachés à leur terre natale et enchaînés à une autre, qui ont ainsi fait naître malgré l’oppression de nouvelles formes d’expressions hybrides et syncrétiques, comme l’ont été le gospel, le blues puis le jazz et la soul... 
 
 
 
 
 
… Good Job !

jeudi 12 mars 2015

The Empire Of Sound – Out Of The Norm (L’Autre Distribution)


The Empire Of Sound – Out Of The Norm (L’Autre Distribution)

Forcément, quand Mattic est dans la place on ne peut que s’attendre à un déferlement de grooves jazzy et de flows old-school des plus classieux. Le projet Empire Of Sound est né de la collaboration entre le MC américain et le beatmaker français Juke, claviériste addict de la chaleur analogique. Leur passion commune pour la black music, notamment le jazz, la néo soul et le hip-hop, ainsi que leur désir de jouer et d’enregistrer en live, les poussent à s’entourer d’un véritable jazz band. Rejoint par le batteur Romain Joutard, le bassiste Julien Hermé, le guitariste Benoît Medrykowski et le saxophoniste /Dj Lucas Saint Cricq, le duo nous proposent 12 compositions séduisantes et inspirées, dont les références sont puisées dans le jazz teinté d’accents urbains des excellents Roy Hargrove et Robert Glasper, le rap east-coast de The Roots et Talib Kweli sans omettre la référence R&B absolue, D’Angelo, incarné par la voix sensuelle de Gimenez E dans le brulant Lost My Soul Into You. Outre le crooner soul originaire du sud-ouest, Out Of The Norm nous présente les chanteuses Lil Swan et Mafé, les rappeurs Racecar et Justin Percival… Du très beau monde en somme pour un disque qui enjambe l’Atlantique, fusionnant deux univers aux trajectoires distinctes mais s’accordant  comme une évidence !

dimanche 28 décembre 2014

D'Angelo And The Vanguard - Black Messiah (RCA Records)

D'Angelo And The Vanguard - Black Messiah (RCA Records)

L’immense multi-instrumentiste Michael Eugene Archer alias D’Angelo marquait indélébilement l’histoire de la black music lorsqu'en 2000 paraissait sur Virgin Records le mythique Woodoo (classé par le magazine Rolling Stone parmi les 500 meilleurs albums de tous les temps).
5 ans plus tôt, son premier disque intitulé Brown Sugar contribuait déjà à lancer, avec des œuvres telles que l’Urban Hang Suite de Maxwell en 1996, un nouveau genre musical baptisé néo soulcroisant l’héritage des maîtres de la soul avec le hip-hop, le funk, la house, le jazz et le R&B. Emergeait alors une famille de jeunes artistes talentueux et novateurs tels qu’Omar, Erykah BaduRaphael Saadiq, Eric BenétAngie Stone et Musiq Soulchild pour ne citer qu’eux, supportée par les monstres sacrés du hip-hop et du jazz de Détroit et de Philadelphie comme les Djs/producteurs Jay Dilla et Dj Premier, Ali Shaheed Muhammad (des Tribe Called Quest) ou encore le trompettiste Roy Hargrove.

14 longues années de doute auront été nécessaires à D’Angelo pour parvenir à s’extirper de sa maudite et douloureuse traversée du désert. Marqué dans sa chaire par un accident de voiture et brisé par des affaires de drogue et d’alcool, le chanteur a sombré ! Lui qui cultivait une image de sexe symbole bodybuildé (on se souvient de sa prestation dans le clip Untitled (How Does It Feel)) est apparu bouffi et bedonnant sur les clichés volés par la presse people, il a fuit les studios d'enregistrement et déserté la scène (à quelques rares exceptions près) coupant alors les ponts avec son public.

Black Messiah était bien sûr attendu au détour! Les fans, tout d'abord, espéraient de nouvelles chansons, loin d'être satisfaits par les compilations The Soul Of D’Angelo (en 2006) par Dj Ameldabee et The Best So Far (en 2008). Les critiques, ensuite, dubitatives sur un éventuel retour, attendaient un peu plus que ses quelques apparitions disséminées ça et là, comme en 2002 dans l’excellente reprise de Fela Kuti Water No Get Enemy ou encore dans Imagine en 2006 avec Dr Dre et Snoop Dogg
En effet, nous nous demandions tous comment ce prodige, dont le retour était souhaité comme celui du messie, allait penser son post-Woodoo ? Comment allait-il renouveler sa palette musicale et quelles directions allait-il prendre ? Quels sujets allait-il aborder ?

Épaulé par son fidèle ami et confident, le batteur des Roots Ahmir ?uestlove Thompson, des précieux Q-Tip et Kendra Foster à l’écriture, et entouré de son orchestre The Vanguard - composé du mythique James Gadson (Bill Withers, Herbie Hancock…) et de Chris Daddy Dave (José James, Meshell Ndégéocello…) à la batterie, puis de Pino Palladino à la basse (The RH Factor, Adele…) -, D' alias Real R&B Jesus s’est laissé guider par ses convictions et son talent en revenant des ténèbres avec un instantanée brûlant et sombre d’une société américaine gangrénée par les haines raciales et les injustices sociales.



Lui qui excellait aux claviers (le piano étant son premier instrument) est apparu armé d'une guitare sur Woodoo, mais visant la perfection il a étudié ces dernières années avec le guitariste et producteur Jesse Johnson, apparu entre autres aux côtés de Prince, Janet Jackson, Paula Abdul et même Les Rita Mitsouko. Ses influences ont nettement déteint sur un D'Angelo reconnaissant!






Sa musique, moins policée, a évoluée logiquement, sonnant parfois de manière chaotique et désaccordée, cherchant une brèche à travers le groove chamanique de George Clinton et Bootsy Collins, les racines diaboliques d'un blues corrosif et le message politique pugnace mais classieux de What's Going On insufflé par Marvin Gaye ou de We The People Who Are Darker Than Blue par Curtis Mayfield.
Le son de Black Messiah demeure ainsi magistral et riche, vivace, protéiforme et bouillant !

Ain't That Easy ouvre l'album, nous immergeant d'emblée dans des sonorités psyché/funk où le timbre distordu de la guitare électrique nous fait penser à Jimi Hendrix, tandis que la voix gémissante et profondément soul convoque les spectres d'Al Green et Sly Stone. Il s'agit d'une chanson d'amour où le musicien se livre et implore, refusant de céder aux difficultés  : "I'm gonna keep you / Safe from evil opinion", "I need the comfort of your lovin' / To bring out the best in me".

L'hostile 1000 Deaths nous noie ensuite sous une déferlante de beats tonitruants où les coups de baguettes accompagnent, en introduction, un sample de sermon sur Jésus enregistré en mauvaise qualité, et plus loin une voix torturée semblant hurler son texte couvert de larsens à travers un mégaphone défectueux. Ce morceau coup-de-gueule pourrait à lui seul illustrer ce que ?uestlove pense de Black Messiah : un "Apolypse Now of black music".


The Charade prolonge l'expérience psychédélique de D'Angelo, le mirage d'une sitar se fait même entendre au milieu d'un songe qu'aurait pu imaginer Prince en personne. Mais attention au contenu, le texte est militant, il s'insurge et dénonce la condition des noirs dans la société américaine :"All we wanted was a chance to talk, 'stead we only got outlined in chalk / Feet have bled a million miles we've walked, revealing at the end of the day, the charade"!


Sugah Daddy nous réconcilie enfin avec l'univers chaud, sexuel et groovy de l'ange déchu, on retrouve en effet ses accords de piano flirtant avec les arrangements cuivrés du maître Roy Hargrove, la rythmique de guitare y est funky à souhait... Bref tous les ingrédients d'un futur succès sont réunis !
 
Le premier single est baptisé Really Love, ce titre torride aux saveurs hispaniques est beaucoup moins anticonformiste que la première moitié du disque. Le guitariste Mark Hammond y signe une délicate intro à la guitare classique, invitant l'auditeur dans une ballade sensuelle aux accents acoustiques. Le chanteur y déploie tout son savoir-faire de crooner-lover, pinçant chaque mot du bout des lèvres en les laissant se faire caresser par une ligne de basse voluptueuse et des cordes langoureuses : "When you touch me there / When you make me tingle / When our nectars mingle / I'm in really love with you". Un appel à la luxure...



Back To The Future (Part I) a le parfum de ces instants de lucidité et de solitude où l'on fait le point sur sa vie sans aigreur ni rancune (presqu'avec humour), optimisme et groove ronflant sont de rigueur !




A l'instar de The Charade, Till It's Done (Tutu) est un constat, moins féroce il nous pose simplement la question de savoir si un jour l'humanité prendra réellement conscience de ses maux et des ses méfaits: "Carbon pollution is heating up the air / Do we really know? Do we even care?".

Avec Prayer, D'Angelo évoque sa foi, la spiritualité ayant surement joué un rôle sans sa reconstruction : "But you got to pray, you got pray / Oh you got to pray for redemption / Lord, keep me away from temptation / Deliver us from evil, oh yeah"

Sans doute la pépite de Black Messiah avec son swing communicatif et sa walking bass orchestrée par un Pino au sommet de son art, Betray My Heart exprime tous le génie de D' alias The New Prince résultant d'un syncrétisme singulier des rythmes africains, de la musique afro-américaine, du désir et de l'amour. Qui ne voudrait pas être l'auteur de cette déclaration si douce et fleure bleue ? Et qui n'y succomberait pas? :
"As the day must have its sun / And the night must have its moon / Sure as both must rise and fall / I'll be there to see you through / Just as long as there is time / I will never leave your side / And if ever that you feel / That my love is not sincere".


Toujours sur le thème de l'amour, The Door nous mène au bord des rives du Missippi, berceau du blues...







Back To The Future (Part II) nous rappelle que malgré les épreuves la vie suit son cours et que seule demeure la mémoire du passé, à nous d'en faire quelque chose de positif afin de s'en sortir peut-être grandi! "The seasons may come and your luck may just run out / And all that you'll have is a memory, oh" La magie de D'Angelo réside dans le fait de dire si peu en nous faisant vibrer si fort...


Enfin Another Life clôt cet épique monument érigé en hommage à la soul music, grandiose et vibrant il invite les Delfonics à la table de Marvin Gaye pour un dernier festin de roi avec comme sujet de conversation : l'amour d'une femme "I just wanna take you with me / To secret rooms in the mansions of my mind / Shower you with all that you need".

 
C'est certain, D' alias Modern Day Marvin Gaye accouche d’un nouveau chef d’œuvre soul aux sonorités expérimentales, vintages, rugueuses et brutalessurvolé d’une voix toujours aussi ensorceleuse. L'Apollon noir qui posait à moitié-nu devant les objectifs est désormais quarantenaire, il troque ses abdos contre les costumes moins bling-bling du bluesman écorché et du Mr P-Funk abrasif. L'accent est mis sur le contenu, les messages politiques alternent avec les histoires d'amour, de perte et de trahison, l'apparent désordre d'une ébauche brossée sur une toile de jute trouve sa place au côté d'une étoffe délicate brodée de fil d'or.
 
Au-delà du simple renouveau musical, Black Messiah se veut être un écho à l’actualité, notamment aux évènements tragiques que connurent les villes de Ferguson (avec le décès du jeune Michael Brown, abattu par un policier inexpérimenté) et de New-York (où Eric Garner perdit la vie sous les coups inconscients des forces de l’ordre). Il est un cri de révolte, sauvage et violent, celui d'un Phénix renaissant de ses cendres et voulant apporter sa pierre à un édifice ébranlé par ses vieux démons...

 

D'Angelo avec David Sanborn & Friends - Use Me (1998)


Un cadeau... D'Angelo interprétant Use Me immortalisé jadis par Bill Withers, il était alors invité par le saxophoniste jazz David Sanborn lors d'un projet live intitulé David Sanborn Friends Super Session II, c'était en 1998...

vendredi 7 février 2014

Concert Fred Wesley & The New JB’s (11 Mars 2014 à NICE)


Concert Fred Wesley & The New JB’s
 

Véritable légende vivante du Funk, le tromboniste Fred Wesley vient cracher son feu sacré hérité de l’air des JB’s sur la scène de la salle Grapelli au Cedac de Cimiez à Nice le 11 Mars prochain.
Incarnation d’un son racé et d’un phrasé reconnaissable entre tous, le bonhomme au physique imposant a joué, arrangé et composé pour les plus grands, à commencer par James Brown entre 1968 et 1975, puis le Count Basie Orchestra, le Parliament Funkadelic ou encore le Bootsy’s Rubber Band.

Etudiant voué à l’origine au jazz et au Big Band comme son père, il prend de plein fouet la vague Soul/Funk. Tout juste adolescent il démarre sa carrière avec Ike & Tina Turner, avant de s’acoquiner au milieu des 60’s avec James Brown, Maceo Parker, Pee Wee Ellis, George Clinton et Bootsy Collins. Développant ses projets Fred Wesley & The Horny Horns durant les années 80 et The JB’s Horns dans les 90’s,  il s’invite dans le courant Acid Jazz notamment au côté des excellents Jestofunk et devient une icône absolue, à tel point qu’on retrouve ses sonorités inspirées par la soul, le jazz et le gospel dans les disques d’Hocus Pocus, D’Angelo, Erykah Badu, George Benson ou Marcus Miller.

Fred Wesley adapte sa pratique du trombone à tous les styles musicaux issus de la culture noire américaine depuis plus de 50 ans ! Pas une ride donc, un groove toujours aussi puissant et efficace qui nous sera servi bien frappé par sa nouvelle mouture, les New JB’s, composée de son fidèle acolyte Pee Wee Ellis qui sera au saxophone avec Ernie Fields Jr,  Gary Winters à la trompette, Peter Madsen aux claviers, Reggie Ward à la guitare, Dwayne Dolphin à la basse et Bruce Cox à la batterie. Alors allons nous déhancher à Cimiez !

lundi 2 décembre 2013

Harleighblu - Let Me Be



La divine Harleighblu ressuscite une soul vintage ébranlée par la disparition de la sulfureuse Amy Winehouse. Le single "Let Me Be", extrait de son premier opus intitulé "Forget Me Not" (paru fin Octobre 2013 et produit par Joe Buhdah), sortira le 27 Janvier 2014 sur l'excellent label Tru Thoughts basé à Brighton. Marchant dans les traces des Belleruche et autres Alice Russell, la toute jeune chanteuse/songwriter anglaise (à peine âgée de 21 ans) possède une voix sensuelle et vibrante que seules les immenses divas de la black music des 60's pouvaient se vanter d'afficher.
Elevée au milieu des disques de Marlena Shaw, Ella Fitzgerald et Billie Holiday que sa mère collectionnait, Harleighblu expose avec grande classe son groove inébranlable et roots...!
Influencée par Erykah Badu, D'Angelo, Jill Scott, Bilal et toute la scène néo soul des 90's et 00's, la petite protégée de Tru Thoughts s'apprête à conquérir, avec maestria et regard aguicheur, un auditoire encore en deuil d'une icône disparue trop tôt !