mercredi 19 octobre 2016

Jean-Philippe Scali Feat. Glenn Ferris - Low Down (Gaya Music/Socadisc)

Jean-Philippe Scali Feat. Glenn Ferris - Low Down (Gaya Music/Socadisc)


Originaire du sud de la France, plus précisément de Draguignan dans le Var, le saxophoniste baryton Jean-Philippe Scali nous présente chez Gaya Music son second disque intitulé Low Down.
Très tôt initié au jazz par son mentor Ivan Belmondo (père de la fameuse fratrie Lionel et Stéphane), il suit au début des années 2000 les cours de François Théberge, Riccardo Del Fra, Daniel Humair, Glenn Ferris et Hervé Sellin au CNSMDP de Paris, époque à laquelle il se frotte sur scène ou en studio à quelques pointures du milieu dont Martial Solal, Paolo Fresu, Charlie Haden ou encore Chris Potter.
Depuis ses classes, il n'a de cesse en tant que musicien, arrangeur et compositeur de participer ou de diriger une multitude de projets, le dernier en date doit paraître le 04 Novembre prochain. Entouré de son nouveau quintet formé par l'immense Glenn Ferris au trombone (autre de ses mentors, Frédéric Nardin aux claviers (orgue Hammond B3, piano, Fender Rhodes), Samuel Hubert à la contrebasse et Donald Kontomanou à la batterie, il nous présente un recueil de 10 compositions originales et inédites empreintes des héritages de Charles Mingus et Duke Ellington. Succédant à son premier Evidence paru en 2012, Low Down est clairement dominé par la signature grave et rugueuse de son sax baryton et parcouru de sonorités blues, entre autres influences musicales afro-américaines. La participation de Glenn, référence incontestée du trombone, est elle-aussi déterminante dans les couleurs et les ambiances qu'élabore Jean-Philippe, guidé et obsédé par la recherche du groove.



La rondeur du trombone, le piqué du baryton, l'efficacité d'une section rythmique tout terrain font de cet album un concentré jouissif d'énergie et de jazz old-school. Jean-Philippe marie avec fougue et passion les tessitures imposantes aux grains bien épais, dans des morceaux vibrants et brulants mâtinés de New-Orleans, de bebop et de swing. Une pensée particulière pour le radieux "Reflections" et son changement de tempo en dernière partie...



Sarathy Korwar - Day To Day (Ninja Tune/Pias)

Sarathy Korwar - Day To Day (Ninja Tune/Pias)


Une très belle découverte que ce premier opus paru en juillet 2016 du percussionniste, batteur et producteur américain Sarathy Korwar. D'origine indienne, il est issu de la communauté Sidi, descendante de populations d'Afrique de l'Est déplacées majoritairement entre le XV° et le XVII° siècle. Aujourd'hui installé à Londres avec une solide formation à la programmation et aux tablas - acquise auprès des maîtres Shri Rajeev Devasthali et Pandit Sanju Sahai - il ambitionne de marier ses 2 cultures, adaptant sa technique à la batterie occidentale: folklore indien, jazz et musique électronique communiquent ainsi dans un langage sophistiqué, élégant et poétique.

Imaginé pendant un périple dans la région rurale de Gujarat, suivi de séances aux Studios Dawn à Pune, Day To Day a été réalisé à partir d'enregistrements captés auprès de La Troupe Sidi de Ratanpur. Cette dernière dispose de cinq batteurs dont les polyrythmies reflètent son héritage africain, contrairement aux batteurs indiens traditionnels qui jouent à l’unisson. Leurs tours de chants hypnotiques (mélange de traditions bantu, gnawa et soufi) et leurs percussions répétitives constituent ainsi la substance, la matière première du disque que l'artiste enrichie ensuite de sonorités plus occidentales, glanées auprès des recherches free et cosmic jazz d'Alice Coltrane, de sessions avec la nouvelle scène jazz londonienne et nourries de rencontres musicales décisives, Karl Berger et Ingrid Sertso, Cara Stacey (Kit Records) ou encore Arun Gosh.


A la batterie, aux tablas et à la programmation, Sarathy s'entoure pour l'occasion du précieux saxophoniste Shabaka Hutchings (Sons of Kemet), du claviériste Al Mac Sween, des italiens Giuliano Modareli à la guitare et Domenico Angarano à la basse. Ensemble ils élaborent de sublimes textures sonores tantôt ambient ("Eyes Closed") et chill ("Dreaming"), tantôt jazz-rock ("Bhajan", "Indefinite Leave to Remain") aux accents free ("Mawra"), afro ("Bismillah"), astral ("Hail"), psychédéliques et organiques ("Lost Parade").
Un voyage initiatique au départ de l'Inde et à destination de l'Afrique, avec escales aux Etats-Unis et en Europe.

A noter que le projet est le fruit d'une collaboration entre le label Ninja Tune et la Fondation Steve Reid parrainée par Gilles Peterson, Four Tet, Floating Points, Emanative et Koreless.

mardi 18 octobre 2016

Otis Stacks - Otis Stacks EP (Underdogs Records/Diifer-Ant)

Otis Stacks - Otis Stacks EP (Underdogs Records/Diifer-Ant)

C'est vrai qu'habituellement on a tendance à se méfier des départs en trombes et des critiques élogieuses trop unanimes... Seulement voilà, en diffusant savamment ses sonorités hip-hop/soul analogiques le duo Otis Stacks fait mouche dès son premier effort avec un EP accrocheur paru le 10 Octobre dernier chez Underdog Records.

C'est sût qu'avec un nom pareil, aucun faux pas ni aucune fausse note n'auraient su être tolérés, on imagine assez bien comment les aficionados du son de Shuggie Otis ou d'Otis Redding et la célèbre maison de disque de Memphis Stax Records l'auraient accueilli s'il n'avait pas été à la hauteur!

Mené par un tandem de choc déjà rompu à ce type d'exercice au sein du collectif explosif Dafuniks, le projet prend forme entre le Danemark et les Etats-Unis quelquepart vers Nice, Montpellier et Paris. Le producteur danois Michael Munch alias Just Mike et le soulman californien Elias Wallace ont en effet donné vie à Otis Stacks au cours d'une tournée française avec la formation danoise, débarquée dans l'hexagone en 2008 grâce à l'entremise de radio Nova.

Posés sur des mélodies touchantes et efficaces, les textes abordent les notions de perte, de douleur, de nostalgie et ne manquent pas de souligner les travers de la nature humaine.

Le titre "Fashion Drunk" nous immerge d'emblée dans l'univers soul intimiste, épuré et vintage du duo... Des synthés d'époque, les craquements d'un vinyle, une guitare rétro et le flow racé et posé du MC américain Gift of Gab de Blackalicious et Quannum Projects s'immiscent insidieusement dans nos esprits pour ne plus en sortir.

"The Game" est plus aérien, radieux et enivrant. La voix sensuelle et puissante d'Elias inonde une production cousue main au groove cool et envoutant, conduit par une ligne de basse à tomber par terre.

S'enchaîne ensuite une collection de remixes de "Fashion Drunk" orchestrés par Frankie Motion, Straybird et The Architect, ainsi qu'un rework du morceau "So Raw" de Scratch Bandits Crew qu'Otis Stacks a élaborer pour clore cet avant-goût prometteur.

On attend le long format avec impatience!


 

lundi 17 octobre 2016

Bruno Canino & Enrico Pieranunzi - Americas (CamJazz/Harmonia Mundi)

Bruno Canino & Enrico Pieranunzi - Americas (CamJazz/Harmonia Mundi)

L'infatigable jazzman Enrico Pieranunzi n'en finit pas d'enchaîner les projets et les collaborations, on se souvient de son duo avec le guitariste Federico Casagrande dans Double Circle ou de son quartet américano-néo-zélandais sans batteur dans Proximity... Le pianiste romain nous revient avec une formule qu'il semble apprécier, en effet de nouveau en tandem il présente Americas, un recueil de 8 titres qu'il interprète en compagnie du pianiste et claveciniste napolitain Bruno Canino, soliste et accompagnateur de classe internationale, devenu incontournable dans les sphères de la musique classique et de la musique de chambre.
Jazz et musique classique échangent ainsi autour des oeuvres de grands compositeurs des deux Amériques: Aaron Copland, William Bolcom, les frères Gershwin pour les Etats-Unis au nord et Astor Piazzola, Carlos Guastavino pour l'Argentine au sud.
Sonorités ragtime ("Old Adam"), swing ("I Got Rhythm Variations"), latin jazz ("Danzòn Cubano") et tango ("Las Niñas de Santa Fé", "Milonga Del Angel") se succèdent, sublimées par un dialogue fédérateur au langage universel.

Jameszoo - Fool (Brainfeeder)

Jameszoo - Fool (Brainfeeder)

Le label de Flying Lotus, Brainfeeder, publie le premier effort intitulé Fool du compositeur/producteur hollandais Mitchel Van Dinther alias Jameszoo. Le disque, composé de 11 titres "jazz électronique naïf" (dixit l'artiste), rassemble une sacrée brochette de musiciens parmi lesquels évoluent quelques légendes comme le brésilien Arthur Verocai (dont Mr Bongo rééditait l'oeuvre majeure en Avril dernier) ou le pianiste new-yorkais Steve Khun (repéré aux côtés de John Coltrane, McCoy Tyner, Steve Swallow et j'en passe et des meilleurs...), ainsi qu'un casting de jeunes musiciens prodiges comme le bassiste Thundercat (habitué du label) et le saxophoniste John Dikeman.
Bien qu'éparpillé et fouillis, Fool est un objet surprenant, intéressant et bien barré. Dès son ouverture avec "Flake", le ton est donné, alternant motifs musicaux dissonants, glitch et désordonnés, frôlant avec la musique bruitiste et moments plus accessibles où se dessinent une mélodie captivante et un groove prenant. Plus loin dans "Soup" apparaît une instrumentation néo-soul digne d'un Glasper qui disparaît dans des frémissements électroniques. "Meat" nous plonge dans une ambiance free jazz décapante et "The Zoo" dans un pur trip jazz rock qui finit par un tour de chant façon crooner. "Crumble" fait penser à Squarepusher et ses rythmique qui filent à la vitesse de la lumière tandis que "Teeth" nous accompagne vers la sortie avec ses accords de claviers paisibles et rassurants qu'une section de cordes vient juste troubler sans trop déranger...


vendredi 14 octobre 2016

Sonny Fodera - You & I (Defected)

Sonny Fodera - You & I (Defected)

L'australien Sonny Fodera est l'un des Djs/producteurs qui comptent aujourd'hui dans le milieu de la house music. Patron du label Beatdown, il est respecté par les pionniers Frankie Knuckles (RIP), Derrick Carter ou Cajmere et brille aussi bien derrière les platines du Ministry Of Sound, du DC10, du Boom! ou de l'Ushuaia Tower qu'en studio avec des productions puissantes et racées directement influencées par la scène house underground de Chicago.

Il publiait fin aout 2016 chez Defected le premier single "You & I" extrait de son tout prochain LP Frequently Flying. Le titre démontre, notamment à travers les pulsations hypnotiques de sa ligne de basse, les motifs de piano euphoriques et sa maîtrise des vocaux soulful - que l'on doit à la chanteuse anglaise  Janai - une compréhension profonde du dancefloor et de ses aspirations... Pas de superflu mais le stricte nécessaire, une mécanique bien rodée et efficace !


Masquerade mixed by Claptone (ITH Defected In The House)

Masquerade mixed by Claptone (ITH Defected In The House)

C'est avec l'idée de vouloir focaliser son auditoire sur sa musique et non sur sa personne que le mystérieux Dj/producteur Claptone porte un masque, invitant ses fans à le rejoindre dans l'anonymat histoire de communier tous ensemble aux rythmes d'une house music festive et sophistiquée. Cumulant déjà pas moins de 280 prestations pour cette seule année 2016, le Dj allemand n'a de cesse d'être courtisé par les clubs et festivals du monde entier et son passage derrière les platines du Pacha, du Space et de l'Amnesia d'Ibiza l'ont encore un peu plus conforté dans sa position d'homme fort de la scène électro actuelle.

Nous parlions il y a peu de son LP Charmer sorti fin 2015 ainsi que des excellents remixes de "Liquid Spirit" (Gregory Porter) et "Omen" (Disclosure), le voilà aujourd'hui à la tête d'un tout autre projet, celui de la compilation mixée. Ayant initié un premier cycle de soirées thématiques baptisé The Masquerade - concept qu'il a fort bien su exporter de New York à Barcelone en passant par Berlin et Ibiza - Claptone matérialise en toute logique la folie de ces ambiances live dans une collection de 32 titres house triés sur le volet, dont certains ont spécialement été pensés pour l'occasion.

Cette première compilation mixée officielle, Masquerade mixed by Claptone, se divise en deux sets: Night Mix et Day Mix. Le premier est taillé pour enflammer le dancefloor tandis que le second, plus cool, est plutôt dédiée à rythmer l'apéro en before. Le Dj s'est amusé à déconstruire, décomposer, rassembler et retravaillé des classiques, devenus remixes sous ses doigts experts puis edits, puis samples puis musique...



3 titres exclusifs créés pour ce mixe se dégagent et figurent parmi l'Album Sampler qui paraîtra aussi chez Defected quelques jours en avance.
Dans l'énorme "The First Time Free", Claptone marrie avec son groove si caractéristique le célèbre riff de guitare du tube house "Free" d'Ultra Naté, paru en 1997 chez Strictly Rhythm, aux vocaux de "The First Time" que Roland Clarke produisait en 2005 pour Fluential.
Avec "Planet Rock", le producteur révèle ses affinités avec l'electro et son agilité à transcender les époques, il offre un remix du titre de The Powers That Be sorti en 2003 chez Defected, faisant lui-même écho à la version 90's old school d'Afrika Bambaataa.
"God Made Me Feel It" est un edit explosif combinant le récent "Can You Feel It" de Simion avec le classique "God Made Me Phunky" d'MD X-Spress alias Mike Dunn (1994)... Une tuerie!