Das Kapital - Kind Of Red (Label Bleu/L’Autre
Distribution)
A une époque où l’idée d’Union Européenne n’a jamais autant
été remise en question, le trio jazz
Das Kapital nous offre un bel
exemple de cohabitation et de collaboration entre nationalités voisines. En
effet le saxophoniste allemand Daniel
Herdmann, le batteur français Edward
Perraud et le guitariste danois Hasse
Poulsen ont composé l’opus à part égal, 9 titres qui dégagent une énergie
communicatrice qui n’est pas uniquement puisée dans le jazz, mais largement enrichie de sonorités folk, rock et pop.
L’évènement déclencheur de ce troisième disque Kind Of Red est un concert de Wayne Shorter donné à Berlin fin 2012,
les musiciens se sont imprégnés de sa maîtrise du temps, de la clarté de son
jeu, de l’évidence de ses variations et de son art du dialogue. Et comme l’aura
de Miles Davis est à jamais accolée
à la sienne, il semblait logique au trio de faire un clin d’œil au Kind Of Bue du trompettiste…
Les mélodies sont
accrocheuses à l’instar de l’ouverture intitulée Webstern et écrite par le percussionniste nantais, les cordes
métalliques et les peux tendues aux timbres étouffés créent une atmosphère acoustique plutôt intimiste,
une ballade cependant animée par le lyrisme structuré du sax et l’envolée
rageuse de la guitare électrique.
Claudia’s Choice
nous plonge dans une ambiance bien différente, aquatique et légèrement
dissonante, d’une lenteur étourdissante…
Iris, après une
minute d’une ritournelle hypnotique, est porté par un thème de western interprété
par Hasse à grands renforts de
vibrato… Puis se termine en douceur sous le souffle apaisant de Daniel.
Ce dernier est d’ailleurs à l’origine du sombre Macht Nix, In Der Mitte Ist Noch Platz,
on y retrouve les impressions ressenties durant l’écoute de Claudia’s Choice, des accords de guitare
plaqués qui s’éternisent, parsemés de quelques coups de cymbales et de quelques
notes de sax ébauchant une mélodie brutale et saccadée.
Just Like That se
rapproche davantage d’un jazz plus rassurant et d’un swing plus balisé, sax et
guitare échangent autour d’une assise rythmique au tempo soutenu.
Pour sa deuxième composition Jenseits Von Gut Und Böse (titre d’un ouvrage de Nietzsche Par delà Le Bien et Le Mal : Prélude d’une Philosophie de l’Avenir),
Daniel Erdmann conçoit une longue
introduction rythmée par un tic tac abrutissant, puis laisse les accords folk
de la guitare prendre le relais, le saxophoniste entame alors une improvisation
de près de 2 minutes.
Hasse nous offre
ensuite son blues acoustique et dissonant How
Long, So Low, une plage musicale dépouillée mais expressive à l’image de l’étrange
ballade Nothing Will Ever Be Enough Again,
où le silence est d’or et la retenue de rigueur !
L’énergique Au fond
des yeux aux airs d’hymne pop/rock de l’époque Woodstock rompt le silence
et le calme apparent de King Of Red
avec son déploiement de couleurs criardes et saturées…
Bref, Das Kapital
accouche d’un disque barré, parfois fluide et parfois complexe, il repose sur
l’écoute et le partage des dessins mélodiques de ses trois protagonistes et sur
leurs intuitions à remplir les espaces de chaque morceau.
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