C'est dans une frénésie de sonorités fusionnant l'héritage et
l'énergie du free jazz, des musiques orientales, klezmer et Esteuropéennes que
s'ouvre l'album Mauvaise Langue, un
recueil hypnotique de 4 compositions dominées par l'improvisation fougueuse et
inspirée des 3 solistes, Florian Demonsant
à l'accordéon, Laurent Clouet à la
clarinette turque et Wassim Halal
aux percussions. Refusant à raison d'être catalogué dans la case jazz trop souvent
considérée comme fourre-tout, Bey.Ler.Bey
élabore une identité sonore singulière basée sur le désir de mélanger,
entre autres, les codes des folklores
tziganes, turcs et bulgares. Inventif, aventureux et complice, le trio
balaye d'un souffle les carcans délimitant les musiques dites savantes et populaires,
écrites et improvisées, jazz et world…
Yom - Songs
For The Old Man (Planètes Rouges/Full Rhizome/Buda Musique)
Nous ayant habitué à ses pérégrinations dans le répertoire klezmer qu'il hérite des racines juives
transylvaniennes de sa mère, le clarinettiste français Guillaume Humery alias Yom
s'écarte un temps de la musique des joies et des peines ashkénazes qu'il n'a de
cesse de revisiter depuis 7 albums, pour nous offrir Songs For The Old Man, un recueil de 9 titres instrumentaux aux sonorités folk, country et rock'n'roll.
Conçu comme un hommage à son père exilé aux Etats-Unis dans les années 50, le
disque, qui paraîtra le 15 Avril prochain, fusionne habilement et avec beaucoup de tendresse les influences d'Europe de l'Est à l'esprit roots de l'americana. Accompagné de l'arrangeur, directeur
artistique et guitariste Aurélien
Naffrichoux qu'il côtoie depuis plus de 5 ans, le compositeur s'entoure de Guillaume Magne aux guitares, dobro et
banjo, de Sylvain Daniel à la basse
ainsi que de Mathieu Penot à la
batterie. Un voyage émouvant qui nous révèle une clarinette klezmer plus parlante que jamais !
Forcément jamais au même endroit ou cantonné au même espace
musical, le clarinettiste new-yorkais David
Krakauer nous présente son dernier projet mené en collaboration avec le
producteur et multi-instrumentiste Mickaël
Charry, une des deux têtes pensantes du collectif électro/worldtoulousain
Anakronic.
Mixant leur intérêt commun pour la musique klezmer aux sonorités
urbaines du hip-hop, du dub, du big beat ou de la drum & bass, Anakronic/Krakauer bouscule les conventions, innove à grands coups
de sabots, se jouant du formalisme et fusionnant
l'organique à l'électronique dans une joyeuse fête des sens où l'esprit,
berné par le groove contagieux du
bassiste/réalisateur Ludovic L.
Kierasinski et les syncopes
diaboliques du batteur Ghislain
Rivera, ne fait plus trop de distinction entre la composante numérique et
la matière analogique. Fait de remix,
de ré-edit, de re-work, de découpage, de décomposition et de recomposition, l'album festif télescope
allègrement tradition juive d'Europe de l'Est et expérimentation délurée et
débridée de la machine !
A noter les excellentes interventions de la rappeuse américaine Taron Benson dans "East River Angel II" et de l'accordéoniste Vincent Peirani"Human Tribe"qui nous rappelle une phrase que citait l'Anakronic Electro Orkestra en 2013: "Nous prônons l'appropriation de toutes les cultures".
Jonathan Orland – Small Talk (PJU/Absilone/Socadisc)
Mêlant son esprit d’aventure inspiré par le jazz moderne aux sonorités d’Europe de l’Est et klezmer, le jeune saxophoniste alto Jonathan Orland publie son second opus
intitulé Small Talk. Entouré du
contrebassiste Yoni Zelnik, du
batteur Donald Kontomaou (fils de la
diva Elizabeth) et du guitariste prodige originaire de Salvador de Bahia Nelson Veras, il interprète avec éloquence,
exigence mélodique et qualité harmonique 12 titres, dont 8 compositions et 4
reprises.
Après son premier Homes,
enregistré en quintet à New York avec d’anciens collègues de promo du Berkelee College of Music où il a
étudié auprès de George Garzone et Joe Lovano, il organise régulièrement des
sessions avec Yoni puis Donald et de la rencontre avec Nelson naîtra peu à peu l’envie de
graver l’interaction et la complicité du quartet en studio d’enregistrement.
Comme l’indique le titre de l’album Small Talk qui se traduit par « conversation légère et
spontanée », la liberté est un des maître-mots du projet, chaque musicien exprime
sa créativité au travers de thèmes inspirés du répertoire traditionnel yiddish (Reysele de Mordechai
Gebirtig) et du folklore des balkans
(Be There). Cependant le swing et l’importance de l’improvisation
demeurent omniprésents, nous n’avons qu’à écouter Played Twice de Thelonious
Monk,For Heaven’s Sake immortalisé notamment par Chet Baker, ou bien Falling
Grace du bassiste Steve Swallow.
David
Krakauer – The Big Picture (Label Bleu/L’Autre Distribution)
Le dernier projet mené par le clarinettiste David Krakauer nommé The Big Picture se propose de revisiter des thèmes de musiques de films
célèbres composés par les géants du genre, les mélodies immuables de Nicola Piovani (dans Life Is Beautiful), Randy Newman (dans Avalon)
ou Mel Brooks (dans The Producers), trônent ainsi aux côtés
de titres tout aussi emblématiques légués par Sidney Bechet (Si Tu Vois Ma
Mère du film Midnight In Paris
de Woody Allen, véritable idole pour
le musicien), Serguei Prokofiev (March From The Love Of Three Oranges) ou
encore Johnny Green (Body And Soul). Mêlant comme à son
habitude les sonorités de la musique
classique au jazz et au klezmer, l’artiste novateur explore l’identité
juive à travers le cinéma moderne américain.
Willkommen,
extrait du film Cabaret de Bob Fosse, ouvre The Big Picture et donne le ton, évoquant avec une légèreté
apparente et un swing communicatif
la montée du fascisme dans les années 30. David
aime jouer avec la charge émotionnelle que dégagent ces mélodies touchantes,
confrontant souvent l’horreur au comique (Keep
It Gay), le déracinement à l’espoir (The
Family)… Entouré d’un quintet efficace et réactif, il rend hommage aux
icônes juives américaines comme Barbara
Streisand dans People tiré de Funny Girl ou Roman Polansky avec Moving
From The Ghetto issu du cultissime The
Pianist.
A noter la participation dans l’excellent réarrangement de Si Tu Vois Ma Mère, de la contrebassiste
Nikki Parrott (Michel Legrand, Randy
Brecker, Clarke Terry…), de la guitariste Sheryl
Bailey (Richard Bona, Irene Cara…) et du Dj Keepalive.