Pour l'avoir vu en concert, je peux assurer que le jazzman Christian Brun est un véritable acrobate de 6 cordes, à la sonorité feutrée et au jeu d'une élégance rare. Forcément, lorsqu'on l'écoute dérouler ses thèmes et ses solos, les figures tutélaires de Wes Montgomery et Pat Metheny surgissent affectueusement, mais Christian Brun a ce petit rien en plus qui lui confère une place à part, loin du devant de la scène, cette acuité et cette capacité à s'intégrer à des projets aussi divers que variés, allant de la pop à l'electro en passant par la soul, toujours en quête de la mélodie idéale ou de l'accord parfait.
12 années se sont écoulées depuis French Songs, son dernier projet personnel présenté en quartet avec Baptiste Trotignon. Il nous revient enfin avec un nouvel opus jazz baptisé très justement Melodicity. Bien entouré comme à son habitude, l'artiste nous offre 10 compositions subtiles à l'écriture délicate et envoutante. Ses acolytes Damien Argentieri au Fender Rhodes et piano, Yoni Zelnik à la contrebasse et Manu Franchi à la batterie servent à merveille les ballades suspendues et nocturnes que sont la touchante "Song For Eliott" ou la reposante "Temps Calme", mais se prêtent aussi intelligemment au jeu plus musclé de titres comme "Melodicity Part I et Part II", "Waltz In D Major" ou l'excellent "A Breath Of Fresh Air", dans lequel murit un groove ravageur où plane la trompette ensorcelante d'un autre héros du jazz hexagonal, Alex Tassel.
Deux hommages vibrants figurent au programme, le premier est dédié aux victimes du terrorisme "For Those Who Stayed On The Ground" et le second au trompettiste niçois François Chassagnite, disparu en 2011, "I Remember Chass".
On notera que l'album paraît sur un jeune label indépendant que j'affectionne particulièrement, We See Music Records, piloté par le claviériste Matthieu Marthouret.