Une nouvelle diva se dévoile enfin au grand jour et illumine
de son charisme et de son charme incomparable le paysage musical français.
Présente sur scène depuis déjà plusieurs années, Sandra Nkaké, jeune parisienne
d’origine camerounaise, fit parler plus largement d’elle lors de sa
collaboration avec l’artiste français Booster sur l’excellentissime titre
« Sex Friend », playlisté par radio Nova l’année dernière. Un public
séduit par son sens du groove et sa sensualité ravageuse découvre alors une
artiste atypique, anticonformiste, sincère et généreuse. La silhouette de Grace
Jones et une voix qui mêle l’intensité d’Abbey Lincoln à la virtuosité de Bobby
Mc Ferrin ou d’Al Jarreau, participent à créer, autour de la chanteuse, une
aura émotionnelle toute particulière. Sandra attire, attise même, sa timidité
s’efface dès qu’il s’agit de partager, de donner pour donner
(« Happy »). Son premier opus intitulé « Mansaadi » (petite
mère) est un hommage à sa défunte mère (« Mansaadi »), un éloge à
l’amour (« Time Healed Me ») et aussi un clin d’œil à ses racines
africaines (« I Miss My Land » « Souffles »).
Longtemps déchirée entre le Cameroun et la France, « la petite
blanche » comme on la désignait là-bas, est en quête d’africanité, la
sienne et pas celle qu’on veut lui donner (« Stay True »). Le titre
« La Mauvaise Réputation » écrit par George Brassens, semble donc
avoir était taillé pour la sculpturale Sandra qui l’interprète d’une façon très
personnelle sur un rythme joué en beat box minimaliste. Le morceau résume à mon
sens un album profondément soul (« A New Shore ») qui visite sans
vergogne le funk (« Yayaya »), la pop, le jazz (« I’ve Been
Loving You ») et le gospel (« The Way You Walk »). Sandra Nkaké
s’affirme en femme libre, sensible et instinctive, ni noire ni blanche, mais
les deux à la fois…Une merveille !
Le mélange des genres relève parfois d’un exercice périlleux
se soldant souvent par des productions sans grand intérêt, mais Sa Ding Ding,
compositrice, danseuse, auteur et chanteuse d’origine Mongole, a trouvé un accord
séduisant entre musiques folkloriques de l’est ancrées dans les traditions
tibétaines, mongoles et chinoises puis nappes instrumentales pop électroniques
héritées de l’occident. Pressentie comme la future « Björk mongole »,
son premier opus distribué hors de Chine, « Alive », s’est vendu à
plus de 2 millions d’exemplaires dans son pays et la belle s’est vu décerner un
BBC Music Award à Londres. Née en 1983, son enfance nomade lui a appris l’amour
des grands espaces, des hommes, de leurs coutumes et de leurs langues, Sa Ding
Ding chante en tibétain, sanskrit et aussi en lagu, une langue de son
invention, inspirée par sa grand-mère. Tout en s’intéressant au bouddhisme et
en pratiquant la cithare chinoise, elle commence à développer un langage musical
personnel alliant son goût pour la pop occidentale et les boucles électroniques
aux sonorités traditionnelles et à sa voix enfantine. Se considérant comme « une
ambassadrice des cultures minoritaires en Chine », Sa D.D. assume par
ailleurs son côté clinquant et son goût du kitch, elle n’hésite pas à
s’afficher dans les splendides tenues qu’elle se confectionne et que l’on peut
apprécier sur la pochette de son album. Une découverte à suivre de près
puisqu’un prochain disque est en préparation.
Rodrigo y
Gabriella – « Live In Japan »
(Rubyworks Records/Because Music)
Remplir un stade de foot en jouant du Métal avec deux
guitares acoustiques ! Un pari gonflé qu’a su relever avec panache et
virtuosité le duo mexicain expatrié à Dublin Rodrigo (Sanchez) et Gabriella
(Quintero). En 2006 sort un album grandiose, voguant dans les eaux
bouillonnantes d’une world métissée de hard rock et rythmée par l’énergie du
flamenco , il se vend à plus de 500 000 exemplaires dans le monde et se
place dès sa sortie à la première place des charts irlandais devant les Artic
Monkeys et Johnny Cash. Ce troisième opus intitulé « Roberto y
Gabriela »scotche alors un public
enflammé par la rythmique rapide et percussive de Gab et les solos ultrarapides
et mélodieux de Rob. Des tournées continuelles en Europe, en Australie et aux
Etats-Unis leur assurent un succès sans faille, et en 2008, la sortie de l’enregistrement du « Live In
Japan » (capturé au Tokyo’s Duo Club en Mars dernier) réalisé lors de leur
tournée au pays du soleil levant immortalise en 14 titres et 5 vidéos (sur le
DVD bonus) une énergie et des sonorités qu’ils définissent eux-mêmes comme une
« Fusion » : « il y a essentiellement des harmonies et des
rythmes latinos mais la structure est rock,… quand on est fan de métal et
guitariste il y a certains putains de solos qu'on ne se lasse pas d'entendre! ».
C’est dans cet état d’esprit rock’n’roll qu’ils reprennent d’ailleurs le titre
phare des Led Zep « Stairway To Heaven » ou encore
« Orion » de Metallica (écoutés respectivement 520 000 fois et 700 000
fois sur leur page myspace). Depuis leur rencontre à la Casa De Cultura de
Mexico le chemin parcouru par le duo a été semé d’embuches et de difficultés
mais le travail, la persévérance et surtout le talent exceptionnel des deux
pistoleros latinos auront eu raison de ces tracas pour le plus grand bonheur de
leurs aficionados.
Richard
Bona « The Ten shades Of Blues » (Universal Music Jazz France)
Le métissage
musical est le cœur de ce sublime projet intitulé « The Ten shades Of
Blues », son auteur, l’immense bassiste et chanteur Richard Bona, l’a conçu
comme une clef de voûte entre les cultures reposant sur la base universelle qu’est
la musique aux cinq notes: le Blues. Aux côtés de musiciens indiens, le prodige
camerounais signe avec Shiva Tantra un morceau vibrant et touchant par
son intensité spirituelle, ce titre nous transporte le temps de ses 5mn47s à
New Delhi, Bombay ou encore Madras. Rejoint par une des grandes figures de la
scène Nusoul, le multi-instrumentiste nous entraîne ensuite vers des sonorités
plus urbaines où le groove de l’américain Franck McComb excelle et transcende
ses propres mots sur Good Times. L’Afrique enfin, Richard Bona y
souligne le rôle protecteur de la maman M’Bemba Mama (en guests le
guitariste Sylvain Luc et le pianiste Jean-Michel Pilc), nous conseillant d’accepter
le destin plutôt que d’adhérer à des croyances comme celle de la sorcière Kurumalete.
Il prône l’éducation sur Esukudu, rend hommage à son épouse Yara
sur un air grandiose de Rhythm & Blues puis tente de nous faire danser avec
Camer Secrets. The Ten Shades Of Blues est l’histoire d’une aventure vécue
aux quatre coins du monde. Rencontres, partages et échanges en sont les trois
actes, les chapitres se succèdent et racontent la fusion du Jazz avec la
Country et la World Music… Richard Bona l’Alchimiste.
Renaud Garcia-Fons –
« La Linea Del Sur » (Enja Records)
Revisiter le répertoire d’un artiste ou d’un genre musical
est un exercice de style assez répandu chez les jazzmen. Transcender un thème
ou une mélodie est aussi une approche jazzistique de la musique, lorsque la
virtuosité s’accorde à l’inspiration et à l’improvisation. Mais cette
expression de la liberté revêt d’autres formes, Renaud Garcia-Fons a choisi celle du « lien »,« le lien qu’il tisse entre les
différents univers musicaux qui ont baignés son enfance ». La Linea Del Sur, titre de son dernier
opus, réunit les sonorités de l’Espagne, du Maghreb, de l’Europe de l’est ou
encore de l’Inde et les mêle à ses émotions pour en extraire un jazz métissé et
polymorphe. Ce voyage imaginaire dans les contrées élargies d’une méditerranée
plurielle s’organise comme « un recueil de nouvelles », des
instantanés glanés par le contrebassiste au gré de ses rencontres et de ses
influences. Imprégné de toutes ces traditions, La Linea Del Sur Quartet se compose, outre de Renaud, de Kiko à la guitare flamenca, de Pascal Rollando aux percussions et de David Venitucci à l’accordéon. Ils sont
rejoint par une grande voix du flamenco Esperanza
Fernandez, « qui parvient à repousser les frontières de l’Andalousie
jusqu’au Nouveau Monde ». Musique de partage, de découverte, de fusion et
d’improvisation, le jazz de Renaud Garcia-Fons réconcilie musicalité et
virtuosité…La Linea Del Sur brode une étoffe délicate destinée à nous tous qui
venons ou vivons dans les sud d’ici et d’ailleurs.
Chinese Man
- The Groove Sessions DVD (Chinese Man Records/Differ-ant)
Ah ! quand les français touchent aux platines...Les Birdy
Nam Nam n'ont qu'à bien se tenir...Originaire de Marseille, ce trio infernal
composé de deux Djs (Zé Matéo/High Ku) et d'un beatmaker (Sly) fut révélé grâce
à la marque Mercedes en 2006 pour le titre I've Got That Tune. Depuis les
apprentis dragons ont tracé leur route et sont devenus les valeurs sûres d'une
nouvelle scène hip-hop/electro/dub qui s'exporte d'ailleurs à merveille.
Samplant les standards du son Old School, Reggae, Swing, sonorités
psychédéliques des 70's ainsi que les bandes son de films mythiques, ces
disciples de l'homme chinois originaire du fameux mont Wu Tang, balayé et
façonné par le Mistral, nous proposent une rétrospective de leurs aventures
scéniques compilée sur un DVD contenant live, clips et un documentaire
exceptionnel nous livrant les secrets de cet art "marsial" du Kung Fu
Scratching et de ce feu sacré qui les pousse en tournée et les réchauffe en
studio... Libre et zen, Chinese Man semble être au sommet de sa pratique
musicale, il n'hésite à convier à ses côtés MCs et vidéastes aguerris pour
communier et soulever un public en transe..."Make Music Not War"...À
écouter et à VOIR absolument !
Anthony Rouchier, alias A.P.P.A.R.T, est le genre d'artiste
mystérieux sachant bien cacher son jeu. En participant à des projets musicaux
si différents les uns des autres, le portrait de ce niçois d'origine est quasi
impossible à brosser. Lié à la danse, il compose pour l'opéra et le théâtre,
mais parallèlement développe un penchant particulier pour la musique
électronique. Son quatrième opus intitulé Last Vegas est une sorte de vision drum
survoltée et rock'n'roll de la cité du péché. Un temps emprunt d'émerveillement,
au milieu de ces bruits de machines à sous et de musiques synthétiques, la
fièvre du visiteur découvrant la ville mythique où crime, sex et argent
s'entremêlent à grand renfort de coups de feu, de musique country et de beats electro-technoides,
fait place à la débauche et aux abus (Pig Tales), puis vint enfin le
désenchantement, l'illusion se dissipe et c'est alors que surgit le dur retour
à la réalité...L'univers trash et décadent de l'artiste semble s'accorder à
merveille à ce thème plutôt cinématographique qu'est Las Vegas. Après avoir
mené ses explorations, toujours aussi déjantées, dans les musiques latines en
2003 avec Nu Tango ou encore en 2008 avec Flamencotronics, A.P.P.A.R.T. nous
invite aux U.S., qu'il avait précédemment revisité avec Digital Western, en
imposant sa vision très personnelle d'un sujet pourtant déjà bien écumé.