jeudi 5 septembre 2013

Raashan Ahmad - For What You've Lost (Trad Vibe Records/Musicast-Finetunes)


Raashan Ahmad - For What You've Lost (Trad Vibe Records/Musicast-Finetunes)

MC attitré du groupe d'Oakland Crown City Rockers, Raashan Ahmad issu de la scène Hip-Hop West Coast, impose son flow cool et maîtrisé sur des productions chaudes et inspirées. For What You've Lost est le troisième opus solo du rappeur, il se trouve dans la lignée du son de la Native Tongue (A Tribe Called Quest, Jungle Brothers et De La Soul) des années 90 où l'ouverture d'esprit, le lyrisme paisible et les sujets puisés dans le quotidien se côtoyaient sur des échantillons bouclés de Jazz, de Soul et de Funk. Entouré de sacrées pointures - on notera la présence entre autres d'Aloe Blacc et de Gift Of Gab - le californien fait honneur à ses aînés et accouche d'une véritable pépite à classer aux côtés des disques de The Roots, Foreign Exhange, The Procussions ou Blackalicious. L'ombre bienveillante de Jay Dee plane au dessus de cet album qui s'immisce pacifiquement dans nos écouteurs en diffusant une énergie positive et des rythmes enivrants. Bien loin de l'agressivité distillée par le rap U.S. sur les ondes radio, l'efficacité de ce hip-hop conscient et intelligent est une alternative à la pauvreté du bling-bling et autres styles gangsta. Une nécessité absolue...

Peter Von Poehl – May Day (Tôt Ou Tard – VF Musiques/Warner Music France)


Peter Von Poehl – May Day (Tôt Ou Tard – VF Musiques/Warner Music France)

Comment être passé à côté de la magie de ses délicates mélodies sans avoir trouvé la voie qui mène là où poussent les arbres à thé ? Révélé au grand public en 2006 avec le très intimiste « Going Where The Tea Trees Are », le subtil songwriter suédois Peter Von Poehl nous revient avec « May Day ». Un disque différent de son premier opus très « privé », on y découvre en effet une voix, des rythmiques et des arrangements plus déployés, plus expressifs et affirmés. Cet artisan-migrateur de la folk made in Europe, rompu à l’exercice scénique qu’il pratique depuis 3 ans, a choisi de chanter plus fort en injectant chaleur et volubilité maîtrisée à ses ballades, dans un souci croissant « de sentir qu’il y a quelqu’un à l’autre bout, quelqu’un qui écoute ». Conservant les mêmes recettes épicées de ses mixtures instrumentales bien dosées et marquées de son sceau racé de mélodiste de l’intime, Peter Von Poehl a pétri un univers plus ouvert. Dans un petit clin d’œil au mois de Mai « où l’on fait ce qu’il nous plaît »,  il s’est autorisé un écart de conduite en confiant l’écriture de quelques titres à Marie Modiano, connue pour ses tonalités pop-folk. Ce fut « une expérience nouvelle et très excitante » malgré ses premières réticences. Ne cherchez pas à vous faire une idée de May Day en glanant quelques infos à droite ou à gauche…Procurez-le vous !

PAWA UP FIRST – « SCENARIO » et « INTRODUCING NEW DETAILS » (Bassofone/Anticraft)


PAWA UP FIRST – « SCENARIO » et « INTRODUCING NEW DETAILS » (Bassofone/Anticraft)

« Pawa Up First », originaire de Montréal, voit le jour en 2001 sous l’impulsion de Serge Nakauchi Pelletier (à la guitare et au synthétiseur) et de Matt Pontbriand (à la basse et au synthétiseur). Influencé par la musique minimaliste et répétitive de Phillip Glass et celle cinématographique d’Ennio Morricone, le quintette se compose, en plus des synthés et séquenceurs, de la sacro-sainte trinité guitare-basse-batterie. « The Scenario » publié en 2005 et « Introducing New Details » en 2006 ne sont disponibles qu’aujourd’hui en France pour le plus grand bonheur des aficionados de ces univers musicaux plutôt space. Arborant un subtil mélange de rock indé, de hip-hop, de dub et de jazz, le son de Pawa Up First propose un voyage sonore évoluant lentement, présenté dans un tournoiement hypnotique, planant et vibrant. En tant que musique instrumentale, le projet convoque images et réminiscences cinématographiques dont les jalons se posent graduellement, en crescendo, apparaissant et disparaissant dans un mouvement de balancier perpétuel, entêtant et séduisant à la fois. A l’écoute du titre « Ambivalence » extrait de leur dernier opus, l’auditeur se surprend à espérer écouter une mélodie sifflée façon « il était une fois dans l’ouest », l’ombre de Sergio Leone et de son siffleur Curo Savoy ne planent pas loin. Une expérience à découvrir en live avec leurs projections de court-métrages et leur style atmosphérique. Un troisième album pour début 2009…

Paolo Fresu – Concert au cedac de Cimiez le 07/11/2008


Paolo Fresu – Concert au cedac de Cimiez le 07/11/2008

Paolo Fresu est un de ces musiciens de jazz dont le son, le grain et la musicalité parlent à tous. Né en Sardaigne en 1961, la trompette s’impose à lui dés le plus jeune âge et l’accompagne durant toute l’adolescence. Mais ce n’est qu’à l’écoute de Miles Davis et de John Coltrane, à 20 ans, que sa vie bascule dans l’univers de la note bleue, celui des clubs, des jam sessions et de la nuit. Le 7 Novembre dernier, dans la salle Stéphane Grappelli du cedac de Cimiez à Nice, eut lieu une représentation exceptionnelle du trompettiste épaulé par son « Devil Quartet ». Composé de Paolino Dalla Porta à la contrebasse, Bebo Ferra à la guitare et Stefano Bagnoli à la batterie, la salle, comble pour l’occasion, a pu assister à une prestation élégante menée toute en finesse et en douceur. Un éclairage tamisé, des sonorités cool et intimistes, une proximité séduisante que Paolo a cultivée tout au long du concert en plaisantant avec un auditoire conquis, lui contant ses périples de musiciens et sa vie de jeune papa. Certes les fantômes de Miles et de Chet ont flotté toute la soirée autour de la formation italienne, à partir du « Another way to Tombouctou » jusqu’à la dernière « berceuse » du rappel, mais la force de Fresu s’est justement cette capacité à raviver des couleurs connues sans trop en faire, usant de suavité il affiche une personnalité propre, attachante et généreuse. Ses mélodies, souvent d’une simplicité déconcertante, recèlent des trésors harmoniques. La profondeur de ses compositions, la maîtrise de son souffle et le contrôle total de son instrument et de sa boîte à effets mettent en valeur un son feutré et délicat, mêlant mélancolie et nostalgie. Un charme à l’italienne efficace.

Ousmane Kouyaté – « Dabola » (Universal Music Jazz France)


Ousmane Kouyaté – « Dabola » (Universal Music Jazz France)

Dabola est une des cités phares de la République de Guinée, elle est aussi la ville qui vit naître en 1950, l’héritier d’une des plus anciennes dynasties de griots mandingues, le guitariste Ousmane Kouyaté. Après dix-huit ans d’absence dans les bacs et son dernier opus Doumba, le fidèle ami et collaborateur de son compatriote Mory Kanté et du malien Salif Keita, nous revient avec une véritable perle où la tradition musicale millénaire d’Afrique occidentale s’allie aux essences parfumées d’une salsa enivrante « Djellya » (ou un éloge à ses paires, artistes et griots) voire endiablée sur ce sublime titre, interprété en français, « Tenter » (ou un clin d’œil respectueux et affectueux à ses parents et ses modèles). Voué à une carrière d’agriculteur comme son père, Ousmane quitte pourtant l’université en 1977 pour se consacrer entièrement à la musique. En 1979, il enregistre avec Les Ambassadeurs (Salif Keita au chant et Kanté Manfila à la guitare lead)  le titre incontournable « Mandjou », puis au fil de ses collaborations (Joe Zawinul, Hank Jones ou encore le grand Cheick Tidiane Seck), l’envie d’un projet plus personnel fait naître « Bintou Doumbouya » en 1982,  loin de toutes considérations commerciales et pécuniaires, deux albums suivront en 26 ans, jusqu’à « Dabola » prévu pour le 26 Janvier prochain et distribué par Universal Music Jazz France. Installé à Paris après avoir fait escale à Abidjan, Bamako et Dakar, le compositeur, arrangeur et interprète, nous propose une échappée belle en forme d’hommage à sa Guinée natale (« Djamanaké »), à sa ville (« Dabola »), à ses amis (« Nana ») et à la richesse qu’apporte la rencontre, le partage et le voyage (« Fediya »). Artiste humaniste, sage, simple et sincère, Ousmane nous expose sa vision d’un monde qui ne devrait être fait que de respect et d’échange, en toute connaissance de l’autre et de la richesse culturelle qui est sienne…Une philosophie qui fait tristement écho au conflit opposant deux peuples voisins depuis 1948, israélien et palestinien, pour lesquels colère et fondamentalisme écrasent cruellement toute idée de reconnaissance.

Novalima « Coba Coba » (Cumbancha)


Novalima « Coba Coba » (Cumbancha)

Jusqu’à présent la sainte Trinité se composait des trois piliers fondamentaux : Bossa Nova, Radio Nova et Mamie Nova. Aujourd’hui, Novalima vient se joindre au trio. Formation péruvienne fondée en 2001 par Ramon Prieto (claviers), Grimaldo Del Solar (machines), Rafael Morales (guitare) et Carlos Li Carrillo (basse), le son de Novalima prend forme entre Londres, Barcelone, Hong Kong et Lima via quelques échanges d’emails et de mp3. Le projet est simple : intégrer la culture afro-péruvienne dans une approche musicale contemporaine, roots et dance-floor. Pour se faire, le quartet commence par s’entourer de la crème des percussionnistes péruviens, puis sur Coba Coba, leur dernier opus, il se dote même des services du pianiste electro-jazz Mark De Clive-Lowe, de rappeurs cubains, d’un rockeur espagnol ou encore de chanteurs de salsa péruviens. Mixé par un habitué des 4Hero et Da Lata, l’étiquette electro-latino ne convient pourtant pas à ce groupe à géométrie variable. En effet la réussite de Coba Coba résulte d’une savante alchimie alliant le son hérité des esclaves africains mené par les sections rythmiques et mélodiques traditionnelles et la touche branchée et funky de nos globe-trotters lovant les grooves hypnotiques des machines. Mêlant avec maestria les sonorités enivrantes de la salsa, l’énergie dévergondée de l’afrobeat et la liberté maîtrisée des beats électroniques, Novalima rend un hommage vibrant et jouissif à l’Afrique. Entre dub, musiques latines et tout ce qu’il y est bon d’écouter à travers le monde, Coba Coba ravira un très large public.

Nguyêne Lê – Saiyuki (Act Music/Harmonia Mundi)


Nguyêne Lê – Saiyuki (Act Music/Harmonia Mundi)

À l'instar de John McLaughlin ou Pat Metheny, le guitariste français d'origine vietnamienne, Nguyêne Lê ne s'est jamais cantonné à jouer un style musical en particulier. Bien-sur c'est l'école du jazz qui l'a mis sur la voie mais son ouverture d'esprit, ses expériences et son goût naturel pour la découverte et la musique plurielle ont tracé un parcours étonnant fait de rencontres significatives incalculables (Ray Charles pour le Rythm & Blues, Richard Bona ou encore Gil Evans pour le jazz, Cheb Mami ou Kakoli pour la World...). Saiyuki ou Chronique du Voyage vers l'Ouest est un disque subtil et inspiré, où l'est de l'Asie échange avec l'ouest, où le Japon incarnée par la magnifique Mieko Miyazaki au koto flirt avec l'Inde des virtuoses Prabhu Edouard aux tablas et Hariprasad Chaurasia à la flûte bansuri. Rencontre au sommet donc, sous l'égide d'un Nguyêne Lê curieux et fasciné. En dix titres envoutants, même le profane se surprend à rêver éveillé, voguant sur les mélodies enchanteresses tissées par le chant d'une flûte, d'une voix, ou d'un instrument à cordes, puis brodées du motif expressif et complexe des percussions aux trois peaux. Le son de Saiyuki est, pour faire simple, World Jazz ou plus sérieusement, la conjonction de trois traditions musicales (Occident, Inde et  Japon) autour de thèmes qui laissent l'improvisation accorder les cordes et les souffles...Une fabuleuse épopée poétique, une quête mélodique.