jeudi 5 septembre 2013

Dave Holland & Pepe Habichuela - Hands (Universal Music Classics & Jazz France)


Dave Holland & Pepe Habichuela - Hands (Universal Music Classics & Jazz France)


 
 
Les 4 cordes de la contrebasse du jazzman anglais Dave Holland se frottent aux 6 cordes de la guitare flamenca du gitan Pepe Habichuela et la fusion penche naturellement vers l'Andalousie plutôt que vers Londres...Le bassiste s'est imprégné de la beauté et des passions que déploie cette musique du soleil et a fini par s'immerger corps et âme dans la profonde spiritualité du Flamenco. Le résultat de cette rencontre sonne comme un hommage vibrant à un peuple et à sa culture. Tango, rumba et jazz s'y accordent à merveille et dans ce concert de virtuosité et de respect mutuel, deux titres de cette histoire racontée à 4 mains se distinguent, tous deux composés par l'apprenti gitan, The Whirling Dervish et Joyride, deux perles absolues...


David Linx, Maria Joao, Diederik Wissels, Mario Laginha - Follow The Songlines (Naïve)


David Linx, Maria Joao, Diederik Wissels, Mario Laginha - Follow The Songlines (Naïve)

Les rencontres, les accords, le partage, les impressions et les expressions, les couleurs et les textures...autant d'ingrédients qui façonnent une identité musicale propre. Et lorsque l'artisan du projet est David Linx, surprise, audace et grandeur sont forcément au rendez-vous. Imaginez deux voix, deux pianos et un orchestre symphonique qui se croisent et s'entremêlent, bavardent et s'accompagnent ! Partis d'une volonté d'écrire à huit mains le chanteur, entouré de son pianiste Diederick Wissels, de sa chanteuse préférée, la portugaise Maria Joao et son acolyte, le  pianiste Mario Laginha, nous invitent au voyage dans une dimension parallèle où tout n'est qu'énergie du métissage, harmonie et élégance. Quelques ressentis et émotions glanés au gré de déplacements imaginaires ou réels dans ces villes et capitales qui ponctuent l'itinéraire d'artistes ou d'aventuriers, sont exposés dans une collection de compositions tantôt folles et douces, tantôt mélodieuses et entêtantes. Le crooner et génie du swing s'allie à l'éclectisme et au talent de Maria qui vient frotter son portugais à l'anglais dans un concert grandiloquent de cordes et de cuivres de l'orchestre national de Porto dirigé par Dirk Brossé. Follow The Songlines est un projet ambitieux et de toute beauté...Bonne écoute !

mercredi 4 septembre 2013

Manuel Rocheman - "The Touch Of Your Lips" Tribute to Bill Evans (Naïve)


Manuel Rocheman - "The Touch Of Your Lips" Tribute to Bill Evans (Naïve)

Comme pour beaucoup de musiciens, le jazz est un terrain d'expression privilégié, exigent comme la grande musique mais bien plus libre...Comme pour de nombreux pianistes, Oscar Peterson est un modèle incontournable, un monstre sacré au jeu virtuose et mélodieux...Comme pour un bon nombre de mélomanes, une enfance baignant dans la musique favorise les vocations...Mais là où l'histoire de Manuel Rocheman est singulière, au delà du fait d'avoir un temps volé sous l'aile de Martial Solal, c'est qu'il a su faire sensation dès ses premiers disques grâce à son pouvoir d'improvisateur averti et sa palette harmonique très large. Et ainsi bardé de succès médiatiques et de récompenses, son chemin a croisé les grands noms de la scène jazz internationale comme Sara Lazarus ou encore Kyle Eastwood. Puis voilà qu'un The Touch Of Your Lips paraît aujourd'hui chez Naïve. Un hommage inspiré au grand pianiste Bill Evans, loin du plagiat et de la redite, l'album rassemble des reprises (We Will Meet Again) et des compositions personnelles (La Valse des Chipirons) proches de l'univers intimiste et séduisant du maître enchanteur, figure emblématique d'un jazz emprunt d'accents impressionnistes et romantiques classiques. Accompagné par Matthias Allamane à la contrebasse et Matthieu Charazenc à la batterie, le piano de Manuel Rocheman nous donne rendez-vous au coeur de la musique d'un des plus grands jazzmen du XX° siècle.

Mantler – Monody (Tomlab)


Mantler – Monody (Tomlab)

Voici sans aucun doute un des albums les plus touchants qui soient sortis depuis le début de l'année. Mantler alias Chris A. Cummings, originaire de Toronto, dévoile son dernier projet intitulé Monody. Véritable petit bijou soul 70's, smooth jazz et soft pop, l’artiste nous propose une immersion dans son univers intimiste et profond. Sa voix douce qui gémie, hésite, tremble et tâtonne séduit et capte immédiatement l’attention... Ses rythmes lents et planants plantent le décor d'un film à l'histoire ambiguë, grave et légère à la fois, où  son piano électrique Wurlitzer diffuse ça et là ses vapeurs mélodiques atmosphériques chaleureuses et envoutantes puis soudain angoissantes et oppressantes. Mantler change de style et surprend sans cesse, de la ballade pop mélancolique (Also Close The Rainbow) au son white funk (Fresh And Fair) ou à la soul 70's (Fortune Smiled Again et In Stride), ce caméléon musical n'a pas peur des écarts et mène l'auditeur d'un espace à un autre sans aucune faute de goût. Ses berceuses enivrantes et son timbre curieux marquent l'esprit comme peu savent le faire. Monody trouve sa beauté entre la maladresse d'un chant incertain qui devient sexy et la mollesse de ses tempos lents et cotonneux... C'est un disque poétique et nécessaire !

mardi 3 septembre 2013

Luciano – Tribute To The Sun (Cadenza/Module)


Luciano – Tribute To The Sun (Cadenza/Module)

Ceux qui considèrent encore la musique techno comme un bruit assourdissant dénué de mélodie - où seuls les bpm règnent en maître - doivent tendre l'oreille au second opus du Dj-producteur suisse-chilien, Luciano. Intitulé Tribute To The Sun, cet hommage vibrant et ce un clin d'œil sensible aux traditions musicales africaines et sud-américaines est surtout le fruit de 17 années d'expérience du dancefloor.  Mélangeant une rythmique deep house sensuelle à de l'electronica souple et radieuse, la magie de Luciano tient dans son génie à y incorporer des samples à consonances ethniques indéniables. Les voix et les instruments convoqués ici nous donnent une idée de l'ouverture d'esprit du chilien ainsi qu'un aperçu de l'étendue musicale qu'il couvre. Au gré d'un véritable parcours initiatique entre le Mali, la Suisse, le Chili, les Caraïbes ou encore l'Iran, les constructions musicales minimalistes du maître sont à la fois entêtantes et répétitives puis poétiques et terriblement dansantes.  Luciano réconcilie ici le temps des 80 mn de son LP la chaleur des chants et des instruments hérités des suds ensoleillés et la puissance des beats synthétiques et efficaces de ses machines diaboliques. Tribute To The Sun est un disque essentiel d'une profonde richesse musicale...

Erick Truffaz - In Between (EMI)


Erick Truffaz - In Between (EMI)
Un souffle qui personnifie un style de jazz désormais répandu, un jeu lent, des notes qui traînent, un bugle qui souffre, une ambiance sombre et vaporeuse...Bref, la touche de l'helvète Erick Truffaz a fait des émules mais malgré le temps qui passe et les albums qui s'enchaînent, c'est toujours avec autant de plaisir que l'on accueille ses nouveaux projets. Avec In Between, qui succède au splendide triptyque Paris, Mexico, Benarès, le trompettiste retrouve ses fidèles acolytes Marc Erbetta à la batterie et Marcello Guiliani à la basse, et convie le magicien des claviers et ingénieur son Benoît Corboz, qui contribue énormément à la beauté aérienne et planante de l'oeuvre. Cette éloge à la lenteur, triste et mélancolique, se développe en 10 titres, on y croise ici Pink Floyd et là Morcheeba, puis une rythmique funky Lost In Bogota nous ranime avant de replonger dans Fûjin et sa profondeur digne du Grand Bleu d'Eric Serra. Balbec nous rappelle tout de même que c'est bien de jazz dont il s'agit, mais comme l'indique le nom du disque, Erick mène sa barque entre deux eaux. Il n'hésite pas à y mêler des thèmes pop, emmenés par le timbre intimiste, spontané et touchant de la voix de Sophie Hunger. En deux chansons d'amour dont la reprise de Bob Dylan intitulée Dirge, ardente et déchirante, puis la sublime perle Let me go ! la suissesse nous persuade, comme si c'est encore nécessaire, du talent d'un artiste écorché plongé dans l'abîme d'une sensibilité exacerbée.

Andreya Triana - Lost Where I Belong (Ninja Tunes)


Andreya Triana - Lost Where I Belong (Ninja Tunes)

Jeune chanteuse anglaise, la belle Andreya se fait rapidement remarquer par Ninja Tunes. Apparue en featuring au côté du producteur hip-hop Flying Lotus et du célèbre Mr Scruff entre 2007 et 2008, la rencontre décisive qui lui permettra de se révéler est celle de Simon Green aka Bonobo. Ce dernier publie en 2009 le premier single de son nouvel opus intitulé Black Sands. Posant sa voix envoûtante sur The Keeper, Andreya devient alors l'égérie de l'artiste trip-hop qui produisit courant 2010 son premier disque Lost Where I Belong. Profondément soul, la voix d'Andreya Triana hypnotise, tour à tour elle exprime fragilité et sensualité puis pureté et puissance à l'image du sublime titre éponyme...Ce petit bijou est à ranger du côté des meilleurs découvertes electro/soul de l'année.