Henri Texier – Sky Dancers (Label Bleu/L'Autre Distribution)
L'immense contrebassiste français Henri Texier nous présente son nouveau projet qu'il dédie aux peuples
Amérindiens, intitulé Sky Dancers (nom
que se donnent ces ouvriers de l'impossible qui réalisent les travaux acrobatiques
lors de l'édification des gratte-ciels). On se souvient qu'il y a 25 ans il abordait
déjà ce thème avec son Azur Quartet et
l'album An Indian's Week. Aujourd'hui
entouré de ses fidèles acolytes du Hope
Quartet, le batteur Louis Moutin,
les saxophonistes François Corneloup
et Sébastien Texier (fils de …), le septuagénaire
invite pour la première fois deux musiciens désormais incontournables de la
scène jazz hexagonale, le tout jeune pianiste au touché délicat Armel Dupas (qui vient de publier son
très réussi Upriver) et le
guitariste éclectique aux accents électriques puissants, Nguyên Lê.
Lui qui a joué avec les plus grands artistes américains de Bill Coleman à Chet Baker en passant par Donald
Byrd, Dexter Gordon et Bud Powell, n'a eu de cesse au cours de
sa longue carrière de se renouveler. S'imprégnant du free jazz et du bebop outre
atlantiques, il contribue pour beaucoup à l'évolution du jazz en Europe dans
les années 70 et 80, développant un goût particulier pour l'exploration des
sonorités world. Le trio emblématique qu'il forme avec le batteur Aldo Romano et le clarinettiste Louis Sclavis le mènera par exemple à 3
reprises sur les sentiers d'une Afrique vue par le photographe Guy Le Querrec
et ses racines bretonnes le rapprocheront des musiques celtiques.
Ce Sky Dancers sextet
nous invite à découvrir 9 compositions imaginées pour les festivals Europa Jazz
du Mans, Jazz sous les Pommiers à Coutances et Rencontres de l'Erdre à Nantes, qu'Henri a pensé en hommage aux peuples de
la terre Mapuche (originaire du Chili
et d'Argentine) et de la paix Hopi (issu
d'Amérique du Nord), aux indiens des plaines Dakota Mab, à la nation Comanche
et aux célèbres Navajo (Navajo Dream).
Forcément engagé contre le traitement réservé à ces minorités, l'imposant Texier oppose à l'indifférence générale
des Etats concernés son jazz citoyen inspiré
et massif, à l'élégance classique,
au groove contagieux et arborant
parfois des reflets fusion punchy,
notamment servis par un Nguyên Lê électrisant
qui brille de mille feu et qui s'intègre à merveille dans cette nouvelle formation
détonante.
Installé sur les excellentes assises rythmiques de Louis (jumeau du contrebassiste François
avec qui il forme le Moutin Réunion Quartet), Armel nous montre ici un autre aspect de son talent, imposant une
sensibilité armée d'un swing
époustouflant et vigoureux au piano comme aux claviers (il excelle dans le
redoutable Dakota Mab, véritable petit
bijou). Le tandem Texier fils et Corneloup accordent leurs saxophones
alto et baryton sur des mélodies captivantes comme dans He Was Just Shinning, dédié à Paul
Motian, assènent des "souffles de poing" dans le très énergique Mapuche ou créent une nappe vaporeuse
dans le touchant Paco Atao adressé au
percussionniste caribéen disparu, Paco Charlery.
Comme à son habitude, le chef de tribu généreux et passionné
Henri Texier convoque la fine fleure
du jazz et la laisse s'épanouir et se nourrir de ses notes afin d'accéder à de
nouveaux espaces musicaux.
Ci dessous en live dans une formule sans pianiste
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