Nuru Kane – Number One Bus (Iris Music/Harmonia Mundi)
Le blues s'invite au Sénégal et se colore au gré des
incantations magiques d'un alchimiste de la six cordes et du guembri
(instrument guinéen à 3 cordes). Nuru Kane publie son second opus intitulé
Number One Bus, il réunie John Lee Hooker et Keziah Jones dans un métissage
diabolique où se côtoient m'balax sénégalais, chants et rythmes mandingues,
soufies ou encore gnawa. En français, anglais ou wolof l'énergie qu'exhale le
chant de Nuru est jouissive et colorée, ses messages de paix et de
réconciliation irradient de joie l'auditeur dont les pieds se prennent dans une
tourmente et battent la cadence accompagnant les percussions, la kora, le oud,
le n'goni ou encore le violon de ses acolytes The BFGnawa. Le Number One Bus
était la ligne qu'empruntait le musicien lorsqu'il aller jouer dans les rues de
Londres, les passagers et leurs humeurs l'ont inspirés et ont tracés l'ébauche
de quelques textes comme Salam où il nous est conseillé de se rappeler de
l'appel du griot pour saluer son voisin en dansant... « Merci, au
revoir madame, pardon, merci monsieur ». Number One Bus est un disque
rafraîchissant et nécessaire, à conseiller pour ses vertus médicinales !
Madagascar est une terre en souffrance, la misère d'un côté
et la surexploitation des richesses naturelles de l 'autre. Razia Said,
enfant du pays, revenant dans son île après un long exil constate les
importants traumatismes subit par la perle de l'océan indien, la chanteuse
s'engage alors dans une quête humaniste et écologique qui prend la forme d'un
disque intitulé Zebu Nation. Entourée des meilleurs musiciens malgaches la
belle métisse retrouve les airs qui l'ont bercé enfant et accouche enfin d'un
projet laborieux qui l'occupe depuis près de 4 ans. Désiré et nécessaire à son
épanouissement personnel et artistique, Zebu Nation est avant tout une œuvre
engagée contre la déforestation et les dommages causés par le dérèglement
climatique. Musicalement il est la somme des périples de Razia à travers le
monde et des influences décisives qu'ont été Bob Marley, Geoffrey Oryema ou
encore Fela Kuti. Sensible aux sonorités du R&B, du jazz, et de la pop
c'est le côté ethnique des percussions africaines qui rythme ses mélodies
enivrantes et ensoleillées. A l'instar de Susheela Rahman sa voix douce et
envoutante chante la richesse de la fusion entre tradition et modernité. Une
approche touchante de la culture Malgache associée à une bonne cause...
Il y a des voix qui touchent dès la première écoute, un
grain, une intonation ou un accent particulier et la magie opère. Layori est
une de ses chanteuses qui invitent au voyage. D'origine nigériane elle parcourt
le monde depuis son enfance entre New York, Lisbonne ou Londres. Sa carrière de
mannequin l'éloignant de sa terre natale, la musique devient rapidement un
moyen de renouer avec ses origines. Son premier opus justement intitulé Origin
nous plonge d'emblée dans l'âme africaine de Layori (qui se traduit
« sauvée par la grâce ») avec son 1er single « Dada »,
chanté en Yoruba sur une production aux tonalités jazzy où la guitare comme
dans le reste du disque est omniprésente. La découverte d'Origin conduit rapidement
vers des territoires où Tracy Chapman rencontre Sade et Nina Simone, où la folk
arbore des couleurs soul et des nuances jazz. Puissante et fragile, la voix de
la sculpturale Stéphanie Coker vibre sur les accords de son acolyte Wally
Warning dans des ballades enivrantes et nostalgiques où la langue, qu'elle soit
l'anglais, l'espagnol ou le Yoruba transmet un message de paix et d'amour. Une
découverte soul venue d'Afrique à découvrir d'urgence...
LAXULA
(A.M.A) – « In X-ile »
(Via Lactea/MOSAIC
MUSIC)
Une rencontre fortuite à Londres puis une aventure en
Espagne et voici que le projet de la chanteuse et compositrice Monté Palafox prend forme : modelé
dans un amas de glaise et cendres mêlées à du sang, c’est un objet étrange et
séduisant que nous livre ici LaXula
(A.M.A).Intitulé « In
X-ile », ce monstre, cet hybride né de la rencontre d’influences
telles que la Copla, le Boléro, le Tango, les musiques Kletzmer, Gothic et
Balkan Gipsy, est déconcertant et enivrant à la fois. Rien n’est figé,
« In X-ile » grouille de murmures et de vibrations organiques ;
sonorités psychédéliques, serpents et flammes s’entrelacent dans un concert
dédié à la femme, à la mère, au « sexe cyclopéen ». « La Boulette », hymne
électronique, hip-hop et flamenco façon Ojos
de Brujo, ouvre ce bal des vampires puis s’en suit un majestueux tango
gipsy « Soberbia », que l’anglais
Charlie Gillett de la radio BBC a compilé dans son « The Sound Of The
World ». LaXula aurait eu sa place dans la B.O. d’ « Une Nuit En
Enfer » de Quentin Tarantino, en effet folie quasi-burlesque et sensualité
malsaine se côtoient lors d’un voyage surréaliste menant tout droit en enfer.
Le van de cette fine équipe fait la route à la scoobigang dans un trip néo-gipsy
où joie et ivresse se confondent avec désespoir et douleur, où la souffrance de
l’exile embrasse le plaisir du voyage et de la découverte de l’autre, des
autres.
Remarquée par Keziah Jones alors qu’il venait saluer son
producteur Russell Elevado (D’Angelo, Alicia Keys…) à New York, l’histoire de
Krystle Warren est celle d’une jeune femme originaire de Kansas City qui décide
à 13 ans, devant un documentaire TV sur les Beatles, de devenir musicienne.
Influencée par Bill Withers pour sa folk métissée de soul, par Nina Simone et la
tessiture si profonde et expressive de sa voix ou encore par la légende texane
de la country music Willie Nelson, cette jeune américaine commence à se
produire dès ses 20 ans et se forme au gré de rencontres extraordinaires dans
les clubs de sa ville natale. Accompagnée de son groupe The Faculty formé à New
York, elle enregistre ses premiers morceaux au fameux Electric Lady Studio, et
un premier album s’annonce, « Circles ». Proche de l’intensité et de
la puissance naturelle de Tracy Chapman, Krystle Warren se lance à l’assaut du
public américain armée de sa guitare folk et d’une voix chaude et rocailleuse
imbibée de soul et de blues, le succès ne tarde pas ! Elle arrive en
France avec sa sensualité discrète et sa timidité maladive pour assurer la
première partie de la tournée du prince du Blufunk. Une réelle émotion dès la
première écoute !
KASSE MADY DIABATE - Manden Djeli Kan (Universal Music Jazz France)
Caste de griots mandingues appelés les « Djelis »,
la dynastie Diabaté appartient depuis
plus de 700 ans à cette famille gardienne des traditions maliennes. Kassé
Mady Diabaté est un de ces prophètes, son instrument est sa voix. Ayant
reçu en hommage à son arrière grand-père le nom de « Kassé Mady » -
pleure Mohamed – il sait traduire à la perfection l’émotion et les pulsions
d’un peuple par un chant libérateur qui allie la longue tradition classique
mandingue à la musique populaire. En 35 ans, il n’a jamais cessé de toucher son
auditoire et sans comprendre ni la langue, ni la culture, le profane se sent
lui aussi submergé par d’étranges frissons car la musicalité de cet art est
universelle. Dans ce dernier opus intitulé Manden Djeli Kan, les larmes ne
tardent pas à couler, les thèmes abordés par le griot se réfèrent en effet à
l’homme et à sa condition d’être sensible et mortel. Kassé Mady rend hommage,
avertie et conseille, puis il évoque les seins des jeunes filles…histoire de
confondre passé et présent dans un style pop arrangé avec des instruments
traditionnels tels que le balafon, le ngoni, le tama et autres percussions,
sans oublier la cora avec les frères Diabaté : Toumani et Madou. Une
citation remarquable de l’écrivain Amadou Ampaté Bah évoque l’importance de
cette transmission orale des traditions, des contes et de l’histoire africaine:
« En Afrique un vieillard qui meurt
c’est une bibliothèque qui brûle. »…A méditer…
C'est l'histoire d'un jeune indien d'origine kashmiri pundit
qui vivait avec ses parents à Meerut près de Delhi. Bien décidé à se faire un
nom et une carrière dans la musique il quitte la maison à 14 ans en quête d'un
guru pouvant le former mais il réalise rapidement que la solution est en lui
« moi le maître et moi le disciple ». Arrivé à Mumbai en 2001,
Kailash Kher débute péniblement la chanson dans la publicité et les petites
prestations payées au rabais. Puis de jingles en musiques de films Bollywood il
rencontre enfin le succès et devient une véritable icône avec de très
nombreuses apparitions à la radio, au cinéma et à la télévision (une récente
participation comme juge à l'émission de La Nouvelle Star version indienne).
Son troisième opus intitulé « Yatra (Nomadic Souls) » fait suite à
des disques déjà encensés par le grand public indien, à la différence qu'il est
pour la première fois distribué à l'étranger. Composé de nouvelles chansons, de
réenregistrements et de versions acoustiques de ses succès, la voix puissante
et racée de la pop star est accompagnée par son groupe Kailasa, de fidèles
acolytes rompus à la scène pop rock indienne. La tradition sufi et le folklore
populaire s'imprègnent de quelques discrètes incursions dans les musiques
lounge, new-age, dance, rock et folk pour un subtil métissage s'adressant
autant à l'esprit qu'au corps. Parlant d'amour, de désir, de philosophie, de
religion et de la terre mère, Kailash nous fait partager un bref aperçu de sa
culture avec émotion et générosité.