Gaël Faye - Lundi Méchant (Excuse My French)
La poésie urbaine et chaloupée de Gaël Faye, son flow entêtant et son verbe incisif, sont une fois de plus à l'ouvrage dans ce nouvel opus, que l'auteur-compositeur-interprète, rappeur et écrivain franco-rwandais, publiait le 06 Novembre dernier sur le label indépendant Excuse My French.Nommé dans la catégorie « Album de l'année » des Victoires de la musique 2021, ce second effort baptisé Lundi Méchant, rassemble 14 titres, tous écrits par l'artiste à l'exception de "Seuls et vaincus", poème vibrant composé par l'ancienne garde des Sceaux, Christiane Taubira. Reprenant le nom des soirées festives et anticonformistes du 5 SUR 5 - une boîte de nuit emblématique du quartier populaire et cosmopolite de Bwiza (à Bujumbura, capitale économique du Burundi) - Gaël Faye nous invite à se soustraire à l'ordre établi et d'avancer à contre courant. « Se rendre aux "Lundi Méchant" c’est faire un pied de nez à la société moderne qui encadre l’individu dans des horaires et des carcans qui voudraient que l’on attende sagement le week-end pour s’amuser. »
Fuyant la guerre civile du Burundi et le génocide des Tutsis au Rwanda, il débarque à Paris en 1995 et découvre dans l'écriture et le hip-hop un exutoire à sa douleur et à sa colère. Face à cet exil forcé, au déracinement et à la perte de ses repères, il se reconstruit, poursuit des études dans la finance puis part deux ans pour la City, dans les bureaux d'un fonds d'investissement. La musique prendra finalement le dessus et son premier opus solo Pili Pili sur un croissant au beurre - enregistré entre Bujumbura et Paris - paraîtra finalement en 2014 sur le prestigieux Motown France.
Enfant du hip-hop ayant intégré les leçons d'Afrika Bambaataa, Nas, Rakim ("NYC") ou encore Questlove, grand admirateur des montres sacrés de la chanson française, Brel, Brassens et Gainsbourg, mais également fasciné par l'acteur et militant des droits civiques new-yorkais Harry Belafonte, il nous livre une œuvre optimiste et "anti-morosité", à cheval entre l'Afrique des Grands Lacs et la France, entre la danse de "Chalouper" et la tendresse folk de "Kwibuka". Nourrie d'influences musicales plurielles, sa musique engagée ("Lundi méchant") laisse échapper les rythmiques irrésistibles du semba angolais ou de la rumba congolaise, ainsi que les mélodies pop envoutantes ("Kerozen"), qu'élaborent avec lui ses fidèles complices, le musicien Guillaume Poncelet et le producteur Louxor.
A plusieurs reprises, Gaël a choisi de s'entourer d'invités prestigieux, histoire d'offrir encore davantage de couleurs et de nuances à ses textes. S'y côtoient ainsi Harry Belafonte (apparaissant dans "JITL", une adaptation de son succès intemporel "Jump In The Line") et Jacob Banks (crooner nigérian installé à Birmingham), la diva franco-canadienne Mélissa Laveaux ou encore le chanteur et guitariste rwandais/congolais Samuel Kamanzi. Le timbre de voix du slameur, à la fois doux ("Histoire d'Amour", "Zanzibar") et rageur ("Lueurs"), capte l'auditoire et fait mouche à chaque mot, cherchant tour à tour à émouvoir, à interpeller - sur des thèmes sensibles et parfois autobiographiques ("C'est Cool", "Respire") - ou à faire danser ("Boomer", )...
A découvrir...!