The Budos
Band - Burnt Offering (Daptone Records Differ-Ant)
La célèbre écurie de Brooklyn Daptone Records (maison de disque de Sharon Jones and The Dap-Kings
entre autres) publie le nouveau disque Burnt
Offering du collectif The Budos Band.
Toujours fidèle à son credo de l’enregistrement et du mixage analogique, le
label présente leur cinquième projet
instrumentalafro-soul,
largement dominé par des tonalités
éthio-jazz un brin sombres et psychédéliques. Le guitariste Tom Brenneck et ses acolytes nous
proposent en effet un cocktail enivrant
fusionnant les arrangements rock et les rythmiques funk sur fond de musique de
film des 70’s et de réminiscences du Black Sabbath.
Les B.Boys West-Coast Dilated Peoples, déjà remarqués en s'associant à Talib Kweli, Gangstarr, Kanye West ou The Roots, viennent de publier chez Rhymesayers Entertainment leur 5ième album studio intitulé Directors Of Photography. Invitant Dj Premier, 9th Wonder, Oh No, Twiz The Beat Pro, Jake One, Diamond D, Bravo et The Alchemist à la production, le combo s'est aussi entouré, après un break de 8 ans, des MCs Vince Staples, Catero, Krondon, Gangrene et Sick Jacken. Distillant leur hip-hop underground tranchant et old-school, Rakaa Iriscience, Evidence et Dj Babu signent un opus réussi à l'image de ce Show Me The Way doté de la voix soul d'Aloe Blacc!
Master Mix : Red Hot + Arthur Russell (Yep Roc/Differ-ant)
Qui était Arthur
Russell ?
Assez peu connu de son vivant, le très prolifique compositeur, violoncelliste et chanteur
américain qui nous quittait prématurément en 1992 des suites du sida,laisse derrière lui une œuvre musicale
expérimentale, notable pour sa variété, sa modernité déviante et sa
sensibilité.
Ayant tissé des liens subtiles entre, d’un côté la pop, le disco et la dance music
puis le rock new-yorkais, les chants indiens, les percussions vaudous, la
poésie contemporaine et la musique minimaliste
de l’autre, l’artiste obscur et complexe a toujours su, comme l’a écrit The New
Yorker, « relier des contrés à la
fois réelles et imaginaires, le rue et les champs, le doux New-York de la
bohème et la folie du Studio 54, la pop joyeuse et les possibilités de
libération de l’art abstrait. ». « Chez Russell, disco signifiait
avant tout dislocation, contorsion, répétition extatique qui conduit au même genre de sensations
organiques vertigineuses que chez Fela »,écrivait Christophe Conte dans les Inrocks en 2004 lors de la
sortie de la compilation The World If Arthur Russell.
Ses diverses collaborations forcent le respect, du poète
Allen Ginsberg au Dj Nicky Siano, en passant par Philip Glass et David Byrne, le musicien a mis d’accord toutes les tendances
musicales avant-gardistes et a autant stimulé les habitués du dancefloor
que les amateurs de musiques underground cérébrales.
C’est au tour de l’organisation Red Hot (luttant contre le sida grâce à la promotion de la culture
pop) et du label indépendant Yep Roc
Records de publier un nouvel hommage à
Arthur Russell. Master Mix :
Red Hot + Arthur Russell rassemble 26 covers interprétés par un casting
exceptionnel de plus d’une vingtaine d’artistes parmi lesquels on compte Hot Chip, Sufjan Stevens, Devendra
Banhart, José Gonzalez ou encore
les Scissor Sisters !
Les rythmes disco entrainants
et retro-jouissifs (de Tell You
par Robyn et de Is It All Over My Face & Tower Of Meaning par Blood
Orange) et l’énergie pop rock (de
Planted A Thought par Oh Mercy) alternent avec les ambiances folk méditatives et
intimistes (de Glen Hansard dans
I Couldn't Say It To Your Face ou de Sam Amidondans le sublime Lucky Cloud et
les textures électroniques hypnotiques
de The Revival Hour dans Hiding Your Present From You).
Voici un recueil de qualité présentant l’œuvre d’Arthur
Russell sous un jour peut-être plus accessible, une fort belle opportunité de
découvrir ou redécouvrir les sonorités aventureuse et clairvoyantes d’un des
parrains de la pop actuelle.
Forcément la comparaison de Lo Fang avec Jeff Buckley sur cette sublime reprise You're The One That I Want peut paraître grossière, et pourtant...
Comment ne pas tomber sous le charme de ces accents folk délicieusement romantiques ou de cette voix angevine, délicate et fragile, sensuelle et lancinante, qui ne cesse de faire écho à l'Hallelujah de la défunte rock star des années 90, un génie bêtement disparu par noyade le 29 Mai 1997?
Comment ne pas penser au chanteur islandais Asgeir et son prodigieux In The Silence, opus en suspension pris dans la glace de Laugarbakki?
Matthew Hemerlein alias Lo-Fang, chanteur et multi-instrumentiste comme l'était Jeff, interprète avec une douceur troublante le succès interplanétaire de John Farrar (guitariste des Shadows) You're The One That I Want. Paru en 1978, il fait partie de la bande originale du film culte Grease et était à l'époque interprété par John Travolta et Olivia Newton-John en personne.
Le jeune américain, qui enseigna la musique à des enfants sur Baltimore, publiait le 25 Février 2014 son premier projet electro-pop baptisé Blue Film, en Octobre dernier il était choisi par le producteur de film australien Baz Luhrmann pour participer au nouveau clip publicitaire de Chanel N°5, dont le rôle principale est tenu par l'actrice brésilienne Gisele Bündchen.
Lo-Fang est inspiré par le cinéma et notamment par Le Grand Bleu de Luc Besson. Il joue tous les instruments présents sur le disque, guitare, violon, violoncelle, claviers... L'artiste y distille, avec une mélancolie contagieuse, des arrangements riches et aériens (ou aquatiques!) influencés par ces périples autour du monde, du Cambodge jusqu'en Islande en passant par Nashville et Londres.
Le producteur et compositeur basé à Los Angeles est enrôlé par Lorde dans sa tournée US, il s'apprête ainsi à franchir une étape supplémentaire dans sa carrière, lui qui à 5 ans entamait une formation musicale classique avant de se passionner pour le jazz puis de voguer vers d'autres horizons. Préoccupé par l'arrangement des cordes, qui plantent l'atmosphère primordiale de son travail et qu'il exprime par la particule Lo de son nom d'artiste, Matthew symbolise l'aspect électronique de ses productions par Fang, deux entités maintenues en équilibre et servant d'écrin à des histoires subtiles, parfois autobiographiques ou parfois inspirées de ses observations.
La légende vivante de Cuba Omara Portuondo nous revient après 3 ans d'absence avec son magistral Magia Negra - The Beginning. Enregistré pour la première fois en 1958 pour le label Velvet, alors que la chanteuse faisait encore partie du groupe féminin Cuarteto de Aida, ce disque de jeunesse rendait hommage à la musique sud-américaine, avec ses thèmes populaires comme Besame Mucho (boléro composé en 1941 par la chanteuse mexicaine Consuelo Vélazquez) et au jazz américain, avec Magia Negra (originellement intitulé That Old Black Magic,écrit par Johnny Mercer et composé par Harold Arlen en 1942) et Caravana (reprenant le célèbre standard Caravan de la fin des années 30, écrit par Irving Mills sur une composition de Duke Ellington).
Au début des années 50, la jeune Omara créait d'ailleurs, avec son quatuor fémininformé de sa sœur Haydée et ses partenaires Elena Burke et Moraima Secada,un courant musical métis baptisé filin (ou feeling), inspiré bien sûr du son cubain (ou rumba) et autres boléros, mais aussi du swing grandiose et classieux des divas Ella Fitzgerald ou Sarah Vaughan.
Placée sous le feu des projecteurs en 1996 grâce au projet Buena Vista Social Club du guitariste Ry Cooder, Omara relance sa carrière et le grand publique (re)découvre alors une artiste majeure de la scène jazz de Cuba. N'oublions pas que l'immense Nat King Cole, le compositeur Jorge Drexler, le groupe Los Van Van et plus récemment les chanteurs brésiliens Maria Bethania et Chico Buarque, les bassistes Richard Bona et Avishai Cohen, le pianiste Chucho Valdes ou encore le percussionniste Trilok Gurtu [...] l'ont tous croisés au moins une fois en concert ou lors de séances d'enregistrements.
Malgré un grand nombre de scènes (Olympia de Paris, Carnegie Hall de New-York), d'albums solo et de collaborations prestigieuses étalées sur plus d'une trentaine d'années, elle se faisait de plus en plus rare, la politique de Fidel n'ayant pas facilité les choses.
À tout juste 84 ans, cette grande dame du jazz et de la culture caribéenne semble détenir le secret de la longévité. De retour en studio pour cette nouvelle mouture de Magia Negra - The Beginning, "la novia del filin" retrouve l'équipe avec laquelle elle avait gravé en 2011 Omara & Chucho. Rolando Luna est au piano, Gaston Joya à la contrebasse, Rodeny Barreto à la batterie, Andres Coayo aux percussions, Alexandre Abreu à la trompette et Juan Manuel Ceruto au saxophone ténor et à la flûte.
Omara a aussi sollicité plusieurs invités spéciaux. On note en effet et non des moindres, le compositeur et chanteur brésilien Yvan Lins qui intervient à ses côtés sur le touchant No Puedo Ser Feliz. El Micha, célèbre chanteur de reggaeton, associe quant à lui sa voix à celle du conteur Luis Carbonell (disparu en Mai dernier) sur le titre au groove urbainOguere, se transformant presque en ballade hip-hop. Des voix féminines contribuent aussi à apporter une touche de modernité à l'album. Nous pouvons ainsi écouter la voix de sa petite-fille Rossio Jimenez sur une Noche Cubana langoureuse.
Pour sa tournée internationale, Omara s'entoure d'une pléiade de jeunes artistes tout aussi talentueux, comme les chanteuses cap-verdiennes Lura et Mayra Andrade ou bien la somptueuse section rythmique du pianiste cubain de génie Roberto Fonseca, rassemblant son trio composé de Joel Hierrezuelo aux percussions, Ramsés Rodríguez à la batterie et Yandy Martinez à la basse.
Autant dire qu'ellen'est pas encore prête à rendre son micro !